Chapitre 19

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Il m'a fallu trois jours pour reprendre le dessus. Trois jours et à peine une dizaine d'heures de sommeil. Je maquille mes cernes avant de quitter ma chambre, je joue le jeu du gars bien dans sa tête, dans sa peau et je me défonce pendant les entrainements pour ne plus avoir à penser. C'est plus simple.

— Le troisième.

Je lance un regard par-dessus mon épaule à Ness. Sur un tapis de course à l'arrêt, il croise ses bras sur le moniteur et penche la tête avec son sourire pourri. Je ne suis pas remonté sur le toit, j'ai fait au mieux pour fuir Ness et ses questions.

Je hausse un sourcil pour l'inviter à continuer puis mes yeux courent sur le reste de l'équipe dans la salle de muscu. On est dimanche et j'aurai vraiment cru qu'une bonne partie de mes coéquipiers se désisteraient mais on est tous là, en tenue. Brett et Jonas sont aux anges d'avoir réussi à nous y trainer.

— Pour se muscler, il faut bouger.

— Remets-toi à courir alors, je souffle en me détournant.

Mauvaise idée : Charleston est planté devant moi, une bouteille tendue dans ma direction. Je le remercie du bout des lèvres alors qu'il s'éloigne déjà. J'hésite une seconde de trop à le rappeler et il rejoint les perruches. Si j'avais réussi à gagner un brin de sa confiance, ça s'est définitivement envolé.

Je retourne à mon entrainement en refoulant mes pensées et le ricanement de Ness. Lui, je vais finir par le pousser du toit. Une heure et demi plus tard, on est tous dehors, sur le parking et je serre les poings dans la poche de mon sweat quand Daren me fusille du regard. Tout ça parce que Brett me demande si je joue avec lui au match de jeudi et que j'ai répondu que j'y comptais bien.

— Lael, je te laisse ma bagnole. Max, tu viens avec moi.

Surpris, je me tourne vers Jonas qui a déjà lancé ses clefs au blond. L'équipe se sépare pour rejoindre les voitures et le capitaine pose une main sur mon épaule pour nous forcer à contourner le stade et nous diriger vers le parc à l'arrière des bâtiments.

— J'ai fait une connerie ?

— Non, rit légèrement Jonas. J'ai rien à te reprocher.

Je fronce les sourcils alors qu'il m'indique du menton de rejoindre le portail pour sortir du campus, qui mène au parc. Les pieds qui tapent le gravier, je suis Jonas qui se dirige vers l'espace de jeux pour bambins. Un énorme bateau de pirate en bois sert d'aire de jeu à six gosses, deux mères sont assises sur des balançoires en les regardant alors qu'un père est avec eux, à faire le méchant, les bras levés. Les rires m'hypnotisent un moment avant que Jonas me donne un coup léger dans le flanc avec son bras.

— Tu veux des enfants ?

— Oh non, je marmonne en secouant la tête. Ça bouffe ton temps et ta vie.

— Charmant. T'es conscient que les gens qui ont des enfants l'ont fait parce qu'ils le voulaient ?

— C'est vraiment ce que tu crois ?

Je lui jette un regard plein d'ironie et remarque son sourire amusé. Il se paye ma tête. Je soupire et enfonce mes mains dans mes poches alors que je dévisage de nouveau le tableau devant nous. C'est clair que les parents ont l'air heureux d'être là : eux, ils l'ont choisi. C'est loin d'être le cas pour tous.

— Romeo m'a dit qu'il t'avait raconté d'où ils venaient, avec Omare.

— Ils ont morflé.

— Pas tant que ça, répond Jonas en haussant les épaules. Sa mère lui filait des thunes, ils ont bossé dans un bar où on les traitait plutôt bien et malgré quelques conneries, ils ont toujours trouvé leur place.

RACOONS #1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant