Première chasse

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Je somnolais dans la tanière, tranquille. Mes muscles s'étaient reposés et mon cou devait être en phase de guérison. Ca faisait bien quelques heures que j'étais là, calme dans la forêt parfumée.

Aucun danger ne trahissait le calme du bois, aucun loup ne venait me tuer...La belle vie. Mais la faim me torturait, me forçait à bouger. Je me relevais sans me presser et me demandais où j'allais chasser. 

Car dans la Meute, c'était l'Alpha qui décidait le terrain et la proie. Et encore, là j'étais seule, sans la coopération des autres  loups...  Et puis je n'avais jamais été douée pour la chasse. Je ne pourrai à l'évidence pas chasser de grosses proies, je devrais me contenter de lapins... 

Mais une chose était sûre : si je continuais à réfléchir, je ne mangerai pas. Je me mis donc en route, en regardant le soleil disparaître. Il allait bientôt faire nuit. J'allais vivre pour la première fois une nuit sans compagnons. 

Je soupirai, puis tendit le museau en sentant l'odeur d'une proie. Discrète, je tentai de la visualiser. Il s'agissait probablement d'un cerf ou d'une biche. L'animal était derrière un ensemble de buisson et je pouvais voir ses pattes à travers les feuilles. Je ne savais pas si j'aurais la taille et la force nécessaire pour attraper une biche. 

Affamée, je contournais silencieusement l'arbuste. Mes pattes frôlaient la terre sans faire de bruit, et le vent ne trahissait pas ma présence. Tous les éléments étaient de mon côté. Je repérais une biche et, miracle, un jeune faon à ses côtés ! Il restait collé à sa mère, mais je pouvais encore espérer qu'il fasse une action imprudente... L'odeur de la viande me donnait l'envie stupide de sauter sur les cervidés sans réfléchir. Mais je m'abstins. 

Le petit cerf fit quelques pas dans la direction des aulnes qui abritaient leur repaire et je me tenais prête à agir, tous sens en alerte. Le Bambi était encore près  de sa mère, et si je tentais une attaque j'aurais peu de chances  de réussite...

Mais à mon grand bonheur, le petit passa devant ma cachette, m'offrant une occasion unique de lui bondir dessus. Ce que je fis. Il était tellement léger que je le saisis dans ma gueule et le kidnappait, ignorant sur le moment les prochaines tristesses que je créais à sa mère. Elle me poursuivit d'ailleurs un court moment, mais comprit vite que c'était trop tard.

J'étais triste pour elle. C'était la première fois que je ressentais une telle compassion, c'était assez étrange. Mais le soulagement de la réussite prit le dessus. J'avais un repas, que j'avais chassé toute seule ! Et pas un lapin, non, un faon !

Je me jetais des fleurs, fière de moi, jusqu'à ce que je me sente en danger : j'étais sur le territoire d'un autre loup. Il ne s'était pas encore manifesté, mais je décidais de fuir. J'avais perdu mes repères, et je ne retrouvais mon petit territoire qu'à la nuit tombée, essouflée.

Je posais mon dîner, et le dévorais avec entrain. Le faon était mort rapidement, ce qui ne bloqua pas une nouvelle vague de compassion et de tristesse. Quelque peu dégoûtée  de mon acte, je finis le cervidé lentement. Mais je me dis que c'était lui ou moi. L'instinct de survie, la sélection naturelle... je n'avais rien fait de mal finalement.

Alpha et Omega [PaUsE]Where stories live. Discover now