Chapitre 11

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« Une nuit difficile »

Je me souviens de ce moment comme si c'était hier. En parcourant le couloir de ma maison, je cours me réfugier dans ma chambre et tente de bloquer la porte. J'ai beau y mettre toute ma force, je sais que cela ne sert à rien. Celle de mon père est bien plus supérieure à la mienne. Je l'entends arriver, alors je ferme les yeux et commence déjà à pleurer.

Il réussit à l'ouvrir, avec un bon coup de pied. Je saute dans mon lit, en ayant la trouille qu'il me donne le même. Les larmes dévalent mes joues. Je suis tétanisée et le supplie de ne rien me faire. En vain.

— Putain si j'avais su, j'aurai fait avorter ta mère !

Il tire la couette et continue d'hurler des choses horribles. J'ai seulement dix sept-ans, je ne mérite pas cela. Pourquoi n'ai-je pas une vie normale, comme Stella. Sa famille l'aime. La mienne ne m'aime pas. Mes parents sont horribles avec moi et mon frère, m'a abandonnée.

— Tu es la pire chose qu'il me soit arrivé avec ton frère ! Va sous la douche.

Le moment que je redoutais le plus arrive. Ma punition pour avoir eu un E au lycée. Je m'insère dans la baignoire à contre coeur, lorsque mon père règle le pommeau afin que l'eau soit la plus froide possible. Et les coups commencent. Je supplie ma mère de venir m'aider, mais rien... je suis seule.

— Livia ? Tout va bien... tu es à San Francisco.

Lorsque j'ouvre les paupières, mon visage est entre ses mains. Kai affiche une mine apeurée, mais il est rassuré quand il voit mes iris. Il essuie mes larmes et porte ses lèvres sur mon front, pour y déposer un baiser. Tandis que je remarque un verre de whisky sur la table basse, je me sens pitoyable. Je réalise vite que cela veut dire que Kai m'a vue faire un cauchemar. Si cela se trouve, j'ai crié dans la réalité.

Ma respiration n'arrive pas à se calmer. Je me vois encore dans la maison à Phoenix lorsque je ferme les yeux, à endurer cette punition. La préférée de mon père. Je me demande si mon frère l'a vécu. En tout cas jamais je ne l'ai entendu, mais je me rappelle que mes parents sont futés pour faire leurs coups en douce.

— Calme-toi d'accord ? Ici, personne ne va te faire de mal.

Kai essaie de me rassurer comme il peut. Il me touche, parle avec un ton calme et apaisant. Il est là pour moi. Je ne suis plus seule.

Mon corps se calme petit à petit, mais je n'arrive pas à chasser ces pensées qui me hantent. Mon ami qui était accroupi sur le sol, s'assied sur le canapé et pose ma tête sur ses cuisses. Je ne réalise pas vraiment l'intention de son geste, mais je sais qu'il me fait du bien. Sa présence m'est si réconfortante.

Avec ses doigts, il masse mon crâne et je parviens à penser à autre chose grâce à lui. Mes larmes cessent aussi.

— Tu ne dors jamais, parce que tu as peur de faire des cauchemars, toi aussi ?

Ma question n'a pas pour but de le mettre mal à l'aise, mais de me rassurer. J'ai besoin de savoir que je ne suis pas la seule, à avoir peur de dormir. C'est le seul moment où je revis les pires phases de ma vie. J'appréhende de plus en plus d'aller me coucher.

Kai hoche la tête positivement, tout en me fixant du regard. Ses yeux sont brillants, alors je regrette aussitôt ma question. Cet homme me fait tellement peine. Il est habité par des démons, et le garde pour lui. Il est fort. Kai ne mérite sûrement pas tout ce qui lui est arrivé.

— Je fais toujours tout, pour repousser le moment d'aller au lit.

Sa voix est douce. Il n'a pas mal pris ma question, non, il m'a comprise. Et je suis aussi fière de lui, car il a fait un pas vers moi. Il se confie et cela me fait chaud au coeur. Kai est véritablement une bonne personne, j'en suis convaincue depuis le premier jour.

Lies Under TensionWhere stories live. Discover now