Chapitre 1

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L

ucien entra à dix-sept ans à l'université nationale de littérature de Paris, en compagnie d'un de ses plus proches amis, qui portait le nom de Martin Sespel. Il faisait partie de ces élèves surdoués qui, passionnés de littérature, écrivait des proses extraordinaires.

Il entra dans l'établissement en septembre 1986. C'était un vaste édifice de béton blanc, qui était d'une valeur architecturale moderne pour l'époque. On fit d'abord amener les deux garçons dans une large salle de classe, où on leur dit qu'ils allaient passer des tests de détection qui allaient déterminer le niveau et la classe de chacun.

« Le sujet est libre, dit l'encadrant, un moustachu, et vous pouvez écrire autant que vous voulez. »

Lucien, pour une fois, n'avait pas d'inspiration. Il avait l'habitude que ses professeurs lui imposent un thème d'écriture précis, cela l'aidait à composer ses textes. Et alors qu'il allait s'apprêter à jeter un regard discret sur la feuille quasi pleine de son meilleur ami, il sentit un clapotement de main sur son dos.

« Excuse-moi, dit une jeune fille de son âge, tu aurais un stylo à me prêter ? »

Elle était radieuse. Aussitôt, Lucien rougit et comprit qu'il venait de tomber éperdument amoureux.

« Oui, bien sûr, dit-il en se précipitant sur sa trousse qu'il fit tomber en passant, par maladresse. »

Il la ramassa et en sortit un stylo à bille bleu qu'il lui tendit.

« Merci ! dit-elle d'une voix si féminine, si douce, si fragile, si belle à entendre. »

Il se précipita à son siège. Se penchant sur son papier, il venait de trouver l'inspiration : l'amour. Alors, un flot immense de mots se bousculèrent dans sa tête : il avait entièrement trouvé le texte qui allait remplir sa feuille encore immaculée. Le résultat final fut savouré par le professeur une heure plus tard, sur son bureau. C'était une prose sentimentale de quatre pages évoquant la rencontre d'un garçon avec l'amour de sa vie. Lucien obtint la note de 19,75 / 20, son ami Martin ayant 18. Celui-ci avait fait un texte brillant de littérature érotique car, comme l'avait précisé l'encadrant, tout était permis ici, du moment que cela restait bien écrit.

Les deux amis entrèrent donc en classe A, la meilleure section de toute l'université, en compagnie de seulement sept autres jeunes étudiants, dont la jeune fille charmante qui avait séduit dès le premier regard Lucien.

On les installa ensuite dans une salle de classe où on leur proposa un travail de groupe sur les figures de styles et les personnifications qui donnerait lieu ensuite à un grand examen où il leur faudrait composer un poème en comprenant. Lucien, Martin et la jeune fille du prêt de stylo qui se prénommait Marion se mirent ensemble. Quand Martin l'aperçut, il rougit une énième fois, comme il en avait l'habitude à chaque fois qu'il rencontrait une fille. Mais à son grand étonnement, elle fit de même. Ils étaient tous deux gênés. Gênés par cette scène qu'on ne voit que dans les comédies romantiques. Elle le trouvait beau, et il la trouvait belle. C'était un moment très embarrassant pour Lucien.

« Ça ne travaille pas, ici ? rugit sèchement le professeur. »

Ils se remirent alors au travail.

En sortant du cours, Martin interpella Lucien :

« Elle est jolie, non ? »

- Euh, oui, si tu le dis, mentit Lucien, inquiet.

AmoureuxWhere stories live. Discover now