Chapitre 5 : Un monstre

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Je pousse Stella vers sa chambre pour récupérer quelques affaires. Nous passons dans la mienne avant de fermer à clé la porte de l'appartement. Le souffle court, je dévale l'escalier de l'immeuble à la suite de ma sœur. Une fois dans la rue, le froid me saisit, nous avons à peine pris le temps d'attraper une veste. Je regarde autour de nous, la nuit nous enveloppe, terrifiante. Chaque ombre semble nous observer.

Je prends Stella par la main et cours en direction de la place de la Bourse, Angèle, ma petite amie, habite dans le coin. Le cœur serré par la peur et le froid, j'entraîne ma sœur toujours plus vite sur les trottoirs. Les bars sont encore pleins et les passants nous regardent bizarrement. Je me demande s'ils ont vécu la même chose que nous, sûrement pas, vu la façon dont ils nous fixent... Ils doivent nous prendre pour des fous. En même temps, qui ne le deviendrait pas, après avoir vu les cadavres de ses parents ? Je n'ai rien demandé, pourquoi fallait-il qu'ils meurent ? Et Stella ? Elle est si jeune, je serai incapable de l'élever seul ! Le désespoir me fait tourner la tête. Comment vais-je survivre ? Angèle saura-t-elle m'aider ?

***

Nous arrivons bientôt au pied de l'immeuble d'Angèle. Mes doigts sont tellement glacés que je ne les sens plus. La peur domine tous mes autres sentiments. Elle est ancrée en moi, aussi sûrement qu'une balle de pistolet qui brûle la peau. Mon être demeure crispé autour de cette peur comme si plus rien n'existait d'autre que cette sensation de vide douloureux. Stella, elle, regarde résolument devant elle.

Elle est choquée.

Je crois que je le suis aussi. En réalité je dois simplement être perdu au fond de moi-même, semblable à un naufragé, seul au milieu de la mer qui n'aperçoit pas la côte et qui sait qu'il va mourir, là, sans personne. La détresse fait partie des pires sentiments, elle ne laisse aucune place autour d'elle.

Je me secoue. Je ne suis pas encore mort. J'ai un peu de temps devant moi. Enfin, normalement... si tout se passe bien. En fait, peut-être que je suis déjà mort et que tout cela n'est qu'un cauchemar.

Oh je suis perdu, plus rien n'a de sens !

Ce qui est sûr c'est que, quelle que soit la situation, je n'ai pas le droit d'abandonner, pas maintenant. Je dois me battre. Pour Stella. Pour Papa et Maman. Il faut que je raconte tout à Angèle, pour savoir ce qu'elle en pense. Je tape le code de la porte avec frénésie. Cette dernière s'entrouvre lentement. Je pousse Stella dans le bâtiment et m'y engouffre à sa suite. L'obscurité règne dans le hall, je me dirige vers l'interrupteur et appuie dessus.

Rien ne se produit. Aucune lumière n'illumine la pièce.

L'angoisse me saisit, je tente de trouver un moyen d'accéder aux escaliers et aux étages mais la porte de l'immeuble s'est refermée et l'obscurité est totale. Je ne réussis qu'à me cogner contre un mur. Je lâche un juron en me frottant le crâne.

- « Stella, reste à côté de moi s'il te plaît » lancé-je à ma sœur.

Alors que je commence à tâtonner les murs à la recherche d'un point de repère, ma main effleure un objet glacé. Mes doigts le parcourent lentement. Il semble immobile et pourtant j'ai l'impression qu'il est vivant. Une terreur sans nom grandit au fond de moi, si puissante qu'elle menace de me submerger.

Je fourre ma main dans ma poche et saisis mon téléphone portable. J'allume la lumière de ce dernier et ce que je découvre me secoue d'un violent frisson de dégoût.

Une main...


Elle semble appartenir à un squelette tant elle est décharnée et pâle.

Un cri incontrôlable s'échappe de ma gorge. La main se déplace lentement le long du mur et disparaît en une fraction de seconde.

Je tente de reprendre mon souffle mais ma respiration saccadée est la preuve même de ma peur. Je me retourne pour rapprocher Stella de moi.

Ma sœur a disparu.

- « Stella ?? » appelé-je doucement, de peur de voir surgir le propriétaire de cette horrible main.

- « Oui » répond-elle dans un souffle en sortant de derrière les boîtes aux lettres.

- « Qu'est-ce que tu fais ? » lui demandé-je, surpris et à moitié rassuré.

- « J'ai peur Ben » murmure-t-elle.

- « Ça va aller, je suis là Stella » lui dis-je doucement.

En réalité, j'essaye de m'en convaincre. Je jette sans cesse un regard par dessus mon épaule pour être sûr que le monstre n'est pas là.

Grâce à la lampe de mon téléphone, je me dirige lentement vers la cage d'escaliers après avoir pris la main de Stella dans la mienne. J'ai peur de découvrir le visage de cette créature.
J'avance pas à pas et dirige le faisceau lumineux derrière le mur d'où a surgit la main.

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