Chapitre 11 : Le hacking

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Amétrine était en train d'écouter les multiples messages de sa boîte vocale. Il était très tard, mais il fallait absolument qu'elle s'en charge si elle ne voulait pas accumuler trop de retard. Depuis qu'elle avait trouvé une nouvelle piste pour retrouver Robin – piste qui l'avait finalement conduit à rencontrer Hippolyte – elle avait totalement délaissé ses potentiels clients.

Le travail de la jeune femme était plutôt simple. Tout d'abord, on la contactait pour tracer quelqu'un, trouver des informations, détruire une vie, au contraire en sauver une. Ensuite elle étudiait le cas et si elle l'acceptait, elle s'exécutait. La contacter était facile : il suffisait de le vouloir pour trouver son numéro. Le bouche à oreille, un sombre forum sur internet, un ami qui a déjà utilisé ses services. Mais il ne fallait pas croire qu'elle était imprudente pour autant : quand on l'appelait, elle gardait toujours en ligne son interlocuteur assez longtemps pour tracer l'appel. Si elle sentait que ça pouvait être un coup monté – par la police notamment – elle raccrochait aussitôt. Son téléphone étant intraçable, elle évitait ainsi tous les risques. A l'inverse, si la source lui semblait sûre, elle demandait les détails de la requête. Et comme quand les gens étaient angoissés, ils avaient tendance à parler – trop parler – il lui suffisait de récolter les informations personnelles qu'ils laissaient trainer sans s'en rendre compte pour trouver leur identité, leur travail, leurs connaissances, leurs passions, bref, leur vie.

Parfois, son petit rituel ne fonctionnait pas : un client un peu trop expérimenté, un adversaire un peu trop rusé. Dans ces cas-là, elle ne prenait pas la mission : mieux valait être prudent.

Quand elle commençait tout juste son business et qu'elle devait s'absenter – la plupart du temps parce qu'elle rendait visite à sa mère qui n'avait aucune idée de ses activités illégales – elle rattrapait toujours son retard à son retour. Mais puisque son affaire avait très vite proliféré, elle avait vite décidé de changer de système : désormais, si elle s'absentait, elle indiquait dans sa boîte vocale qu'il fallait rappeler ultérieurement. Même si elle perdait sûrement quelques missions ainsi, elle avait tellement de choix qu'elle pouvait bien se le permettre. Le problème était qu'elle n'avait fait ni l'un ni l'autre avant de mener sa piste pour retrouver son frère, et elle avait désormais des dizaines d'appels en absence, et presque autant de messages vocaux. Et puisqu'elle travaillait toujours avec intégrité, elle ne voulait pas ignorer ces derniers alors qu'elle était celle qui n'avait pas prévenu de son absence.

A vrai dire, ce n'était pas vraiment de sa faute. Elle n'avait prévu d'être indisponible qu'une nuit. Mais évidemment, rien ne s'était passé comme prévu : elle était tombée sur Hippolyte, il l'avait conduit à C. T. U. P. – où elle avait retrouvé son frère – et elle s'y prélassait depuis désormais quelques jours sans penser à ses affaires.

Amétrine n'avait plus besoin d'argent depuis bien longtemps : le hacking payait bien – vraiment très bien. C'était fou le pognon que certaines personnes étaient capables de mettre pour détruire leur ex, découvrir si on les trompait, et ainsi de suite. Mais hors l'aspect financier, elle avait besoin de s'occuper et ce même si cela voulait dire qu'elle devait écouter une centaine de messages vocaux.

Elle souffla et prit sa tête dans ses mains. L'audio vocal d'un homme lambda de quarante ans l'excédait. Et ce n'était ni le premier, ni le dernier de la soirée ! Combien de fois allait-elle devoir répéter qu'elle ne prenait pas les petites affaires sans aucun intérêt comme les cambriolages ? Et puis qui était assez stupide pour payer un hackeur – ce qui pourrait les envoyer en prison pour au moins cinq ans – juste pour une télévision et quelques disques durs ? Parce que la plupart du temps, c'était bien de cela dont il s'agissait.

Mais soudain, la coupant dans son exaspération, sa porte s'ouvrit en fracas.

- A. M., prononça Sylvestre la voix essoufflée.

La jeune femme aux cheveux violets se tourna vers lui.

- On a besoin de toi.

- Je suis un peu occupé là...

- On se fait hacker, et Jade n'arrive pas à gérer.

Sa voix était pressée.

Les sourcils d'Amétrine se haussèrent. C. T. U. P. se faisait hacker ? Pourtant ils avaient un bon système de défense, si elle avait voulu obtenir de lourdes informations de son côté, elle aurait dû y passer plusieurs heures. Ceci dit, c'était justement ce qu'était en train de faire les auteurs du hacking, et s'ils étaient assez doués, ils allaient réussir à trouver ce qu'ils voulaient.

Elle se leva de sa chaise et suivit Sylvain en direction du bureau de Jade. Qui disait trouver des informations sur l'organisation, disait aussi trouver des informations compromettantes sur Robin, et ça, il en était hors de question.

Le duo arriva environ une minute plus tard dans la salle de hacking de l'agence. S'y trouvait déjà Hippolyte, Robin, Jade en train de s'épuiser sur son ordinateur, et Maxime.

- T'es pas obligé de faire ça, annonça Robin.

- Oh ta gueule, fit Amétrine en lui mimant de se taire avec sa main.

Elle prit une chaise roulante qui trainait là et la plaça aux côtés de Jade.

- T'as fait quoi ?

- J'ai mis la sécurité sur tous les dossiers confidentiels, coupé le réseau à tous les autres appareils électroniques de l'agence, et j'essaye de trouver par où ils sont rentrés mais j'y arrive pas. On a aucun Cloud, aucun Drive, rien de connecté.

La jeune femme hocha la tête, et emprunta le clavier à son collègue hackeur.

- Y a quoi de risqué ici ?

- Pas mal de choses, c'est par cet ordinateur qu'on passe pour transférer nos informations confidentielles.

- Tu les supprimes une fois livrée ?

- Evidemment.

Mais l'une des premières choses que l'on apprend en hacking, c'est qu'en informatique, rien ne se perd définitivement. Amétrine leva les yeux au ciel. Jade ne semblait pas être à la ramasse, il avouait facilement ses limites mais ses réflexes étaient aiguisés. Mais leurs ennemis étaient d'un autre niveau.

- T'as dû les ralentir avec la sécurité.

- Tu sais comment les virer ?

- Sans trouver la source de son intrusion c'est assez dur. Mais j'ai une idée, bouge pas.

L'ancienne brune se leva de son siège qui glissa sur quelques mètres, et partit de la pièce. Personne ne la retint, mais elle sentait toute la pression autour d'elles. Elle remonta par les escaliers à ses appartements, fouilla en vitesse dans son sac à main, et y trouva une clef USB qu'elle avait elle-même trafiquée. Elle redescendit en vitesse et fonça de nouveau dans le bureau du prénommé Serpent.

En arrivant dans la salle, elle reprit sa place aux côtés du hackeur, et mit la clef USB dans l'ordinateur. Une seconde plus tard, tous les fichiers ouverts se fermèrent brusquement, et l'écran grésilla. Le fond d'écran disparut, et les raccourcis sur le bureau également.

- T'as fais quoi ?

- Je vous ai collé un virus.

- Pardon ?

Hacker GirlWhere stories live. Discover now