Chapitre 3 : Illusion ?

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Un rayon de lune passe entre les rideaux et tombe sur la silhouette dont le visage s'est enfin dévoilé. Son crâne brille d'un éclat glauque tandis que le squelette tourne la tête vers la lumière, me quittant des yeux pendant quelques secondes. Mon cœur bat à une vitesse ahurissante. Je crois que je suis au bord de l'évanouissement.

C'est la Faucheuse, la représentation de la Mort, et elle est dans ma chambre.

La fenêtre s'ouvre brusquement, tandis qu'un courant d'air traverse la pièce en faisant voler la cape du monstre. Je sursaute tandis que la Faucheuse se précipite sur le battant pour le refermer. Elle saisit sa longue faux et se tourne de nouveau vers moi. Aucune expression sur ce crâne blanc, elle se contente de poser sur moi son regard vide. Un craquement brise le silence, sa mâchoire s'entrouvre lentement. Mon regard horrifié la suit des yeux alors qu'elle se penche vers mon lit pour articuler d'une voix sépulcrale :

- « On n'échappe pas au destin Ben... Tu sauras bientôt mon enfant... Sois patient... »

Elle éclate soudain d'un rire qui me glace le sang. Sa mâchoire s'entrechoque en un crissement horrible. Je porte mes mains à mes oreilles pour ne plus l'entendre, tout en serrant fort les paupières, espérant peut-être me réveiller ailleurs. Mais c'est peine perdue, son rire résonne jusque dans mon cœur, s'insinuant jusqu'à mon âme. Mon être entier vibre de ce rire qui semble renfermer toute la cruauté du monde. Alors je hurle, je crie à m'en déchirer les cordes vocales, sans m'arrêter. Je crie pour lui faire peur peut-être, je crie parce que moi, j'ai peur, horriblement peur, je n'ai jamais eu aussi peur de toute ma vie.

Un énorme claquement me fait sursauter et fait cesser mes cris. Je relève la tête, apeuré. La porte de ma chambre est ouverte et ma petite sœur Stella, se tient sur le seuil.

- « Dégage ! Pars, avant qu'elle te rattrape !! » lui hurlé-je.

- « Mais de quoi tu parles Ben ? » demande-t-elle de sa petite voix enfantine.

- « La Faucheuse ! »

- « Mais Ben il y a personne, » lâche-t-elle en pinçant ses lèvres en une moue contrariée.

Je la fixe avec un regard désabusé, comme si elle venait de dire la chose la plus stupide du monde. Elle se frotte les yeux en bâillant.

- « C'était juste un cauchemar Ben. C'était pas la peine de crier comme ça. Tu m'as réveillée. »

Elle semble vraiment épuisée. Devant ce visage ensommeillé, je me lève, les jambes tremblantes, chancelant et l'esprit perdu. Je m'approche de Stella et fourre mon nez dans ses cheveux.

Ma sœur est réelle, elle est là, devant moi...

Elle enfouit son visage dans mon pyjama et je lui dépose un baiser sur le haut du crâne. Je la regarde repartir vers sa chambre, déboussolé.

Je referme lentement ma porte et me laisse glisser jusqu'au sol. En parcourant ma chambre du regard, je me rends compte que je suis réellement seul.

Aucune trace de la Faucheuse.

- « Je suis en train de devenir fou, » murmuré-je.

Je me relève lentement et appuie sur l'interrupteur. La lumière soudaine m'éblouit. Je plisse des yeux pour tenter de voir clair.

Ma chambre est désespérément vide.

C'est impossible, je n'ai pas rêvé, elle était là !

Mon regard est soudainement attiré par une petite tâche sombre au sol. C'est un morceau de tissu noir. Je m'accroupis et approche ma main sans oser le toucher. Une brume opaque flotte au-dessus de lui. Je fronce les sourcils. Ce morceau de tissu appartient à la Faucheuse, j'en suis certain. Je passe ma main au-dessus de la fumée, elle ne se dissipe pas, preuve qu'elle défit les lois de notre monde. Prenant mon courage à deux mains, je saisis l'objet. Je ne ressens d'abord rien puis un léger picotement parcourt ma peau en contact avec le tissu. Ce picotement se transforme bien vite en une violente brûlure. Je laisse tomber le morceau de tissu avec un petit cri de douleur. Celui-ci se transforme en une pluie de cendres.

Je recule, effrayé.

Comment peut-il avoir disparu comme ça ?

Un hurlement déchire le silence. Je me lève d'un bond et me précipite hors de ma chambre. J'ai reconnu la voix de ma sœur.

- « Stella ?! Où es-tu ? Ça va ? » crié-je.

Un sanglot me parvient. Je pousse la porte de la chambre de mes parents et me fige. Ma petite sœur est recroquevillée sur le lit de Papa et Maman, son petit corps est secoué de hoquets.

- « Qu'est-ce qu'il y a Stella ? » lui demandé-je doucement.

Elle lève son visage vers moi, les joues ruisselantes de larmes et maculées de sang.

Post MortemWhere stories live. Discover now