FOREVER AND EVER [ TERMINÉ ]

43 ✩ L'amour comme poignard.

CHAPITRE 43

𝄞 SAVE YOUR TEARS by THE WEEKND & ARIANA GRANDE 𝄞

« Cause I don't have you here with, here with, here with me.
But at least I have the memory.»

ARYA

Monsieur Tate nous laisse enfin la parole d'un simple geste de la main. Debout, devant cette classe qui disparaitra d'un claquement de doigts dans quelques semaines, je me tiens droite et saisis mes notes fermement entre mes mains.

Sam, de sa place, m'encourage d'un clin d'œil unique et m'offre un sourire se voulant réconfortant. Comme à mon habitude, je tremble, car l'anxiété prenant possession de mon corps est plus fort que les semaines durant lesquelles j'ai tant travaillé et appris cet exposé.

Soigneusement, Tyler et moi sommes séparés par les trois mètres qui symbolisent la distance qui nous distingue désormais.

Malgré le fait que j'évite avec précision son regard, je le sens tendu et crispé à ma gauche.

Durant une dixième de seconde, j'observe les visages curieux de mes camarades. Des murmures moqueurs se font entendre. Je ne doute pas une minute de la nature de leurs chuchotements. Ma rupture avec Tyler a fait du bruit ce week-end.

J'aurais dû savoir que les gens finiraient par le savoir, c'était d'une évidence folle, bien que notre relation n'était pas tant exposée au public que ça...

D'une voix forte et porteuse de regrets, j'entame la présentation, ce qui fait taire les bouches.

— L'amour est très certainement l'un des sujets qui interrogent le plus. Depuis l'Antiquité, il intéresse les philosophes, les auteurs, les psychologues, les sociologues, et bien évidemment, des personnes comme vous et moi. Pour Platon, les passions, dont l'amour fait partie, doivent être condamnées, car elles mènent à l'aveuglement d'un individu sur toute possible réflexion. Néanmoins, l'amour est aujourd'hui vu comme le moyen de s'appuyer sur quelqu'un, de se libérer d'un poids et de s'aimer à travers le regard d'une personne autre que nous-même.

Mes paroles s'effilochent dans la salle, parvenant alors jusqu'aux oreilles de Ryan, situé au fond de la salle. Je suis étonnée de le voir aussi concentré sur mes dires. D'habitude, il est celui que le professeur réprimande pour ne pas avoir écouté.

— Avec Tyler, nous nous sommes donc interrogés sur la nature de l'amour. Est-il la condition sans laquelle un homme ne peut survivre au vingt-et-unième siècle ? Ou au contraire, doit-on s'en passer, afin d'éviter le risque d'être davantage blessé que si nous n'étions pas tombés amoureux ? Nous pouvons alors nous demander si l'amour est capable de soigner des cicatrices profondes.

Je jette quelques regards à ma feuille, cependant, les mots forment un flot de phrases qui n'ont pas besoin d'être soutenues par mon écriture. Ils sortent tous seuls, dans un naturel que je ne me connaissais pas.

Une pause dans notre récit fait lever la tête de quelques endormis, qui, soudainement curieux, s'intéressent aux paroles de Tyler qui entame la première partie.

La voix tremblante, ses pupilles détaillent ma silhouette, s'avérant désormais sûre d'elle, et j'ignore volontairement son besoin d'être rassuré.