CHAPITRE 4 (partie 1)

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CHAPITRE 4

Le marché

    Je me tenais devant la gare, seulement munie de mon sac et du journal de bord qui ne me quittait plus. Le soleil semblait particulièrement puissant et se reflétait sur les rails, me forçant à plisser les yeux alors que j'inspectais. Un peu plus loin, là où on stockait les trains, il y avait Archie. On m'avait dit qu'il passait souvent son temps à prendre soin de sa nouvelle possession, un train à vapeur, rachetée à son professeur quelques mois auparavant.

    Il me faudrait tout mon courage pour mettre mon orgueil de côté. Monsieur Belmonde croyait en moi pour récupérer son objet. Là où il se trouvait, il espérait sûrement que je fasse de mon mieux. Je ne savais toujours pas ce qu'il voulait et ce que j'allais découvrir avec cet artefact, mais il ne m'aurait pas demandé une telle quête si ce n'était pas d'une certaine importance.

J'avais toujours le choix de laisser tomber mais je ne pouvais simplement pas m'y résoudre. Pour une raison ou pour une autre, monsieur Belmonde avait prévu la possibilité de ne plus être présent et m'avait confié une mission sans m'en parler avant. Qu'est-ce qu'il craignait ? Était-ce la même raison de sa disparition ? Pourquoi ne pas me parler de l'artefact plus tôt ? Trop de questions. Je n'avais qu'un seul début de réponse : ces arrêts à visiter et ces clés à chercher.

    Je devais trouver un moyen de quitter cette campagne et de rallier les différentes zones que monsieur Belmonde avait visité. J'avais lu les différentes pages du journal et elles représentaient toutes des destinations connues. Elles étaient si éloignées que j'étais obligée de trouver un moyen de transport. C'était pour cela que j'avais dû me rendre à l'évidence ; l'arrivée d'Archie tombait parfaitement.

    J'avançais le long du quai jusqu'à descendre un escalier étroit. Des mauvaises herbes poussaient entre les planches de bois, signe que ce passage n'était pas emprunté par beaucoup de monde. Les travailleurs de la gare avaient leur entrée attitrée mais il fallait un badge pour pouvoir s'y rendre. Les visiteurs non accompagnés devaient emprunter le vieux chemin et attendre qu'on leur ouvre. Là seulement, je pouvais essayer de trouver Archie et négocier.

    Et s'il refusait ?

    Il en avait le droit. Ce serait même plutôt logique. Nous ne pouvions pas nous voir en peinture, la soirée de la fête avait été une rencontre abominable. Je n'avais pas été cordiale non plus. Je pouvais comprendre un refus de sa part d'entreprendre un voyage avec moi. Sans parler du fait que c'était dangereux. Monsieur Belmonde avait aussi demandé à ce que je n'en parle pas, mais je devais me montrer réaliste. Une fille seule, à pied, qui n'avait jamais voyagé avant... pas le profil idéal pour parcourir le pays. Archie était ma meilleure option.

    L'option la moins accessible aussi.

    Mais je devais essayer. Pas le choix. Ni la fierté ni les doutes ne pourraient m'empêcher de tenter ma chance. Il y avait une possibilité qu'il accepte, je devais la prendre.

    Je longeais les rails jusqu'à arriver face à un immense hangar. Une grille m'empêchait de traverser et de rejoindre l'endroit. Il fallait dire que les installations à l'intérieur valaient beaucoup d'argent, c'était un gros investissement pour un village comme le nôtre. Les locomotives étaient rangées en demi-cercle. Au centre, un bout de rail tenait sur une plate-forme ronde qu'on pouvait bouger pour sortir les engins. Postée devant la grille, je criais en demandant si quelqu'un m'entendait.

    Personne ne répondit. J'appelai encore une fois, un peu excédée. Finalement, je m'impatientai et me mis à dire :

— Je suis à deux doigts d'ouvrir toute seule cette grille !

Le toucher du Temps | TOME 1 : les secrets de l'horlogerKde žijí příběhy. Začni objevovat