Chapitre 108 : Le passé revient au galop...

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Cela faisait des heures que Rémus se tenait avec patience au chevet d'Anthéa. Comme à son habitude il avait pris un livre pour éloigner l'impatience et l'angoisse. Ses yeux avaient beau informer son esprit de la forme des lettres et du vague dessin qu'elles formaient, les unes accolées aux autres, sa raison n'arrivait pas à les intellectualiser pour les former en un mot qui aurait eu du sens pour le sorcier.

C'était comme s'il tenait un manuscrit ancien dans une langue morte qu'il n'aurait pas connue.

Face à ce livre, qu'il connaissait pourtant par cœur, son être était rempli d'une émotion qui lui donnait l'impression d'être dans un autre monde où tout ce qu'il connaissait devenait autre et recelait un autre sens. Il n'était plus en phase avec l'univers et le monde ne désirait pas lui enseigner la nouvelle signification dont il s'était revêtu.

Rémus posa les yeux sur Anthéa et les fit courir sur le corps de la jeune femme, étendue et plongée dans une inconscience inquiétante. Sa chair avait beau n'illustrer aucune des sévices d'Amathia, elle n'en avait pas moins souffert comme une suppliciée. 

Le sorcier analysait ce corps qu'il avait appris à découvrir, ce corps qui s'était offert à lui, ce corps dont il croyait connaître chaque recoin. Il sonda ensuite, à travers la chair et les os, l'aura de la jeune femme. Cette dernière aussi il pensait en avoir découvert toutes les couches qui la constituaient. Mais à la froide lueur de ce monde qui n'avait plus de sens pour lui, Anthéa n'en avait plus non plus.

Elle était devenue une sorte d'étrangère. Il connaissait la femme de chaire, mais son ombre, elle, la jeune femme ne la lui avait jamais dévoilée. Le sorcier avait été à peine conscient qu'Anthéa en possédait une, une ombre qu'elle recelait dans son cœur qu'elle lui avait offert, mais dont elle avait gardé une partie pour elle-même. 

Il ne reprochait pas à la Serdaigle d'avoir dissimulé ce sombre secret, lui-même aurait longtemps attendu avant de la mettre au courant de sa lycanthropie si elle ne l'avait pas découvert... certaines choses qui devait être accomplies étaient si difficiles à exécuter qu'on les remettait bien souvent à plus tard.

Mais Anthéa ne cessait pas pour autant de lui apparaître comme une femme provenant d'un autre monde qu'il découvrait pour la première fois. Il n'oubliait pas les moments passés avec elle, il ressentait toujours le même amour inconditionnel pour elle, mais sa réalité avait été renversée.

Qu'avait donc fait Anthéa dans son passé pour connaître un tel sort ?

De toute évidence, elle n'assumait pas cette partie de sa vie et n'avait pas envie de lui redonner naissance en contant des souvenirs ou en émettant des regrets. Elle préférait vivre et que sa part sombre demeure cachée au plus profond d'elle.

Rémus comprenait cela. S'il avait pu garder le loup jusqu'au plus profond de lui, il l'aurait fait sans aucun doute. Il l'aurait même assassiné s'il avait pu entrer en lui-même et provoquer son monstre en duel. 

Il aurait seulement désiré que la sorcière lui révèle ce passé, malgré la difficulté, malgré sa douleur. Il se sentait inutile, trompé et rejeté. 

Alors que les yeux de la jeune femme tremblèrent et que ses bras et ses jambes commencèrent à s'animer, le sorcier ferma le livre du monde incompréhensible et se pencha vers l'Anthéa qu'il ne connaissait pas aussi bien qu'il le croyait. 

"Comment te sens-tu?"

Une vive inquiétude s'empara du cœur de la jeune femme et, sous la forme d'un petit diable malveillant, le fit battre avec violence dans le rythme de ses tambours angoissants. Le visage qu'elle aurait voulu croiser aurait été celui de Régulus, il ne l'aurait pas jugé lui. Comme un frère, il l'aurait rassurée sans pour autant lui faire miroiter de vaines et irréelles consolations. 

Hold On (retour dans le passé à l'époque des Maraudeurs)Opowieści tętniące życiem. Odkryj je teraz