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On vous blessera, brisera et anéantira mais ne perdez pas espoir en l'humanité. L'humanité est un ensemble de beauté et de laideur qui apporte peine, mais aussi bonheur.

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«Le docteur Ramon est même allé chercher mon parapluie Arthur, je me faisais du mauvais sang car personne n'en voudrait à cause de sa valeur sentimentale, il faut aimer.»

(La Vie Devant Soi, Romain Gary)

Et celles-ci étaient les dernières paroles d'un jeune garçon de quatorze ans qui venait de perdre sa tutrice. Il fallait avouer que Romain Gary avait ce talent d'écrire la vérité si purement que cela en devenait empoignant. J'inspirai brusquement, les yeux fermés, et finis par relire la dernière phrase du chef d'oeuvre avant de le refermer.

Confortablement installée dans mon fauteuil moelleux, je posai le roman sur mes genoux et me mis à observer tout autour de moi. Je ne pus m'empêcher de sourire en voyant que mon salon était ordonné. Il fallait remercier mon côté maniaque-sur-les-bords pour une telle satisfaction. J'avais eu la grande chance de trouver un appartement qui me convenait, assez spacieux mais cosy, en plein centre de Lille, et avec un loyer raisonnable. Les propriétaires des lieux étaient un vieux couple sans aucun souci financier, bien au contraire. Ils me louaient leur appartement pour la seule et bonne raison qu'il prenait la poussière, étant leur résidence tertiaire. La valeur de l'appartement était normalement le double de ce que je payais mais l'argent ne les intéressait pas; ils avaient seulement mis une annonce avec un prix élevé pour être sûr de n'attirer que des personnes avec un minimum de revenu et non de jeunes fêtards. J'avais dans un premier temps flashé sur cet appartement pour son énorme salon accompagné d'une chambre magnifiquement aménagée. Mon métier de rédactrice pour un magazine féminin ne m'obligeant pas à aller au travail, je passais beaucoup de temps dans mon appartement. J'avais donc pris le soin de bien le décorer tout en combinant littérature et nature.

M'apercevant soudainement qu'il était déjà presque midi, je me changeai rapidement pour aller faire mon footing du samedi, dans une brise plutôt fraîche pour un mois de septembre. Alors que je m'avançais petit à petit dans mon parcours, je fis des signes de la tête à tous les habitués que je croisais. Réglée comme je l'étais, je voyais les mêmes personnes acheter leur déjeuner au stand en bas de mon immeuble et même les mêmes personnes traverser le parc près de chez moi pour aller déjeuner dans leur bistrot habituel à leur pause du midi. Oui, j'étais réglée quand il s'agissait de mes footings. Certaines personnes disent que c'est mauvais de constamment vouloir avoir le contrôle sur sa vie avec une telle routine mais moi je pense tout simplement que la routine est sans prise de tête et permet d'être beaucoup plus productif en empêchant toute distraction. Résultat des courses, ce n'était qu'une simple question de gestion de temps et de rationalité.

Après une bonne heure à sentir un vent délicieusement doux caresser mes cheveux, je rentrai me doucher avant de me faire une délicieuse salade de poulet. Tout en mettant Moon River de Frank Ocean sur mon enceinte, je m'installai, salade en main, au comptoir de ma cuisine et commençai à travailler sur un nouvel article de la section féminine: Les Oeufs de Yoni.

Alors que je reprenais ma fiche avec toutes les informations à inclure, je reçus un appel de Charlie, mon aîné de quatre ans.

« Salut Liz, parla-t-il assez fort afin d'être entendu malgré le brouhaha des personnes autour de lui.
-Charlie! fus-je ravie d'entendre sa voix. Comment vas-tu?
-Je vais bien et toi?
-Moi aussi. Où es-tu?
-Je suis à la gare, cria-t-il alors que j'entendis le crissement d'un train en approche. »

Love on Notes [Publié avec &H]Where stories live. Discover now