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    La troisième semaine..

Nous sommes au dix-huitième jour. Et aujourd'hui, à lieu ma cinquième séance avec mon psy.
La dernière séance m'a était plutôt bénéfique, alors c'est avec le sourire que je me rends à celle-ci.
Je n'ai plus peur de sortir de chez moi, je ne crains plus de me retrouver au milieu des gens.
J'ai de l'espoir, je peux, et je vais enfin arriver à m'en remettre.
Le docteur Boussnard m'accueil avec son habituelle sourire chaleureux et sa poignée de main respectueuse.
J'entre dans son cabinet et je prends place sur le divan, tandis que le docteur s'assoit dans son fauteuil, face à moi.
    - Alors, Lexa, comment tu vas aujourd'hui?
    - A vrai dire, je pense que pour la première fois depuis dix-huit jours, je peux répondre sincèrement que je vais bien.
Le docteur Boussnard se pince les lèvres avec son indexe.
Il se redresse légèrement, tout en m'observant par dessus ses lunettes qui tombent sur son nez.
    - Bien. C'est très bien, je suis content d'entendre que tu vas bien, aujourd'hui. Je remarque que tu comptes toujours les jours, depuis qu'il t'a quitté.
A force de voir le docteur Boussnard, j'ai compris que lorsqu'il dit "je remarque.." cela signifie qu'il pose une question en réalité, et non qu'il fait une remarque. C'est sans doute un truc de psy, pour ne pas brusquer leurs patients..
Je prends une profonde inspiration.
    - Oui, c'est vrai. Je n'arrive pas à arrêter de compter les jours. En faite, je crois que j'en ai besoin.. J'ai besoin de me rappeler depuis quand Matt m'a quittée. C'est un peu tordu, non?
Je prononce de nouveau son nom à voix haute, et je constate que le docteur semble surpris de l'entendre.
Il prend quelque instant pour analyser ma question.
Je l'ai posée dans l'unique but qu'il me rassure, ce qu'il finit très vite par faire.
    - Tu as vécue un traumatisme, Lexa. Et en cinq séances, tu as réussi à améliorer ton état, ce qui en soit est déjà formidable.. Mais le processus par lequel tu es entrain de passer pour te reconstruire est très long, et ce ne sera pas toujours facile.. Tu ne dois pas forcer les choses. Tu ne dois pas claquer des doigts et décider de tout oublier d'un seul coup, parce que même si tu parviens à te convaincre que ça fonctionne, ça ne durera qu'un temps tu peux me croire.. Et la chute n'en sera que plus douloureuse.. Donc, si compter les jours t'aide en ce sens, je t'encourage à continuer.
J'hoche la tête, en écoutant ses paroles.
    - Mais je suis consciente qu'il ne reviendra pas.. Et si je continuée à compter les jours jusqu'à la fin de ma vie..?
Ça peut paraître bête comme question, mais je suis soudainement prise de panique en imaginant une telle chose..
    - C'est déjà un énorme pas d'avoir pris conscience de ça. Personne ne peut savoir pendant combien de temps encore ton besoin de compter les jours sera présent, mais nous allons tout faire pour que nos séances ensemble portent leurs fruits.
Le docteur Boussnard m'offre son léger sourire rassurant.
Puis, la conversation prend un autre tournant, et sans même que je ne m'en rende compte, la séance touche déjà à sa fin.
    - Au revoir, docteur. À jeudi.
    - A jeudi, Lexa.
Le docteur relâche ma main, je sors de la pièce.
Lorsque j'arrive au bout du couloir et que je me retourne, je vois la chevelure grisonnante du docteur qui entre de nouveau dans son cabinet, avec un autre patient.
Son boulot ne doit pas être simple tous les jours.. Tellement de gens passent par ici..
La salle d'attente est toujours pleine.. Toutes ces personnes souffrent, tout comme moi..
Je pousse un soupir, et je me dirige jusqu'à l'ascenseur.

Une fois dehors, je me mets à marcher jusqu'à l'appartement.
Ce qu'il y a de bien, c'est que le cabinet du docteur Boussnard n'est pas très loin de la maison. Environ une quinzaine de minutes de marche.
L'air légèrement frais, en ce début du mois d'octobre, me fait le plus grand bien.
Je déambule dans les rues avec légèrtée, je n'ai plus cette sensation d'avoir un énorme poids qui m'écrase la poitrine.
Même si la douleur est toujours là, toujours aussi présente, je ne l'a laisse plus avoir raison de moi.
Déterminée comme jamais, je traverse la route pour rejoindre le trottoir d'en face.
C'est à ce moment-là, que quelque chose attire mon attention.
Un bâtiment, entièrement fait de vieilles pierres qui lui donnent un aspect ancien et authentique.
Mais ce qui retiens le plus mon attention, c'est un vieux monsieur entrain de coller une affiche sur les deux grandes fenêtres qui orne la devanture du bâtiment.
On peut lire en grosse lettre majuscules: "LOCAL À VENDRE".
Et là, quelque chose s'anime en moi. C'est ça!
J'ai besoin de changement, de reprendre ma vie en main! C'est un signe du destin, c'est exactement ce dont j'ai besoin.
Sans réfléchir, je me dirige précipitamment vers le monsieur et je l'interpelle.
    - Excusez-moi, bonjour..
Le monsieur se tourne vers moi, légèrement surpris.
    - Bonjour, mademoiselle.
Il m'offre un sourire chaleureux et réconfortant.
    - Vous êtes le propriétaire du local? Il est à vendre c'est bien ça?
Il me dévisage quelque secondes, avant de m'offrir de nouveau un sourire.
    - Oui, vous seriez intéressée?
    - Oui, j'aimerais beaucoup visiter, si cela est possible.
Dis-je, avec un franc sourire.
Le monsieur sort une clef de sa poche et ouvre la porte.
Il me fait signe d'entrée, je passe devant lui et je pénètre à l'intérieur du bâtiment.
J'écarquille les yeux d'émerveillement.
C'est magnifique. Même si l'endroit à clairement besoin d'une bonne couche de peinture, la pièce est plutôt spacieuse et très lumineuse. Des moulures ornent le plafond, préservant ainsi le charme du côté ancien de ce bâtiment.
    - La pièce fait environ soixante dix mètres carrés. Ce serait pour quel type d'activité?
Me demande le monsieur.
    - J'aimerais en faire une librairie.
Mon rêve ultime.. Etre mon propre patron et avoir le nez dans les bouquins toute la journée..
    - C'est un très bon projet, et il est clair qu'avec tout cet espace vous auriez largement la place.
J'acquiesce en guise de réponse, tout en continuant de balayer la pièce d'un regard émerveillé.
Seulement, un détails et pas des moindres, me vient à l'esprit. Le prix..
Je n'ai que très peu d'économies. Et un endroit pareil ne doit pas être donné..
D'une petite voix nerveuse, je demande:
    - A quel prix souhaitez-vous vendre ce local?
Le monsieur parut légèrement déstabilisé durant quelque secondes, puis il émet un petit rire.
    - Soixante dix mille euros. Négociable. Ce local n'est pas tout neuf, et à vrai dire je ne m'attendais pas à avoir déjà une visite.
Il rit de nouveau et je l'imite.
    - Si vous voulez, je peux vous proposer de vous laisser mes coordonnées. Comme-ça vous pouvez voir de votre côté, et si vous êtes toujours intéressée, vous n'avez qu'à me téléphoner.
     - D'accord, on a qu'à faire ça.
Dis-je avec un large sourire.
Je veux ce local, et je l'aurais.
Même si pour le moment je n'ai absolument aucune idée de comment je vais faire pour réunir une telle somme..
Le monsieur sort un papier et un stylo, il note ses coordonnées et me tend le papier.
Je le remercie, et je glisse celui-ci dans la poche de mon jean.
Après avoir salué, et promis de donner des nouvelles rapidement au propriétaire des lieux, je sors à toute vitesse dans la rue.
Sans prendre le temps de réfléchir, je me précipite jusqu'à ma voiture et je décide de me rendre chez ma mère.
Si il y a bien une personne qui a les moyens de m'aider financièrement, c'est elle.
Reste à faire le plus difficile.. La convaincre..

Je me garde devant le portail, et je me précipite jusqu'à l'interphone.
Ma mère actionne le bouton du micro, pour demander qui est là, alors qu'elle me voit parfaitement dans la caméra.
Je réponds quand même un:
    - C'est moi, Lexa.
Elle actionne l'ouverture automatique du portail et je lève les yeux au ciel en entrant dans le jardin.
Ma mère, toujours impeccablement vêtue, s'approche de moi en fronçant les sourcils.
    - Bon sang, Lexa.. Mais qu'est-ce que c'est que cette mine affreuse. Tu as des cernes épouvantables..
Elle me tient à bout de bras, continuant son inspection.
    - Tu ne t'es pas maquillée, et tu as perdue du poids.. Et tes cheveux..
Je ne la laisse pas terminer sa phrase et je la coupe d'un ton cinglant.
    - Moi aussi je suis contente de te voir, maman.
Ma mère lève les yeux au ciel.
    - Pourquoi es-tu dans cet état? Ton extinction de voix ne t'as quand même pas fait plonger dans un état pareil?!
Non, maman. C'est Matt qui a fait ça..
Je secoue la tête, pour le chasser de mon esprit.
    - C'était un sacré virus, mais je suis fin prête à m'en débarrasser.
Ma mère pince les lèvres, complètement perdue dans mes propos.
Mais moi, je me comprends, et je sais parfaitement à qui je fais allusion..
    - Viens, entre. Je vais nous préparer du café.
J'hoche la tête et je la suis jusqu'à la cuisine. Je suis soulagée que ma mère n'essaie pas d'en savoir plus.

Après quelque minutes d'échanges banales et sans intérêts, je décide de me jeter à l'eau.
    - Il faut que je te parle de quelque chose, maman.
Elle se fige un instant, sur ses gardes, puis elle reprend son expression imperturbable.
    - Je t'écoute.
Je prends une grande inspiration, le temps de rassembler mon courage et je me décide enfin à parler.
    - Alors, voilà.. aujourd'hui, j'ai trouvée un local commercial à vendre. Il est situé pas très loin de chez moi, et le monsieur le met en vente pour soixante-dix-milles euros, négociable. C'est l'endroit parfait. Vraiment il est superbe.
Ma mère m'arrête d'un geste de la main.
    - Parfait?! Mais parfait pourquoi, Lexa!? Je suis un peu perdue, là..
Son air dédaigneux me crispe, mais je fais tout mon possible pour garder mon sang froid.
    - Pour en faire une librairie, maman. Je veux ouvrir une librairie.
Ma mère part dans un éclat de rire nerveux, mais devant mon regard furieux, elle cesse de rire et prend une expression grave.
    - Tu n'es pas sérieuse, Lexa?! Je te rappelle que tu as déjà un boulot.. Boulot, que tu risques bien de perdre si tu continue de prolonger tes arrêts maladies, soit dit en passant..!
    - Je me fiche complètement de perdre ce boulot! Tu sais mieux que personne que je déteste cet endroit! Ma directrice est tyrannique, et je ne me sens pas bien là-bas.. Tu n'as aucune idée de ce que c'est de se lever le matin avec la boule au ventre rien qu'à l'idée de devoir mettre les pieds dans cet endroit!
Les larmes maculent mes joues.
    - Parfois, il faut savoir prendre sur soi. La stabilité, c'est tout ce qui compte dans ce monde. Tu ne peux quand même pas tout plaquer, pour aller vendre des bouquins, réfléchis pour une fois!
    - Bien sûr que si, je le peux! Le plus important pour moi c'est d'être épanouie et heureuse.
Je suis furieuse, mais j'essaie de toutes mes forces de contrôler mes larmes.
    - De toute façon tu n'as pas assez d'argent pour réaliser ce projet ridicule.. Comment comptes-tu acheter un endroit pareil? Avec quel argent, hein?
Ma mère parle de son ton froid et hautain.
    - J'avais espérée que tu m'aiderais..
Dis-je, d'une petite voix.
Ma mère se met à rire comme une hyène.
    - Tu n'es pas sérieuse?! Ne comptes pas sur moi pour t'encourager a foutre en l'air ton avenir!
    - Tu sais quoi?! Tu as raison. Une fois de plus j'ai étais vraiment stupide de croire que tu m'aiderais, et que tu te comporterais comme une vrai mère!
Je me lève d'un bond, débordante de colère.
    - Lexa! Tu dépasses les bornes!
Ma mère se met à me hurler dessus, faisant éclater un peu plus ma colère.
Je tape violemment mon poing contre la table, et ma mère sursaute.
    - J'en ai rien à foutre, putain! Tu es épouvantable, je te déteste plus que tout au monde! Tu peux bien aller te faire foutre!
Je hurle comme une hystérique.
Ma mère m'observe la bouche grande ouverte, en état de choc.
Sans attendre, j'ouvre la porte et je la referme sans ménagement.
Je sors d'un pas décidée, je rejoins ma voiture et je démarre en trombe.
Des larmes de colères ruissellent sur mes joues.
Putain, qu'est-ce qui m'a pris de me pointer ici?!
Qu'est-ce que j'espérée au juste..?!
Je pousse un cri de rage, tout en conduisant jusqu'à la maison.
Je suis furieuse. Ma mère n'est qu'une garce sans cœur. Jamais elle ne sera là pour moi, elle me l'a bien prouvée une fois de plus..

You Got Me.. Tome 3..Où les histoires vivent. Découvrez maintenant