Peau Glacée

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Deux longs mois s'écoulèrent avant qu'enfin la Comté ne soit en vue. Bilbon avait décidé de presser le pas sur la route et avait même refusé de séjourner à nouveau chez le Grand Seigneur Elrond malgré son insistance à le voir passer le reste de l'hiver au chaud dans les nids elfes. Il n'en voulait pas. Il ne voyait plus que son lit douillet à présent et tout ce qui le rattachait aux Terres Sauvages il voulait vite tout effacer. Ainsi, lorsque la frontière de la Comté fut traversée, Gandalf, qui était le seul qui avait fait le chemin jusqu'au bout et qui n'avait pas été renvoyé par le Hobbit jusqu'à Erebor, posa pied à terre s'appuyant sur son grand bâton de bois. Bilbon avait également laissé le poney à la frontière, après tout il ne se voyait guère l'emporter avec lui jusqu'à son trou de hobbit, il manquait déjà de place. Il confia donc le jeune Palomino au magicien qui regarda Bilbon d'un œil attendrit. Il avait su retrouver son air de Hobbit un peu grincheux mais après tout, il avait été comme cela bien avant le début de cette aventure. Il revenait presque à la normale. Il tira lentement sur ses longs poils de barbe avant de soupirer.

« C'est donc ici que je vous laisse Bilbon, j'ai bien d'autres choses à effectuer, et il me faut parcourir la Terre du Milieu à la recherche du mal qui plane au-dessus de nos têtes. Et bien des choses se cachent encore dans l'ombre... »
Bilbon se contenta de hocher de la tête et lorsqu'il s'apprêta à repartir Gandalf reprit la parole. « Vous êtes une belle personne Bilbon, et je vous estime comme je vous apprécie beaucoup. Mais malgré tout, vous êtes bien petit dans ce monde trop vaste... et l'usage d'anneaux magique ne devrait être fait à la légère. Je vous ai toujours eu à l'œil depuis que vous l'avez trouvé dans les mines des Montagnes de Brume. Je vous en conjure, protégez-le jusqu'à ce qu'il soit temps. »
Le hobbit papillonna des yeux, un peu décontenancé mais il serra tout de même la grande main du vieil homme. « Adieu, Gandalf, mon ami. »
« Adieu, Bilbon, Maître cambrioleur. »

Le hobbit senti une chose se serrer dans sa poitrine lorsqu'il entendit ces mots, et il se contenta donc de commencer sa route vers chez lui pour oublier cette sensation désagréable. Mais une chose elle avait su rapporter un peu de joie sur son visage, ces paysages lui étaient familiers, les arbres et le chahut au loin ne faisaient que raviver ses doux souvenirs à la Comté. Sans vraiment s'en rendre compte, il pressa le pas et remonta à grande vitesse la route de l'Est avant de voir au loin Cul-de-Sac. Il eut un rire soudain mais ses sourcils se froncèrent lorsqu'il remarqua un grand attroupement devant sa demeure. Il senti ses pas le porter plus vite encore jusqu'à ce qu'il grimpe le chemin qui menait à sa maison. Là, le maire se tenait devant un pupitre, maillet à la main, il recevait des propositions de sommes. Bilbon n'en croyait pas ses yeux, ses affaires étaient mises aux enchères ! il courut jusqu'en haut de l'estrade et secoua le maire par les épaules qui en perdit son chapeau.

« Que diable faites-vous avec mes affaires ?! »
« Le propriétaire de cette maison a maintenant disparu depuis assez longtemps pour être déclaré décédé, ses biens sont donc mis aux enchères. »
« Mais je suis bien vivant bougre d'andouille car me voilà devant vous !! »
« Il me faut des preuves ! Vous pourriez être n'importe qui ! »
Rageusement, Bilbon fouilla dans chaque poche de son veston, c'est alors qu'il en extirpa un vieux parchemin abîmé qui se déroula longuement. L'en-tête affichait ce titre 'Contrat d'entrée dans la Thorin et Compagnie' tandis que se déroulait tout un contrat décrivant son rôle de Maître cambrioleur. Ses yeux se mirent à brûler faiblement lorsqu'il passa ses yeux sur les trois signatures en bas de la page. Il y voyait la sienne, celle du témoin Balin, et enfin, celle du chef de compagnie, Thorin Êcu-de-Chêne. Il tendit d'une main faible le contrat au maire qui le lu lentement à l'aide d'un monocle abîmé. Malgré la douleur qu'avait engendré la vue de ce contrat, Bilbon avait pu récupérer sa maison après que le hobbit gras face à lui avait murmuré un « Un cambrioleur chez nous à présent, tss... les Sacquet... ».
À l'intérieur, tout avait été dépouillé, son fauteuil avait disparu, ses cuillères d'argent également, sans oublier ses étagères, ses livres et mêmes les armoires dans son sellier. Fort heureusement, sa chambre était quasiment intacte tout comme sa salle de bains. C'est donc le cœur drôlement lourd qu'il alla sa baigner dans sa petite baignoire après avoir fait chauffer de l'eau dans sa cheminée. Le silence était tombé chez lui, ce qui était bien différent à Erebor où l'on frappait toujours la pierre, où l'on commerçait sans arrêt et jamais on n'arrêtait de construire. Tout était si vivant...

The King's Heart Où les histoires vivent. Découvrez maintenant