Chapitre 22

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Zhong Xing en resta la bouche ouverte et les bras ballant un long moment avant de quitter son bureau pour venir prendre Boya dans ses bras.

"- Ho, Boya... Pourquoi voudriez-vous perdre quoi que ce soit ici ?"

"- Parce que j'ai toujours tout perdu à un moment ou un autre." Souffla le jeune chasseur. "Mon père, ma mère, le contrôle de ma vie, ma vue, mes frères, mes amis, ma secte... Qu'est ce qui me reste ?" Finit-il difficilement. "J'ai une nouvelle secte, de nouveaux frères, des amis même peut-être. Mais ça ne durera pas. Ça ne dure jamais. Il arrivera bien un moment où il y aura une catastrophe qui m'arrachera tout. Si je m'habitue à être heureux... Je ne sais pas si j'arriverai à y survivre cette fois. Je ne sais pas si j'arriverai à continuer encore."

Il était passé très près de s'ouvrir la gorge lorsque JingYun l'avait vendu. Boya ne savait pas s'il arriverait à rebondir une fois encore. Il était... Fatigué.

Zhong Xing le serrait étroitement contre lui. Boya était peut-être un adulte, mais pour lui il n'était guère plus qu'un enfant timide et maladroit, un jeune chasseur blessé qu'il fallait aider et remettre sur ses pieds.

Que Boya ait ainsi peur de perdre ce qui lui avait été donné était à la fois charmant et très triste. Zhong Xing ne voulait pas voir Boya craindre encore de perdre tout ce qu'il avait. Il voulait au contraire qu'il s'émancipe et qu'il retrouve confiance en lui. Pas qu'il se recroqueville sur lui-même.

"- Boya..."

"- J'ai peur de stagner. J'ai peur de ne plus arriver à progresser assez pour tenir la catastrophe à distance."

Zhong Xing comprit soudain ce que voulait dire Boya. Il avait besoin de dépasser ses limites en permanence pour avoir l'impression de contrôler sa vie. Parce que le jour où il ne pourrait plus les dépasser, ça voudrait dire que quelqu'un était plus fort que lui et pourrait le défaire sans qu'il n'ait d'espoir d'y survivre. Dans un temple comme celui du Yin Yang où cheminaient en permanence des dizaines de démons et d'esprits, où leur voisin immédiat était un Seigneur Démon millénaire et avec son passé, Boya n'avait que sa capacité à se dépasser en permanence pour se rappeler qu'il n'était ni une proie, ni une victime.

Le chef de secte s'en voulu de ne pas avoir compris plus tôt ce que le Maître d'Armes lui avait pourtant expliqué. Boya n'était pas de ceux qui fleurissent dans le calme et la tranquillité. Boya était de ceux qui s'épanouissent dans l'adversité et les problèmes. C'était ce qui faisait de lui le meilleur des Chasseurs. C'était ce qui faisait de lui quelqu'un de dangereux.
Et son infirmité lui avait pris les deux.

S'il ne pouvait les remplacer par quelque chose maintenant qu'il était quasi totalement autonome dans la secte et que s'y déplacer n'était plus un objectif qui paraissait inatteignable, alors il allait stagner et s'enfoncer dans le marasme.

"- Je vois... Alors il va falloir trouver quelque chose pour te dépasser. Où en sont tes recherches sur le troisième œil ?"

"- Je n'avance que doucement. Le langage utilisé dans les documents est archaïque au mieux, illisible plus généralement. Et je ne peux travailler que sur des documents qui ont été copiés pour moi." Sinon, il ne pouvait même pas les lire.

"- C'est trop long. Je veux voir des résultats sous six semaines. Et tes résultats à l'épée étaient bons mais décevant. Je veux que tu ais retrouvé ton niveau d'avant sous trois mois. Idem pour ton archerie."

Boya frissonna d'angoisse. Mais c'était une bonne angoisse. C'était une angoisse qui le poussait en avant. C'étaient des objectif qui lui paraissaient impossible. Et c'était pour ça qu'il allait tout faire pour prouver qu'il était capable de les atteindre.

Le Maitre-ChanteurDonde viven las historias. Descúbrelo ahora