L'art dans la peau - [Tome 3] Sur le tapis rouge

Chapitre 15 :

Je vais au parc retrouver Thomas. J'ai besoin de voir un enfant, une personne qui sait m'écouter et avec qui je peux parler comme un frère. Je ne sais pas si j'aurais dû réagir comme ça, si je devais partir comme une lâche mais c'est trop tard. Je ne peux pas revenir comme s'il ne s'était rien passé. Je m'assois sur un banc et Thomas qui vient d'arriver avec sa mère vient tout de suite me voir. Sa mère me salue et commence à lire un livre. Je salue Thomas et nous faisons un câlin. Depuis la première fois que nous nous sommes vus, nous nous sommes énormément rapprochés. Je peux parler des heures avec lui. Il est très intelligent et débrouillard pour son âge. Thomas ne vient pas au parc pour jouer avec les autres enfants, il préfère discuter avec moi de sa passion qui est le théâtre, le cinéma. Comme Nora et comme... moi.
 
— Thomas, tu as grandi, dis donc.
 
Thomas sourit.
 
— J'ai onze ans, je suis grand maintenant.
 
Je ris.
 
— C'est exact.
 
Je jette un œil à la mère de Thomas, qui s'appelle Alice, m'a-t-il dit.
 
— Comment va ta mère ? Elle survit à l'absence de ton beau-père ?
 
Thomas acquiesce, le sourire aux lèvres.
 
— Figure-toi qu'il est revenu. Il a fini son voyage et il a dit que je lui avais manqué.
 
Je souris.
 
— Je suis contente pour toi.
 
— Tout va bien de ton côté ? demande-t-il.
 
Je hausse les épaules.
 
— J'ai quelques petits problèmes mais bon... ça va s'arranger. Enfin, je l'espère.
 
— J'espère pour toi, dit-il.
 
Thomas regarde les enfants jouer et glisser le long du toboggan.
 
— Si tu veux jouer, tu peux y aller, tu sais, je lui informe.
 
Thomas hausse les épaules.
 
— J'aime bien discuter avec toi. Tu sais, si j'avais eu une sœur, j'aurais bien aimé qu'elle te ressemble.
 
Je souris.
 
— Ça me touche beaucoup, merci. Je pense la même chose pour toi. Mais bon, sache que je préférerais avoir ta mère que la mienne.
 
— Pourquoi ? demande-t-il.
 
— Parce que ma mère ne s'occupe pas de moi. Elle n'est pas comme la tienne, toujours là pour toi et prête à t'écouter.
 
Thomas baisse la tête.
 
— Oh, je suis désolé. Par contre, ton père, il est gentil ?
 
Je soupire.
 
— Je pense que oui. Il est parti de la maison quand j'étais jeune. J'aimerais tellement le revoir. Je ne sais pas ce que je ferai mais je voudrais tellement lui parler, il me manque beaucoup. Tout ce que je demande, depuis qu'il est parti, c'est qu'il revienne et qu'il m'écoute pour ce que j'ai à lui dire.
 
Thomas me prend la main.
 
— Il reviendra, je le pense très fort.
 
Je souris. J'aperçois un homme s'asseoir à côté d'Alice. Thomas m'annonce que c'est son beau-père qui vient d'arriver. Thomas va voir son beau-père, et il me demande de l'accompagner. Je le suis et je m'apprête à serrer la main de son beau-père en guise de politesse mais je me fige. Cela faisait longtemps, très longtemps. Il a peut-être pris quelques rides mais je n'ai jamais pu oublier son visage. Alice vient de l'appeler Marc et je ne pense pas que ce soit une coïncidence. Je me demandais comment est-ce que j'allais le retrouver, dans quelle situation j'allais le revoir et maintenant, je le sais. Il ne m'a pas reconnu, c'est normal. J'ai changé. Quand il est parti, j'avais onze ans, à présent, j'en ai dix-neuf. Je ne lui dis pas bonjour, la seule chose que j'arrive à dire c'est ces paroles que je ne pensais plus dire un jour.
 
— Papa ? C'est moi, Eva, ta fille.