Chapitre 21

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J'ai soupé en compagnie de Rémiel pendant que Sam nous observait du coin de l'œil, près de la fenêtre. Je lui ai demandé pourquoi il n'était pas au Paradis mais il a changé de sujet, m'expliquant qu'il ne préférait pas en parler. Il m'a remerciée et m'a dit que sans mon aide, il serait probablement mort à l'heure qu'il est tellement il était amoché.  Je ne peux m'empêcher de me sentir coupable parce qu'après tout, c'est un peu de ma faute. Il m'a conseillé de me reposer encore un peu et est reparti, avec Sam. Je n'ai même pas pensé à demander où nous nous trouvons.

J'ai essayé de me reposer encore un peu mais ce fut un échec. Après quelques heures, je déclare avoir de toute façon assez dormi et je me lève. J'aimerais vraiment prendre une douche mais je ne sais pas où se trouve la salle de bain. Je me lève et allume la lampe. Je scrute la pièce. On a encore changé d'endroit. Le mobilier est rudimentaire: un lit double, deux petites tables de nuit de part et d'autre de celui-ci, et une petite commode. Il n'y a pas de porte à l'horizon, sauf celle par laquelle les frères sont sortis. Je me lève, chancelle un peu et sors donc par là.

Je me retrouve dans un petit couloir où je compte six portes. Je n'ai vraiment pas envie de tomber sur leur chambre. Je cherche après mon téléphone et je réalise que je ne l'ai plus depuis qu'on m'a enlevée. Je m'approche de chaque porte et, à mon grand soulagement, une d'entre elles bénéficie d'un petit écriteau avec écrit « salle de bain ». J'entre donc dans cette pièce. Elle est simple. Les murs sont blancs, les meubles en bois clair. Il y a un évier, une baignoire et une douche. Des essuies sont posés sur une étagère, avec quelques habits ainsi qu'une paire de baskets. Je m'en approche et constate que ce sont des habits féminins à ma taille, ils ont probablement anticipé mon geste. Je prends une longue douche qui me fait un bien fou. Je m'habille, me lave les dents grâce à une brosse neuve qui se trouvait dans le placard en-dessous de l'évier, me sèche brièvement les cheveux et sors.

Il fait toujours nuit et il n'y aucune horloge pour m'indiquer l'heure. Une envie de prendre l'air me submerge. Je m'avance dans le couloir qui débouche sur un salon. Je traverse la pièce sans m'y attarder et tombe dans la salle à manger. Je constate qu'il y a une porte-fenêtre qui mène à un immense jardin avec une piscine. J'ouvre la porte et me retrouve sur une terrasse en carrelage gris. L'air froid me surprend et je suis contente d'être en jeans et sweat-shirt noir. Je frictionne mes bras et prends de grandes inspirations. Je repère les transats près de la piscine et me dirigent vers eux. Je recule d'un bond et ai un hoquet de surprise lorsque je vois une forme noire se détacher de l'un des sièges pour me regarder.

–Azaël, murmuré-je.

–Aëmiliana. Content de te voir sur pieds, réplique-t-il de sa voix sombre.

Il se recouche. Sa capuche relevée cache sa masse de cheveux noirs soyeux. Je décide tout de même de rester et je prends place sur le siège à côté. Un silence s'installe entre nous. Je ne sais pas trop quoi lui dire alors, autant ne rien dire. Je regarde les nombreuses étoiles.

–Tu sais que la plupart des étoiles que tu vois sont déjà mortes ?

Je tourne la tête vers lui et attends qu'il poursuive son explication.

–Certaines sont si loin qu'il faut des années pour que la lumière nous arrive. Donc, quand elle meurt, elles ne s'éteignent pas de suite à nos yeux.

–Intéressant...

Un silence s'installe entre nous. J'aurais aimé lui parler de ce qui s'est passé tout à l'heure mais plus le temps passe, plus je comprends que c'est une mauvaise idée. Après toute cette histoire, j'aimerais reprendre une vie plus ou moins normale, loin de tout ça.

Azaël se lève sans dire un mot et s'engouffre dans la maison en claquant la porte derrière-lui. Son comportement ne cessera jamais de me surprendre.

Seule dans la pénombre, je me demande soudainement si c'était une bonne idée d'être sortie ici. C'est dommage car la nature m'apaise beaucoup en temps normal.  Je repense aux moments où cela ne m'inquiétait pas d'être seule dans le jardin. Ça me semble si loin. Tout a pourtant changé si vite. Jamais je n'aurais pu deviner ce qui allait m'arriver. C'est sur ses pensées que mes yeux se ferment et que je m'endors.

***

–Emmy?!

...

–Aemiliana ?!

Je me réveille à cause ces cris incessants. La lumière du soleil me brûle les rétines instantanément. Je me redresse du siège en grommelant et me retourne juste à temps pour voir Sam débouler par la porte-fenêtre.

–Tu m'as fait une de ces peurs! Qu'est-ce que tu foutais dehors toute la nuit ?!

Je l'observe s'agiter et je déclare que ce n'est absolument pas le moment de m'ennuyer. C'est le matin. Il doit me laisser me réveiller doucement. Je me retourne et me laisse glisser sur le transat en poussant un grognement de frustration. Je l'entends soupirer.

–Le déjeuner est prêt. Il te faudra des forces pour aujourd'hui. J-2, n'oublie pas.

J'entends la porte se refermer, en même temps que mes yeux. Je n'ai vraiment pas envie de commencer cette journée.

Après une dizaine de minutes, je me force à me lever. Je passe d'abord en vitesse dans la salle bain avant de rebrousser chemin en direction de la cuisine. J'ai aperçu dans la salle de bain qu'il était huit heures, ce qui m'a d'autant plus énervée. J'ai relevé la capuche sur ma tête, trop fatiguée pour être disponible. Je m'assieds lourdement sur un tabouret et chope un pain au chocolat en face de moi. Je m'endormirais sur la table si elle n'était pas remplie de nourriture.

–Hey, Em.

Je sursaute un peu trop et relève la tête vers cette voix. Rémiel tient un journal entre ses mains, qu'il a baissé pour le regarder.

–Oh... Pardon. Hey !

Il retient un petit rire.

–Tu n'es pas du matin hein non?

Je le regarde, embarrassée.

–Pas vraiment...

Je finis de manger en silence. Je débarrasse la table et contemple un peu l'extérieur.

–Puisque je ne trouve pas Sam, je vais t'aider jusqu'à son retour.

Je l'observe en l'interrogeant du regard.

–Il faut bien que tu apprennes à te battre.

Je soupire. La réalité me frappe de plein fouet. Pourquoi ne puis-je pas fuir tous mes problèmes en me roulant en boule dans mon lit, sous les couettes? Sur ces pensées, il se dirige vers l'extérieur et je le suis.

Mon ange [terminée]Where stories live. Discover now