Chapitre 1 : C'est la fin...

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Lorsque je saisis les lames de rasoir, les souvenirs m'assaillent. Je revois ces après-midi passés avec ma sœur Stella et mes parents, ces soirées où Angèle et moi nous racontions nos soucis avant de parler de nous. Ils essayent de me retenir, ils essayent de m'engloutir et de m'empêcher de passer à l'acte. Les larmes coulent sur mes joues. Je sais bien que mon choix sera irréversible, mais la souffrance domine tout, elle a contaminé chaque parcelle de mon être, et je crois que je ne suis plus moi-même.

Je ne veux plus me battre, j'ai trop souffert.

Je prends une grande inspiration et j'enfonce les lames dans ma chair. Elles pénètrent mes poignets et tranchent mes veines dans la longueur. Mon esprit bascule. Lorsque mon sang coule le long de mes bras et jusqu'au sol, mon regard se perd. Mon corps ne réagit pas lorsque je m'écroule à terre. Les cris sortent tout seul de ma gorge mais ils tranchent avec mon expression calme et lointaine. De petits sursauts m'agitent mais mon âme s'envole vers d'autres horizons.

Ça y est, je suis libre, enfin.

***

Là, devant moi, une silhouette aveuglante me fait signe, derrière elle, un tunnel s'ouvre, au bout duquel je distingue d'autres lueurs. Je tends la main vers cet univers dont l'aura paisible m'attire.

C'est le Paradis !

Ce n'est pas mon bras qui se tend devant mes yeux. Non, je ne vois rien. Il n'y a rien. Mon esprit semble en ébullition mais le reste de mon être ne réagit pas. Soudain, un tentacule noir, sorti de nulle part me saisit violemment par la taille. Je tente de me débattre mais mes membres ne réagissent pas.

Je n'ai plus de corps.

Je ne suis plus humain.

Je suis devenu un être immatériel.

Je suis passé dans l'autre monde.

Je suis mort.

Cette phrase résonne en moi et m'emplit d'un profond sentiment de terreur et de solitude, tandis que cet ombre, qui me retient prisonnier, m'entraîne toujours plus loin dans les ténèbres. Je voulais mourir, c'était mon choix, parce que ma vie était trop difficile. Je ne pouvais plus supporter ces mots, ces regards, cette violence. J'étais fatigué de me battre, fatigué de lutter contre un ennemi trop puissant pour moi. Et pourtant... là, je me sens seul et triste. Cette sensation ne correspond pas à l'apaisement que je cherchais.

***

La lumière de l'ange et du tunnel ont disparu depuis longtemps déjà, l'obscurité m'enveloppe, effrayante. Je regrette d'avoir abandonné lâchement, mais d'un autre côté, le désespoir était bien plus simple à accepter. C'était bien plus simple de se laisser porter dans la mort.

J'ai perdu toute notion du temps, je n'ai aucune idée de la direction vers laquelle je me dirige. Seule la noirceur semble remplir l'horizon. Aucun souffle sur mon visage, aucun indice sur la vitesse à laquelle nous allons.

Et si j'étais condamné à errer ainsi pour l'éternité ?

À cette pensée, je sens le souffle me manquer et l'effroi me glacer. Je tente de mettre cette pensée de côté mais elle revient avec toujours plus d'insistance. Si j'avais pu bouger, je me serais secoué, malheureusement j'en suis incapable. Ce n'est pas comme ça que j'imaginais la mort, je la pensais plus belle, plus accueillante, plus sereine...

Mais à présent, j'erre entre deux univers, perdu.

Je ne sais plus je suis.

Je ne sais plus qui je suis.

Je suis seul.

Je ne sais plus...

Post MortemWhere stories live. Discover now