Lemuria - Taekook

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"Donnez-moi ces noms. Que ça me plaise ou non. Qui avez-vous fait tuer dans cette maison ? Qui sont ces gens ?

- Mais, commissaire... vous les connaissez déjà."

Toujours la même histoire. Des banderoles, trop jaunes, des photos, qui se pressent, des indices, des rapports de police. Namjoon, épuisé, boit son troisième café. Les premières collines de Provence s'étendent sous ses yeux recouverts d'un voile. Hoseok garde le silence, mais n'ose pas s'éloigner.

Il se retourne, et près de la haie, Jungkook et Taehyung se promènent. Rien qu'un simple t-shirt rouge, rien qu'une chemise en lin. Ça pourrait être si simple. Jungkook ne saigne plus, le sang sur leurs mains ne dessine plus qu'une ombre que l'on devine à peine.

Des spectres, des spectres qui se trainent sur des tons jaunes et verts. Lorsque Taehyung se retourne, Jungkook n'est jamais loin. Ce regard, dans le sien, n'est plus tout à fait le même. Jimin est parti, déjà, le matin-même. La route n'est pourtant pas si longue jusqu'au cimetière. On y entre sans y penser, sans regarder en arrière. Jimin est parti et Taehyung a placé toute sa confiance en lui. Il ira récupérer ces lettres, ces foutues lettres qui leur ont coûté la vie. Dans certains sens du terme.

Ce regard, dans le sien, n'est plus tout à fait le même. Et Taehyung redevient pâle, en un instant. Une quinte de toux. Il s'assoit sur le banc en pierre, à l'ombre du platane.

- Tu sais, Jungkook, je t'ai menti... je ne suis pas tout à fait sûr de la dose.
- Je sais.

Il a un doux sourire. Une mélodie s'échappe de la fenêtre ouverte et la campagne est déserte. Le mistral sans violence, dans les champs de lavande. Et la chaleur tranquille. Jungkook s'assoit aux côtés de Taehyung.

- C'est fou, n'est-ce pas ? Comment, en l'espace de quelques heures, on peut accepter l'idée de mourir.

...n'est-ce pas ?

Namjoon et Yoongi, dans le salon sans lumière. Une plante à l'agonie. Une cassette à la renverse. De la fumée, dans l'ombre.

- C'est votre dernière chance de nous dire ces noms. Le lieutenant revient dans quelques minutes avec les analyses, Yoongi.

Mais celui-là fixe toujours le mur, sourire aux lèvres, à quelques heures, quelques minutes peut-être de la garde à vue, du tribunal, de l'éternité entre quatre murs. Il n'y croit pas. Toute menace a déjà été éliminée, et tout ceci n'est qu'un contre-temps.

Un t-shirt rouge, une chemise en lin. Jusqu'à la fin, ils ont tenté de se tenir la main. Jimin a tressailli en entendant les coups de feu, en plein jour. Il a attendu dans la voiture. Mais les lettres, toutes ces foutues lettres, il n'y a pas touché.

Une porte s'ouvre, Namjoon soupire :

- Trop tard.

Des pas précipités, Hoseok entre sans frapper. Il n'a pas pu dire ça au téléphone, il ne savait pas comment faire, comment trouver les mots. Le collègue, le frère. Son propre frère. Et cette histoire qui n'a aucun sens, cette histoire pour entremêler les fils du temps.

- Namjoon, je...

Il se lève, va stopper l'enregistrement. Yoongi n'esquisse pas un geste. Et sur l'étagère, le regard de Namjoon s'arrête sur cette cassette, cette cassette qui était dans le magneto. Il la regardera plus tard.

- Dis-moi, Hoseok.
- Tu te souviens, que les ADN n'étaient pas dans la base et que c'est pour cette raison que ça a pris plus de temps ?

Namjoon acquiesce. Cette lueur, ces mains qui tremblent, Hoseok cherche longtemps la force de le dire.

- Ils sont... dans la base. Mais pas dans la bonne base. Namjoon... ils sont, ils étaient déjà morts.

...Ils s'appelaient Kim Taehyung et Jeon Jungkook.