OctoSquid 2.0 [EvilSquid & Octoboy]

1.4 : Le bout du Monde.

EvilSquid mit beaucoup de temps à atteindre sa destination. Durant ce voyage, il eut tout le loisir de relire, encore, et encore, et encore, le carnet d'Octave. A la première lecture, il n'avait pas véritablement prêté attention à la partie se trouvant à la fin du carnet. Or, cette partie était capitale, car elle contenait un commentaire ajouté par l'Amiral : en effet, dans ce paragraphe, il y décrivait partiellement le fonctionnement de l'artefact. 

Lorsque je suis allé récupérer ce journal, j'ai pu déchiffrer quelques écrits sur les murs de la salle de l'Orbe. Je n'ai pas été en mesure de tout traduire : le mauvais état des lieux, la faible lumière et mes connaissances rouillées en Séphaloméen n'ont pas suffit. Tout ce que je sais, c'est qu'une fois l'Octarine activée, il suffit au porteur de penser à la destination, et il y sera amené, mais il doit sélectionner la date gravée sur l'Orbe. Seule une personne maîtrisant parfaitement la langue Séphaloméenne pourra déterminer avec exactitude le fonctionnement de l'Octarine. 

Au moment où il lisait ces mots, il était déjà trop tard, il ne pourrait pas demander à Macalamar de l'aider à déterminer une date avec précision. Il allait devoir y aller à tâtons. Et il détestait cela. Le point positif étant que peu importe la date qu'il choisirait, s'il parvient à activer l'Orbe, il retombera forcément sur la Carrière Caviar, et il n'aura plus qu'à analyser l'environnement pour affiner sa remontée dans le temps. 

La dernière partie du voyage était la plus compliquée : il devait y aller seul, et donc naviguer sur un petit bateau, de type chalutier. Avec tout l'argent qu'il possédait, il aurait pu aisément s'offrir le luxe d'un bateau plus récent, mais il se trouvait dans une région beaucoup trop reculée pour être à jour des dernières nouveautés. Il sut qu'il arrivait près de son point d'arrivée lorsqu'il aperçut des vestiges Salmonoïdes. D'après Macalamar, la zone en était infestée lors de sa venue. Evil réfléchit alors à tout ce que cette zone avait connue : cela avait dû être une cité prestigieuse, demeure de la plus grande Divinité sur la planète, puis le temps, un cataclysme naturel ou même une force surnaturelle avait causé la formation du désert et enseveli le souvenir de cet être divin. La Montée des Eaux a ensuite eu lieu, recouvrant une très grande partie de la planète d'eau, ce qui provoqua guerres, extinctions d'espèces et mutations génétiques. Les Salmonoïdes ont trouvé refuge dans cet endroit, puis ont été contraints de partir, pour des zones plus actives. Désormais, cet endroit était tombé dans l'oubli. 

La nuit commençait à s'installer lorsque l'Inkling arriva à la Dune de l'autel. Le ciel était dégagé, toutes les conditions étaient réunies pour qu'il puisse atteindre l'Orbe sans encombre. Il gravit la petite dune, s'arrêta en arrivant en haut, puis se retourna. "Woah, et dire que cette étendue infinie d'eau recouvre un désert entier, qui recouvre lui aussi ce qui fut une cité autrefois !" Le temps de quelques secondes, il avait complètement oublié Octoboy, car tout ce qu'il était en train de vivre était bien trop grand pour un seul homme. Puis il se rappela pourquoi il faisait tout cela, son cœur se resserra douloureusement, mais il était plus déterminé que jamais.

Il se plaça devant l'autel, et comprit tout de suite le mécanisme : il devait installer les différentes pierres sur le plan de l'autel, et insérer un objet transparent, qui renvoyait la lumière de la lune de sorte à créer des ombres artificielles sur le plan de l'autel. Il s'exécuta, jusqu'à ce qu'il voie apparaître une ombre tentaculaire. La forme était bien trop nette et précise, comme une... évidence. "Ce vieux brigand avait raison !" Pensa-t-il en se remémorant les mots de Macalamar. L'Évidence... Alors voilà, EvilSquid venait de résoudre l'énigme, mais absolument rien ne s'était produit. Il ne comprenait pas. Pour ajouter à son désarroi, des nuages obscurcirent le ciel, et la lumière fut masquée. Il ne pouvait ainsi plus réfléchir convenablement à la résolution du problème.  

Il commençait à s'impatienter. Mais il ne pouvait rien faire de plus qu'attendre que le ciel se dégage. Il prit son mal en patience, et analysa le peu d'éléments qui constituaient la Dune de l'autel. Trois palmiers d'une taille incroyable étaient plantés là. Deux statues, également, se tenaient de part et d'autre de l'autel. Elles n'étaient pas exactement identiques, mais il était difficile de discerner avec exactitude ce qu'elles représentaient, car le temps avait eu raison des détails, mais elles étaient à la fois petites mais imposantes. Une aura mystique se dégageait de ces lieux, il pouvait la sentir au plus profond de lui. 

Un léger coup de vent caressa sa peau, il en eut la chair de poule. Puis, la lumière revint, brusquement, comme si l'on venait d'appuyer sur un interrupteur. L'Évidence était là, encore plus nette qu'avant. Instinctivement, Evil parcourra le plan de pierre du bout des doigts, pour trouver un bouton, une encoche, ou un mécanisme, mais il ne trouva rien. 

"Bon sang, ce n'est pas censé être l'évidence même ?!" Il perdit le peu de patience qu'il lui restait. Il détourna son regard, comme pour implorer le ciel de lui montrer la solution, puis... c'était l'évidence ! La forme tentaculaire dessinée par l'ombre avait un tentacule qui se démarquait des autres, il était fort probable qu'il indique l'entrée du passage. Evil tâtonna la table de pierre de plus belle, mais toujours rien. Il fit le tour, regarda sur les côtés, mais toujours rien. Il dirigea alors son regard dans la direction pointée par l'ombre : la statue. Son cerveau était en ébullition, son cœur battait à tout rompre, ça y est, il la tenait la solution. Il fit le tour de la statue, toujours en recherche d'un mécanisme, mais rien. Il ne se laissa pas décourager et analysa toute la mise en place sur la dune. "Rien n'est laissé au hasard, forcément" se dit-il. Et la solution le frappa : les deux statues n'étaient pas exactement alignées. Il saisit alors la construction de pierre dans la volonté de la faire pivoter. Mais elle était bien plus lourde qu'il ne l'imaginait.

Forcément, c'était de la roche, mais il s'imaginait peut-être un système de pivot, ou bien qu'elle serait creuse. Après quelques minutes à forcer, il abandonna, dégoulinant de sueur. Le désespoir commençait à le gagner. Il s'adossa de tout son poids contre la statue, et après quelques secondes, elle se mit à pivoter sous l'effet de la pression de l'Inkling. "Sérieusement, je ne poussais pas dans le bon sens ?!" Evil s'en voulu d'avoir négligé la possibilité que la statue pouvait pivoter dans les deux sens, mais le principal était qu'il avait fini par activer le mécanisme. 

Le sol se mit à trembler légèrement, mais suffisamment pour comprendre que tout un réseau de mécanismes était à l'oeuvre sous ses pieds. Cela amusait beaucoup Evil car il pouvait presque suivre le parcours qu'effectuaient ces mécanismes. Puis la seconde statue se suréleva, et se déplaça sur la droite, pour laisser apparaître un minuscule escalier. Il s'en approcha : une odeur de renfermé émanait du trou nouvellement apparu. Un nouveau frisson parcourut le corps d'Evil, mais cette fois-ci, c'était de la peur. De la bonne peur, oui, mais  il éprouvait un sentiment de prudence, car il saisissait à cet instant que le moindre faux pas pourrait être désastreux. 

Il prit une grande bouffée d'air, bomba le torse, et s'engouffra dans le petit boyau sombre.