Impuissance

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Quelques flammes étaient visibles au loin. Je les regardais, tétanisée et immobile. Le destin voulait ma mort, c'était sûr. 

Sous l'adrénaline je m'agitais, mais mon corps était encore trop douloureux et sensible pour se soulever complètement. Les animaux fuyaient devant moi, comme pour me narguer. Je restais impuissante dans la clairière, évitant les regards étonnés des quelques canidés. Je me rappelais alors que j'étais une humaine allongée au milieu d'une forêt, et que ça devait faire plutôt bizarre. 

Les flammes se rapprochaient dangeuresement. Quand je les sentis je m'évanouis. 

Je me réveillais dans un endroit plus qu'inconnu. Puis je me souvins de l'incendie. Je devais donc être à la merci des humains. J'étais allongée, de ma longue taille d'humaine,  sur un objet couvert d'une enveloppe très douce et agréable. Il n'y avait personne mais mes sens de louve m'indiquaient que j'étais en territoire ennemi. Je calmais ma respiration, de toute façon je ne pouvais pas fuir. Au moins j'étais vivante. J'étais vivante ! C'était bien, ça. 

Je regardai mon environnement. J'étais dans un endroit fermé d'une blancheur éclatante. Je n'arrivais pas à nommer les objets, et leur fonction m'étaient inconnues. J'étais dans un autre monde.

Un humain arriva. Vêtu d'une blouse blanche, il me regarda.

-Tu t'es réveillée, remarque-t-il. Bien. Tu te souviens de quelque chose ?

Je ne comprenais rien à ce qu'il me disait et commencai à paniquer. C'était un ennemi. Je ne pouvais pas me défendre. Et il me parlait. Je n'arrivais même pas à formuler des sons avec mon nouveau "museau". Bien. Edme, calme-toi. Je regardai l'être bizarre qui était devant moi. Il attendait ma réponse.

-Est-ce que tu as mal, au moins ? Nous t'avons trouvée en pleine forêt, que faisais-tu là-bas ? demanda-t-il. Attends, tu es peut-être muette, j'ai une idée.

Il se rapprocha de moi, et mon cœur commença à s'affoler. L'humain saisit un stylo et une feuille. Je ne savais pas d'où me venait ce vocabulaire. Il me tendit les objets, et je ne savais quoi faire avec. 

-Bon, je vais te laisser, annonça-t-il d'une voix  fatiguée. Tu m'as l'air affolée. Repose-toi, tu es en sécurité ici. D'accord ? Et n'essaie pas de t'enfuir, me dit-il avec un sourire tendre. Nous reviendrons dans une heure ou deux.

Il partit, à mon grand soulagement. C'est à ce moment-là que je pris conscience de mes sensations. Je me sentais plutôt bien, en fait. Je m'agitais. Je devais partir d'ici maintenant que j'étais soignée. Mais à mon premier mouvement j'eus mal partout. Ok, en fait j'étais bloquée. Mais quelle vie... Le temps où j'étais Oméga me paraissait lointain.

Une fois de plus, je m'endormis. 

-Elle dort, fit une voix claire. 

Je somnolais, et je gardais les yeux fermés en comprenant que deux humains étaient vers moi. 

-J'ai fait un test ADN, murmura l'autre personne. Il est très spécial.

Je faillis sursauter en remarquant quelque chose : je comprenais leurs phrases ! Je jubilais intérieurement. Je ne savais pas d'où me venait cette connaissance, mais je m'en fichais. Je pouvais comprendre les humains !

Le plus vieux continua de parler.

-Écoute, Baptiste, ses parents n'étaient pas humains. L'ADN contient des bribes d'une autre espèce. La fille n'est pas humaine.... Je ne comprends rien, on ne nous avait pas parlé de ça lors de nos études. 

Je sentis l'étonnement de l'autre homme.

Que disaient-ils ? Ils avaient parlé de mes parents. Les connaissaient-t-il ? Et ils avaient dit que je n'étais pas humaine... 

-Ok, ok, soupira le plus jeune. Bon, ne dis rien à personne, je ne veux pas mettre cette jeune femme en danger. Laisse, je m'en occupe.

-D'accord, Baptiste, je te laisse faire, dit le vieux, un peu dépassé.

Je décidais d'ouvrir les yeux, maintenant que la discussion était terminée. L'homme âgé était parti, et il restait l'autre, plus jeune que je l'avais cru. Avec mes yeux d'humaine, je le trouvais très beau. Il avait des yeux bleus et des cheveux brun foncé.

-Tu te sens en état de te lever ? me demanda-t-il. On doit y aller. Le vieux n'est pas de confiance, on doit partir. Il n'aurait pas dû tester ton ADN aussi tôt, se dit-il comme pour lui-même. 

Je ne comprenais plus rien. Que me voulait-il ? J'étais tranquille, installée confortablement, et là on me demandait de me lever ? De toute façon, même si je le voulais, j'en étais incapable. 

-Viens, me pressa-t-il en se rapprochant de moi.

 Je fis un effort et essayai de bouger, et,-miracle- j'y arrivais. Étonnée et heureuse, je me redressais et entrepris de me mettre debout. Le pire était à venir, car je devrais marcher sur deux "pattes". Baptiste m'aida, mais nous allions à une lenteur effrayante. Des humains nous regardaient bizarrement, mais passaient leur chemin.

Au bout d'une trentaine de minutes, nous arrivions à une porte. Encore un mot jusqu'alors inconnu de mon cerveau.

-Nous allons pouvoir quitter cet endroit, me murmura l'homme. Suis-moi. Je t'expliquerai plus tard.

J'avais hâte de tout comprendre, en effet. Je titubai, mais arrivais quand même à suivre Baptiste. Je savais déjà marcher ! Chouette ! En une heure, j'avais donc appris à marcher, a comprendre le language humain et à assimiler quelques mots. Évidemment toute cette histoire me paraissait absurde, mais j'étais dans une sorte de transe qui m'empêchait de comprendre et d'analyser ce qu'il se passait. Je me laissais donc gérer par l'humain, qui me semblait sûr de lui et gentil.

Quand je stoppais mes réflexions, je me rendis compte qu'on était devant une forêt. Pas celle que je connaissais, une autre. 

Baptiste s'adressa à moi :

-Edme, nous allons aller au Clan. 

Et il se transforma en loup.







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