Mehdi, Vol. Final - (FIN DE L'HISTOIRE) -

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– Ça fera 67,35€ monsieur.

– Vous prenez la carte vitale non ?

– Ces médicaments ne sont pas remboursées par la carte vitale depuis 2019 monsieur, je viens de vous le dire à l'instant.

– Même le médicament que vous venez de commander n'est pas remboursé par la carte vitale ?


– Oui monsieur, l'ensemble de vos médicaments comme dit plus tôt. Le brûleur gastrique arrivera par ailleurs demain. Dès 9h30, vous pourrez venir le récupérer en pharmacie.

La mamie qui se plaint de mon temps d'attente vient d'être servie par l'autre pharmacien dont le précédent client demandait des produits qui se trouvent qu'en grande surface. Pour deux Paracétamol et un sirop pour la toux sous 36 degrés la mamie a cassé les couilles à tout le monde. Avant de partir, je tente de voir son visage mais cette dernière est déjà en train de parler avec l'autre pharmacien.

– Alors, t'as eu ce que tu voulais pour ton père ? Me demande Alexis et Brahim qui attendent tous deux devant la pharmacie avec leurs joints.

– Ouais, j'ai juste un médicament à prendre pour demain.

– Et pour la visite de ton frère demain ? Il aura besoin de quelque chose ou pas ?

– Non, de toute façon j'crois que j'ai pas l'droit de lui apporter des médicaments, sauf si le juge l'autorise.

Midi moins le quart et le soleil tape déjà, presque 30 degrés à l'ombre. Alexis et Brahim sont torse nus, en short et en claquette accompagnés de leurs joints de beuh et d'une bouteille d'eau fraîche de 0,5cl pour chacun. On devait partir cet été, comme celui de l'été passé et comme l'été qui précédait le dernier été, mais ça se fera pas. On bougera donc pas, tout comme l'été passé et tout comme l'été qui précédait ce dernier été.


« Pas d'mapess mon reuf », « Au pire on bougera un week-end, c'est déjà bien wAllah » me disent-ils.


Assis sur un banc en pierre rocheuses blanches, les morsures du soleil accompagnent chacun de nos gestes. Il fait trop chaud pour rester assis, mais trop chaud pour bouger, alors restons assis. Après un court silence dans lequel les effets de la beuh ont fait mijoter nos imaginations, c'est Alexis qui fini par tourner sa langue et clasher Brahim sur son ramadan bancale de fou dont j'avais oublié les attitudes de ce criminel. Un jus d'orange le matin, suivi d'un grec vers 15h quand son estomac lui faisait la cour avant de manger de nouveau pour 21h. Alors qu'on attend sa réponse, il laisse planer un silence avant de demander du feu à Alexis afin de pouvoir rallumer son joint qui s'est éteint entre la pluie de clash et blagues qu'il lui a fait subir.


J'explose à mon tour de rire, fait tomber les médocs de mon père qui, par cette maladresse, me rappelle la déviation à mes responsabilités dont je fais preuve.


– J'y vais, on s'attrape ce soir. Dis-je.


L'état de mon père s'est détérioré ces dernières semaines, il subit des montagnes russes d'état de santé qui me font peur. Un jour il pète la forme, il est prêt à courir un marathon et l'autre il me fait part de son testament et souhaite que je choisisse la couleur de son cercueil. Il essaie de tenir le coup. Par ailleurs, son visage s'est affiné, ses joues se sont creusées davantage, il a perdu des cheveux et il a perdu beaucoup de poids. En tout cas, assez pour que Brahim et Alexis viennent à me demander chaque jour de ses nouvelles.

ghettoyouth - graine dans la villeWhere stories live. Discover now