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Partie dédiée à adjaratou2000

Bonne lecture !

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Pape Mbathie Thiandoum:

Abattu, je marchais nonchalamment pour rejoindre ma maison, une maison qui était autant vide que moi. J'ai plus d'une fois voulu la vendre pour retourner à Kolda, là où je me sentais bien et où j'étais en paix, mais j'ai abandonné. Car elle renferme beaucoup de souvenirs. Elle a été témoin de tout ce que j'ai vécu de bon ou de mauvais et j'y ai mis toute ma vie. J'ai durement travaillé pour la construire espérant après former ma propre famille.

Travail?

J'ai tout perdu. Je n'ai plus de travail. Comment pouvais-je travailler dans l'état dans lequel j'étais ?

Je ne pensais pas que la mort de Mariata allait tant changer ma vie. Elle l'a complètement chamboulée. Je ne dormais plus chez moi la nuit, ayant peur de la revoir ou d'entendre encore sa voix. J'ai ensuite commencé à avoir des hallucinations pendant la journée, ce qui me faisait crier comme un fou, me poussant à quitter définitivement ma maison pour aller me réfugier devant celle de Galo. Il m'avait chassé sans pitié, ne cherchant même pas à me comprendre. J'avais fini par faire de la rue ma nouvelle maison. Et les gens ont commencé à me prendre pour un fou.

J'avais les habits sales, les pieds nus et poussiéreux, j'avais un comportement bizarre. Donc j'étais fou. Selon la société.

Ce qu'elle ne sait pas, notre société, c'est que la folie c'est dans la tête, c'est psychologique. Ceux qu'elle traite de fous sont plus humains. S'habiller classe et chic, avoir une belle maison, conduire une belle voiture, travailler, ne signifie pas être normal. Les fous sont dans les maisons, dans les écoles, dans les entreprises, dans les ministères et non dans la rue.

Je disais que la société me prenait pour un fou. Mentalement, je n'étais pas stable. J'avais des problèmes et je souffrais beaucoup. Au lieu de m'aider, elle m'a rejeté.

Je dormais dans la rue, je mangeais dans la rue, je faisais mes besoins dans la rue. J'avais voulu retourner chez moi mais je ne savais plus où elle se trouvait. C'est comme si j'avais perdu la raison. Les enfants avaient peur de moi. Mais parfois, ils me lançaient des cailloux avant de courir ce qui me poussait à les pourchasser. Ça leur faisait rire. C'était amusant.

Pour manger, j'allais dans les poubelles. Personne ne voulait me donner à manger donc je n'avais pas trop le choix.

Pendant des jours, j'ai vécu dans la misère, dans la famine, dans la saleté, dans la peur, dans l'insécurité.

Et j'avais fini par m'y habituer.

A force de passer mon temps à marcher, j'avais atterri dans le quartier de ma mère.

Ma sœur m'avait trouvé en train de chercher à manger dans la poubelle.

__ Wa Pape? Pape loy deif ni( Mais Pape? Pape que fais-tu ?)

Je l'avais regardée bizarrement.

__ On t'a cherché partout. Que t'est-il arrivé ?

Elle avait commencé à pleurer ce qui ne m'avait guère touché. Elle avait voulu me toucher mais j'ai reculé pour finir par courir.

Je ne sais pas comment mais mon frère avait fini par me rattraper et m'avait amené de force chez moi. Ils avaient pitié de moi et ma mère ne pouvait retenir ses larmes. Mon père a été informé. Il fallait que je me soigne donc il m'a amené à Kolda où j'ai suivi un traitement.

Unis par le destinWhere stories live. Discover now