1 : Poudlard Express

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Je réalise que je suis installé dans un wagon du Poudlard Express seulement maintenant. Je ne sais pas ce qui m'a fait sortir de mes pensées ? Est-ce Ron qui raconte ses vacances en Australie à Luna et Neuville qui se sont installés avec nous ? Est-ce Hermione qui sourit discrètement en me lançant un regard interrogateur de temps en temps par-dessus son dictionnaire de runes ? Est-ce Ginny à mes côtés qui babille à propos de la prochaine saison de Quidditch ? Je ne sais pas depuis combien de temps je suis plongé dans mes songes, mais la campagne anglaise défile à toute vitesse sous mes yeux ...

Cela m'arrive de plus en plus souvent je trouve, j'ai du mal à reprendre pied dans la réalité, ma vie n'a été qu'une succession de murs infranchissables et de gouffres béants... Je ne connais pas la "normalité". Ce mot n'a d'ailleurs aucun sens pour moi.

Chez les Dursley, avant que je n'apprenne la vérité sur ma condition, mon monde et son histoire, la normalité était de vivre dans un placard sous l'escalier, d'être insignifiant, esclave de cette famille affreuse, corrigé si mon comportement déplaisait, si je disais un mot de travers ou tout simplement parce que l'oncle Vernon en avait envie... Voilà ce qu'était la normalité jusqu'à mes onze ans.

Puis Poudlard, toute mes aventures et la guerre. Je n'ai jamais été à l'aise avec mon statut, juste Harry n'existait et n'existe toujours pas d'ailleurs. Aujourd'hui, la normalité se résume à mes pensées vagabondes plus ou moins ternes, noires, glauques, toutes les émotions et sentiments peuvent y passer.

Dans ma tête rien n'a de sens, c'est toujours en ébullition, cependant à l'extérieur, mon visage est neutre, j'évite la foule, je préfère être seul, oui Harry Potter est mort pendant cette guerre ... Et je tente de découvrir qui est le nouveau Harry, juste Harry.

Le wagon est trop bruyant tout à coup, je saute presque sur mes pieds pour m'enfuir du waggon, pas la peine de leur donner une explication, ils savent ce que je ressens et respectent cela. Je me dirige vers l'arrière du train, le regard pointé vers le bout de mes chaussures, je ne veux voir personne, les gens s'écartent devant moi, ils sont émerveillés, compréhensifs, admiratifs et j'en passe, je n'entend même pas ce qu'ils me disent, me demandent ? Je sens l'angoisse monter mais ne laisse rien transparaître. Si je panique, qui ne le fera pas ? Les mains dans mes poches se resserrent sur leur contenu au point que mes ongles percent légèrement la paume.

Enfin dehors et seul. Je m'assois au sol contre la parois à droite de la porte, je sors l'objet de ma convoitise avec frénésie, personne ne peut assister à cela, le Sauveur qui s'allume une clope avec la même lueur de folie qu'un toxico dans les yeux et les mêmes gestes impatients ... Je tire une longue latte, la fumée me brûle la gorge et je m'en délecte, le goût du tabac s'imprègne sur ma langue, je sens l'angoisse diminuer petit à petit ...

J'ouvre les yeux et expire la fumée avec plaisir, je me détends enfin et observe mon environnement. Il fait encore bon, les volutes de fumée sont emportées avec violence par le souffle du train. J'observe le paysage sans vraiment le voir, de nouveau plongé dans mes songes, anesthésié par la vie, ma cigarette se consumant lentement, la fumée me remplissant les poumons.

Le point rougeoyant de la fraise me fascine, la température de cette petite braise incandescente peut atteindre 800°C en moyenne, sa couleur rouge orangée changeante en fonction de l'air qui la traverse est chatoyante, m'hypnotise. A quoi ressemble la douleur de la toucher volontairement ? De l'écraser du doigt ? Je sais qu'une brûlure est vive au début puis lancinante, cuisant la chair, mais est-ce aussi douloureux quand c'est écrasé ? Le reflex est de retirer toute suite la chaire en contact, c'est le principe de survie de notre corps, mais si quelqu'un m'écrase un mégot sur le bras, sans que je puisse y faire quoi que ce soit ... A quoi ressemble cette douleur ? Et comparer à un Doloris ? Une fracture ? Tout ceci me fait penser à ...

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