Épisode 3 - 19 Concert Hall

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Le van des Die with Style entre sur le campus, gigantesque, de Stanford. Il doit être 16 heures et ils ont répété sans cesse depuis la veille. Rimbaud, qui conduit la Ford qui les précède, klaxonne quand ils passent devant une affiche pour ce soir. La salle ne sera pas totalement à eux : il y aura un groupe avant et deux après, mais la pression est tout de même présente. Ce que Rick avait oublié de préciser quand Taylor l'avait appelé, c'est que ce soir est une soirée tremplin pour des groupes de Rock californiens. La salle, l'une des plus prestigieuses du sud de San Francisco, accueille pas moins de 800 personnes.

Pas étonnant que Taylor tape du pied contre la portière en se retenant de se ronger les ongles. Non seulement elle doit reconquérir Sienna, mais en plus elle doit donner le meilleur d'elle-même pour son plus gros concert à date. Rick n'en mène pas beaucoup plus large, au volant du van. Lui qui est plutôt bavard habituellement a gardé le silence pendant tout le trajet, repassant en boucle les chansons qu'ils doivent jouer ce soir.

Est-ce qu'ils voudront encore de Taylor après ce qu'elle a prévu ? Pas si sûr.

Le van passe devant le stadium du campus, puis sur Campus Drive. Les allées taillées et les bâtiments impeccables de l'une des plus prestigieuses universités des États-Unis sont visibles un court instant. Ce n'est pas le même standing que la NYU, mais de toute façon elle n'y aurait jamais été acceptée.

Il ne leur faut que deux minutes pour rejoindre le Bing Concert Hall, encore vide à cette heure. Le bâtiment ne paye pas de mine depuis l'extérieur, mais il parait que l'acoustique est extraordinaire. Rien à voir avec le Witch Hour. Les deux véhicules prennent l'entrée des artistes, où un bus et deux autres vans sont déjà garés.

Taylor sort. Il fait assez beau, même si sa parka n'est toujours pas en trop. Elle se frotte les mains, alors que Rimbaud et Carmen les rejoignent.

— On s'active, ordonne Rick.

Vu l'heure, il n'a pas tort. Les membres du groupe descendent amplis et instruments, aidés par deux techniciens. Comme ils sont les seconds à passer, leur matériel se fait déjà installer derrière le second rideau de la scène, pour gagner du temps et limiter les entractes.

Quand les techniciens n'ont plus besoin de Taylor, celle-ci se dirige vers les coulisses pour se changer, accompagnée de Carmen.

— Tu nous sauves encore la mise, lui dit la bassiste.

— Tu parles, c'est moi qui profite de l'occasion. Normalement, on ne fait pas son deuxième concert dans une salle comme ça.

Carmen lui met la main sur l'épaule, alors qu'elles entrent dans le vestiaire. Une femme est déjà là, en train de se maquiller. Elle a des dreadlocks et des vêtements qui font punk anglais des années 60. Et elle a la peau noire.

Taylor pose son lourd sac sur un banc, avant d'enlever sa parka et son gros pull. Carmen semble quant à elle plus intéressée par l'autre femme, qu'elle dévisage presque. Elle murmure à voix basse à l'attention de la barmaid :

— Je croyais que c'était soirée rock uniquement.

— Et ?

— T'as déjà vu une noire dans un groupe de...

— Quoi ? lui demande l'autre, l'interrompant.

— Non, rien, répond Carmen en détournant le regard.

— Dis-moi.

La bassiste échange un coup d'œil avec Taylor, qui prend la main :

— Tu joues avant nous, c'est ça ?

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