Chapitre 8

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¤ Photo de classe

Troublé. Voilà le mot qui caractérisait son état. En se retournant encore et encore dans son lit, il ne cesse de repenser à l'étrange tournure qu'avait pris la situation. Et à pourquoi diable le bleuté lui était venu en aide ! Cela cache à coup sûr quelque chose... Mais pour le moment, le blond n'a pas envie de réfléchir. Un sourire se dessine sur ses lèvres. Pour la première fois, quelqu'un lui était venu en aide.


- Meliodas ! s'exclame la jeune fille aux cheveux gris en le voyant arriver. T'es au courant ? C'est aujourd'hui la photo de classe !

L'interpelé fait la grimace. Il déteste plus que tout les photos. Et encore plus celles prises par un photographe incompétent et blasé qui a un emploi du temps à boucler le plus vite possible.

- 'tain, ils abusent ! Ils auraient au moins pu prévenir à l'avance, râle Gowther. Histoire que ma tenue soit pas complètement ridicule.

En effet, le jeune homme est en habits de sport, confortable et... rose. Bonbon. Flashy. Qui explose les yeux de quiconque ose ne serais-ce que l'apercevoir. Agrémenté en plus d'un sweat mouton.

- C'est pas le rose qui dérange, rit Diane, c'est plus le fait que ta tenue ne ressemble à rien. Euh, Meliodas ? T'as dormi cette nuit ?

Elizabeth pousse un petit cri en voyant les cernes mauves creusant les joues de son ami.

- Tout va bien ? s'écrie-t-elle.

- Ouais, j'ai juste eu une insomnie.

Il prononce le mensonge sans ciller, en regardant son amie droit dans les yeux. Une pointe de culpabilité lui tord le cœur. Il aimerait tellement tout lui dire, déverser le flot de noirceur qui hante ses pensées et son âme, pouvoir se soulager du poids de son passé un instant. Mais il voit aussitôt, presque dans un demi-rêve, son visage épouvanté, ses larmes, ses paroles au poste de police, de la pitié dans son regard. La pitié l'anéantirait. Lui prouverait qu'au fond, il est toujours faible. Alors il soutient les prunelles d'un somptueux bleu d'Elizabeth. Celle-ci lui sourit avec douceur.

- Tu dormiras sans doute mieux cette nuit, du coup.

- Y a intérêt, rit-il en passant sa main dans ses cheveux.

Plus jamais je repasse une nuit comme ça, pense-t-il. Les rares moments où il dormait, il se réveillait en sueur et en hurlant. Les cauchemars le hantaient, attendaient le moindre petit signe de faiblesse pour revenir à la charge. Le grincement du vent dehors le crispait, torturait son cerveau embrumé. A cet instant précis, il ne souhaitait qu'une chose. Fermer les paupières et offrir un peu de répit à son pauvre crâne. Sombrer dans le délicieux noir de l'oubli. Malheureusement, un tel souhait était impossible. Les rêves le rattrapaient toujours.

- Et toi Liz', demande-t-il avec un léger sourire, comment tu vas ?

Prise au dépourvu par la tendresse qu'on sentait poindre dans la question, la jeune fille rosit et se tordit les mains.

- Oh, écoute je vais bien, je suis juste crevée à cause des cours. Et j'ai une pression de dingue pour les examens ! Mon père est tout le temps sur mon dos au sujet de mes notes, rit-elle.

En effet, son père, aka le directeur de l'établissement, désire le meilleur pour ses filles. Et refuse qu'Elizabeth finisse comme leur sœur aîné Veronica...

- Désolé d'avoir été un peu distant ces derniers temps. J'étais distrais et... mes problèmes familiaux ne s'arrangent pas, dit le blondinet en ponctuant la dernière partie de sa phrase d'une grimace.

Une expression navrée passe sur le visage de son amie. Le cœur de Meliodas se pince. Il donnerait tout pour cette inquiétude disparaître de son charmant minois. Il ne méritait pas qu'elle éprouve ce sentiment pour lui. Il n'en était pas digne.

- Ce n'est pas grave, tu sais. On sait que tu as besoin de solitude de temps en temps. Mais rappelle-toi qu'on est là pour toi.

- Absolument ! approuve Diane en s'incrustant totalement dans la conversation.

Un sourire vient réchauffer le visage du lycéen. La joie efface toute trace de ses cauchemars nocturnes. La désopilante sonnerie de l'établissement retentit, leur vrillant les tympans au passage. Gowther pousse un soupir désabusé avant de se diriger vers le gymnase d'un vert pâle absolument ignoble. D'un pas vif, le blondinet le rattrape.

- T'as pas cours, toi ?

- Bravo champion, ceci était la bonne question ! Non, Howzer vient de me dire que notre prof de maths est absente.

- Beurk ! Quelle idée de prendre cette spécialité ! Décidément, je pourrais jamais comprendre ton amour de la science...

- Ahah, très bonne ! Bon, je voulais te demander si...

La fin de sa phrase lui resta en travers de la gorge. Il venait d'apercevoir le bleuté marchant nonchalamment en direction du bâtiment littéraire.

- Si ? questionne le rosé en suivant le regard du blond.

- J'te dis plus tard, faut que j'y aille.

- Faudrait savoir... bougonne son ami en observant Ban d'un air curieux.

Une fois arrivé à la hauteur du musculeux géant, Meliodas l'interpelle :

- Oh, Ban ! T'as quoi comme cours ?

Le regard agacé de l'adolescent s'adoucit en reconnaissant son interlocuteur.

- Philo. J'parie que t'as pas cours toi, non ?

- Effectivement, prof de maths absente. Je viens de l'apprendre que ce matin.

- Aïe, coup dur pour ton sommeil.

A ce mot, ils échangèrent un sourire complice. Un léger sourire flotte sur les lèvres de Ban.

- T'as quoi de prévu du coup ? demande-t-il en grimpant avec agilité les escaliers.

- Pour être honnête, je prévoyais de glander dehors ou sur les bancs de la cour à regarder des animés.

Le bleuté hausse un sourcil, comme s'il venait d'avoir une idée.

- Ça te dirait de t'incruster dans mon cours ?

- Hein ?! fit le blondinet, pris au dépourvu.

Sans comprendre ce qu'il se passait, Meliodas finit par atterrir à une table vers le fond de la salle. Seul le regard chaleureux et à la fois moqueur de son complice l'empêche de prendre la fuite.

Hate me Love meWhere stories live. Discover now