Chapitre 42 : L'ombre de Solaris

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Il étouffait.

Autour de lui, les ténèbres l'oppressaient, le submergeaient, vague après vague, toujours plus obscures, toujours plus impénétrables. Et il suffoquait, étranglé par des mains qu'il ne parvenait pas à desserrer. Ses ongles lacéraient la chair, se rougissaient de sang mais rien ne semblait capable d'ébranler l'étreinte de ces doigts meurtriers.

Il essaya de crier, d'appeler à l'aide, mais de sa gorge broyée ne s'échappa qu'un misérable gémissement, un sanglot à peine audible. Puis l'étau se resserra, encore et encore, et les os de sa nuque se brisèrent dans un claquement sonore.

CRAC !

Cyan se réveilla en sursaut, la bouche ouverte sur un hurlement de terreur silencieux. Son cœur palpitait si fort dans sa poitrine que chaque battement résonnait comme un puissant coup de bélier contre sa cage thoracique. Puis ses prunelles paniquées s'habituèrent à la semi-obscurité des lieux et les ombres qui semblaient danser autour de lui se transformèrent en chaises, en tables et en rideaux immobiles.

Il s'apaisa.

Un peu.

Ce n'était qu'un cauchemar. Un simple cauchemar. Rien de réel. Rien de définitif. Juste un tour de son esprit, un mirage éphémère.

Le corps toujours secoués de tremblements irrépressibles, Cyan se raccrocha à cette idée de toutes ses forces. Toutefois, il lui semblait encore sentir la pression de cette main de fer lui comprimer le cou. Et ce bruit. Le bruit de ses cervicales qui se rompaient... Il résonnait en un écho sans fin dans ses oreilles, plus terrifiant que tout le reste.

Il était passé si près...

À ce souvenir, un froid glacial s'empara de son estomac et un frisson incontrôlable remonta le long de son échine, couvrant sa peau de chair de poule. Il voulut déglutir mais sa gorge, aussi sèche que le désert des Terres Cendrées, se révolta à cette idée et lui arracha une douloureuse quinte de toux. Par réflexe, il tendit la main pour s'emparer du gobelet de lait de pavot dont il se souvenait avoir laissé un fond, la veille. Mais sur la table de nuit, ses doigts ne rencontrèrent que le vide ; le chandelier et le gobelet gisaient à terre, balayés du meuble par ses propres gestes brusques alors qu'il se débattait dans son sommeil.

Et merde !

Plié en deux au creux des draps, Cyan se tenait les côtes, les flancs meurtris tant par les traits de feu incandescents que lui décochait son os fêlé, que par les courbatures insupportables qui lui raidissaient les muscles.

Une longue minute, puis une autre et une autre encore, s'écoula ainsi sans qu'il n'osât bouger le moindre orteil, de crainte d'empirer ses souffrances. Puis comme la douleur commençait à refluer, il entreprit de reprendre son souffle, le front et le reste de son corps trempés de sueur. Il avait besoin d'un bon bain ou, à défaut, d'une bonne toilette pour se rafraîchir, ce qui le força à se redresser, lentement, sans geste brusque ni précipitation inutile.

Lorsqu'il parvint enfin à s'asseoir sur le bord du lit, son regard glissa vers les rideaux entrouverts d'où jaillissait une cascade de rayons à peine rosés.

Osorii et Ezarii hésitaient encore à émerger de leur long sommeil, leur lumière languide témoignant de leur paresse, et lui, les yeux bouffis et l'esprit groggy, ne les en détesta que davantage.

— Au temps pour ma grasse mat', marmonna-t-il, de mauvaise humeur.

Alors qu'il s'apprêtait à se lever, il interrompit son mouvement, le coin de l'oeil attiré par un éclat doré. Les yeux plissés, il se pencha vers le sol avec mille précautions avant de ramasser la médaille du mendiant qu'il avait oubliée, ses souvenirs de la veille toujours un peu flous à cause du lait de pavot. Sous ses doigts, les reliefs à demi-estompés des gravures lui rappelèrent les mots qu'il avait essayé de décrypter la veille, en vain.

Etoile Noire - Tome  1 : Les Disparus de ResnaNơi câu chuyện tồn tại. Hãy khám phá bây giờ