RPG, en route pour Grenzadiel ! (MM, queer)

Chapitre 7.1

Ashog

— Et.... Action !

Tatialine lance le strékidus dans les airs en même temps qu'elle donne le départ de notre représentation. Un bref cliquetis métallique annonce que la machine commence à capt'imager.

Au milieu du pont, toujours au sol, Waane se redresse assis, les mains fermées sur sa cuisse pour comprimer la blessure. Accroupi sur ses sabots près de lui, Erval le soutient.

Une dizaine de mètres plus loin, j'attends mon « entrée en scène », nerveux. J'affiche une assurance que je ne ressens pas complètement. Oui, je connais mes capacités, mais l'angoisse de rater un geste, de ne pas être à la hauteur me mange le ventre et fait trembler mes doigts.

— Ah ! s'écrie Célener d'une voix forte, une grimace angoissée très crédible plaquée sur le visage. A l'aide !

— On a besoin d'un Druide ! ajoute Tatialine en surjouant un peu l'affolement.

Oh, c'est à moi d'entrer en scène !

Je déglutis, frotte mes paumes sur mon pantalon pour en essuyer la moiteur. Je n'ai pas esquissé un pas en avant qu'une nuée de pensées parasites m'assaillent.

Tu n'es pas prêt. Tu n'y arriveras pas. Tu n'es pas assez fort. Tu n'es juste pas "assez".

Je me fige malgré moi. Un instant, je songe à tourner les talons et rentrer au Domaine Druidique. À tout oublier de mon rêve de Héros.

Retourner à une déception que je connais pour éviter l'échec inédit. Pour éviter de ne pas être à la hauteur.

Tu es prêt. Tu y arriveras. Tu es assez.

Les mots sonnent comme ceux que l'Immortelle verse régulièrement en moi, pourtant, ils ne viennent pas d'elle. Ils doivent venir de moi, mais je ne sais pas d'où exactement. D'une bulle de confiance perdue au cœur de mes doutes et insécurités?

— S'il vous plaît! insiste Tatialine avec une pointe d'urgence dans la voix, en plantant ses yeux sur moi. Nous avons besoin d'un Druide!

Besoin.

Le regard pénétrant de la Terremondienne et ce mot sur lequel elle appuie achèvent de reléguer mes doutes en arrière plan. J'ai peur de ne pas être à la hauteur, oui... mais il faut que quelqu'un soigne rapidement Waane. Et ce quelqu'un ne peut être que moi.

Je prends une profonde inspiration et m'élance pour rejoindre les Héros. Je fais de mon mieux pour ne pas penser au bibelot mécanique qui nous capt'image. Jouer un rôle n'est pas compliqué pour quelqu'un qui, comme moi, a passé sa vie à faire semblant d'être un autre, c'est pourquoi je trouve étrange d'être intimidé à l'idée de jouer la « comédie ».

— Je suis Druide ! J'arrive !

Je m'agenouille près de Waane, un air inquiet et concerné sur le visage.

— Qu'est-ce qui ne va pas ? débité-je avec l'impression d'être un très mauvais comédien. Qu'est-ce qui s'est passé ?

— On a été attaqués, explique Célener, un accent angoissé particulièrement réaliste dans la voix. Waane a été poignardé !

— J'ai maaaaaaaal ! geint Waane.

— L'hémorragie est importante, on n'arrive pas à la stopper, précise Tatialine en s'agenouillant près de moi.

— Je m'en occupe !

La blessure est nette bien que profonde. Waane comprime sa cuisse pour limiter l'exsanguination. Bon, cela ne marche pas très bien : il pisse le sang comme un Taraog pisse la morve, comme disait ma mère.