Chapitre 20

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Ma tête me fit atrocement mal lorsque je rouvris les yeux. Je m'attendais à retrouver mon vieux matelas mais c'est contre le sol dur que ma tête claqua. Je poussai un grognement en me redressant petit à petit, l'esprit en compote. Quelque chose clochait... Les événements récents me revinrent comme une avalanche de souvenirs en pleine tête.

Eris. Sa mort. Un coup sur ma tête.

Je m'étais évanouie. J'apportai mes doigts à mon crâne, l'esprit à vif. Du sang poisseux recouvrait mes ongles. J'analysai le paysage autour de moi. J'étais dans la salle de trône. Et celui-ci était vide. Il n'y avait personne, pas même un seul garde ni un seul patrouilleur.

La nuit était tombée. Et quelque chose n'allait pas. Je me remis sur pieds, avançai vers les fenêtres. Les faisceaux de lumière des patrouilleurs avaient disparu. Plus aucun signe d'eux. Que se passait-il ?

Des voix résonnèrent dans le couloir. Ma robe me compressait l'estomac. Il fallait que je me change, que j'emporte Niam avec moi et que je fuis loin d'ici. Eris avait été très clair : des gens allaient s'en prendre à moi et ce n'était pas difficile à croire. On disait de moi que je serais la conséquence directe de la fin d'Eternera. Combien de personnes souhaitaient me voir morte, à l'heure d'aujourd'hui ?

Les portes s'ouvrirent à toute volée. Je poussai un cri d'horreur en voyant Niam voler à travers la pièce. Il s'écroula au sol dans un bruit sourd, sous mon regard effaré.

Le Prince des Ténèbres surgit, accompagné cette fois-ci de deux de ses sbires. Ses hommes portaient des uniformes noirs et une sorte de vieille cuirasse sur la tête.

— Saisissez-la.

Non, non, non. Je reculai mais trébuchai contre les marches menant au trône. Les deux hommes s'avancèrent, me saisirent par les bras, me comprimant ainsi les veines.

Le Prince des Ténèbres croisa mon regard. Sa cape touchait le sol, ses cheveux noir corbeau paraissaient désordonnés cette fois-ci. Quel âge avait-il ? Des milliers d'années, d'accord, mais quelle était sa motivation ? Qui prenait du plaisir à faire du mal à d'autres ?

Niam se releva en geignant et je retins mon souffle. Il faisait face au meurtrier de nos parents. Un gamin de treize ans était plus courageux qu'une adulte de dix-huit. De ses mains, il forma une boule d'énergie qu'il projeta sur son adversaire.

Cela le toucha à l'épaule. Le Prince des Ténèbres grimaça mais s'avança, menaçant.

— J'éviterais de jouer avec la magie si j'étais toi, gamin.

— Niam ! hurlai-je.

Il fit volte-face et, sans réfléchir, courut vers moi. Mais il y avait deux sbires à ma charge. Je tentais de me débattre, en vain. Le Prince envoya valser ses ténèbres sur mon petit frère.

Niam s'effondra de nouveau et ne se releva pas cette fois-ci. Furieuse, le cœur en miettes, je me débattais comme un animal enragé.

— Mais c'est qu'elle est sauvage, celle-la, roucoula le type à ma droite.

Une énorme balafre lui barrait les lèvres. Il empestait la sueur. Il se pencha vers moi comme pour me humer et je retins une grimace de dégoût. Bientôt, son autre main me saisissait par la gorge et m'empêchait de respirer. Il la descendit lentement, comme pour savourer sa victoire, comme pour savourer ma détresse.

Je retins un cri au plus profond de ma gorge lorsque du sang gicla sur mon visage, et que l'homme s'effondra au sol en hurlant. Sa main venait d'être tranchée. Sous mes yeux. L'autre sbire ne savait pas comment réagir. J'étais pétrifiée de terreur.

The Last Soul | TOME 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant