Cette histoire est la nôtre - 2

26 2 0
                                    

« Lui »

Ce fut le dernier mot prononcé avant que mon chaperon ne m'emmène dans l'édifice. Après le dîner, le souper et une nuit de sommeil, je pris mes affaires et allai à l'église. Je n'avais pas le droit de prendre beaucoup d'effets personnels pour le voyage en Nouvelle-France, seulement le nécessaire. Je ne possédais qu'une simple malle de cuir brun. Elle contenait des vêtements que j'avais achetés avec les 30 livres offerts par le roi, une coiffe, un mouchoir de taffetas - de tissus -, un manteau à capuchon, un peigne, quatre rubans pour cheveux, une paire de lacets, des bas et des gants. Nous, les filles du Roy, possédions également une bobine de fil blanc, des ciseaux de couture, deux couteaux, cent aiguilles et mille épingles, ainsi qu'une petite boîte avec deux livres en monnaie. J'ajoutai à l'intérieur un roman et quelques objets importants pour moi. La femme de la veille m'aida à me préparer afin de me marier au plus tôt. Je me doutai bien que les préparatifs se feraient rapidement mais aussi vite, je n'y crus pas. Nous passâmes devant le curé, qui nous demanda si le mariage convenait au deux. Nicolas et moi acquiesçâmes. Jamais je ne me serais doutée que je me marierais à un homme que j'avais rencontré la veille. Le curé nous posa des questions sur notre relation mais mon chaperon répondit que j'étais fille du Roy, orpheline de mes deux parents et que personne ne pouvait approuver mon mariage. L'homme que j'épousai avait l'accord de ses parents pour être prétendant et aspirait à la main d'une des nouvelles arrivantes. J'en conclus que Nicolas s'était présenté personnellement à mon chaperon et lui avait déclaré tous ces biens. Le mariage était conforme à notre devoir et à l'Église. D'après le contrat, Nicolas et moi promettions de s'occuper l'un de l'autre. Puisque la cérémonie de mariage ne dura que dix minutes, je supposai que je n'étais pas seule à me marier ce jour-là. Nicolas et moi sortîmes de l'église et la femme hocha la tête pour me dire qu'il était temps pour moi d'y aller. Nicolas prit mon énorme malle, puisqu'elle était très lourde puis la chargea dans la calèche. Il me tendit la main pour que je puisse monter dedans, puis vint s'asseoir à côté de moi. Il ordonna à son cheval d'avancer et de longues minutes passèrent. Nous quittâmes la grande ville pour rejoindre des chemins plus sinueux.

J'admirai les paysages de la plaine et des bois. Je ne voulais pas sortir un roman, de peur que Nicolas ait une mauvaise vision de moi. Je profitai d'observer ce nouveau pays, ses routes et ses décors. Nous empruntâmes des routes rocailleuses au milieu d'une forêt. Lorsque, tout à coup, un grand mouvement se fit ressentir et la calèche sauta. Elle avait dû rouler sur une grosse roche. Sans m'en rendre compte, j'étais à présent collé à Nicolas, alors que depuis le début du trajet, je m'efforçai de garder une certaine distance entre nous. Je me poussai rapidement, évitant le plus possible de le regarder droit dans les yeux. Sentant son regard se poser sur moi, je baissai la tête tout en replaçant une mèche de cheveux tombée sur mon visage. Les vastes terrains agricoles possédaient de petites chaumières. Le reste du trajet passa rapidement, nous traversâmes un village où les maisons étaient un peu plus proches que précédemment. Au fond des champs nous aperçûmes des agriculteurs et même des animaux. Nous continuâmes de circuler dans le village et au bout du long chemin se trouvait une forêt. Nous dépassâmes le village pour rejoindre la forêt par ce chemin de pierres. Puis, peu de temps après, le cheval tourna sur un petit chemin de terre dissimulé sous les grands arbres. Nicolas brisa le silence.

« Nous sommes arrivés. »

Le village n'était pas très loin, mais les arbres retenaient toute la vie provenant de l'extérieur. Aucun bruit ne parvenait de la ville, les seuls sons étaient ceux de la nature et du chant des oiseaux. Je regardai la maison d'un air surpris. Le terrain en cercle était très grand. La maisonnette - qui était plus grande que toutes les maisons que j'avais vu jusqu'à présent - avait un air chaleureux. La cabane de bois avait un toit de couleur rougeâtre et du lierre s'était installé sur un des murs. Un balcon faisait le tour du bâtiment. Au sol, une hache et du bois coupé. Nicolas descendit de la calèche en prenant ma malle et fit le tour pour m'aider à descendre. Il me dépassa et se pressa d'ouvrir la porte. Je le suivis. Il me fit signe d'entrer. Je restai bouche-bée. Comment un coureur des bois pouvait posséder autant alors qu'il n'avait que vingt ans. Même sans connaître le métier, je sus que c'était presque impossible.

Héritage du passéOnde histórias criam vida. Descubra agora