Chapitre 10-3

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Je bus une gorgée de mon diabolo puis tâchai de raffermir ma voix avant de déclarer :

— J'aime beaucoup Angèle. En plus d'être adorable, elle est aussi très jolie.

Desya jeta un coup d'œil derrière son épaule avant de regarder mon verre, l'air lointain.

— Oui, ça va, elle passe.

Elle passe ?

— Peut-être que fréquenter quelqu'un d'autre à East Harlem vous fera tourner définitivement la page sur Charlotte.

Olsen ferma les yeux et serra ses paupières le plus fort possible avant de les rouvrir.

— J'ai déjà tourné la page, répondit-il en continuant de fixer mon verre. Jamais une femme ne m'a fait perdre la tête et ce n'est pas demain que ça arrivera.

Charlotte avait compté pour lui, mais pas assez visiblement.

— Comment s'est passée cette dernière visite en prison, entre vous ?

— Bien, nous avons parlé de tout et de rien. Il n'y avait pas le moindre signe d'une future rupture. Tout était OK.

Le jeune homme hochait la tête comme s'il cherchait à se convaincre de ses propres paroles puis changea brutalement de sujet :

— Mon téléphone est resté à l'appartement et je dois envoyer un message important à mon oncle. Je peux emprunter le vôtre ?

L'air méfiant, je fronçai les sourcils :

— Ce n'est pas autorisé. Ce message peut bien attendre un peu. Non ?

— Pas vraiment. Le juge demande que mon avocat remplisse un formulaire important. Je dois lui rappeler de le faire dans l'heure sinon ma demande sera rejetée.

— Quelle demande ?

— Une permission de soixante-douze heures pour sortir du quartier.

Je redressai mes épaules et balayai la salle des yeux, peu fréquentée à cette heure-ci de la journée. Je pouvais dire non. D'ailleurs, je devais dire non. Rendre ce service à Desya ne rentrait pas dans mes fonctions. Pourtant, je savais au fond de moi à quel point c'était important qu'il rende les formulaires et autres papier administratifs à temps au juge Gibson qui était intransigeant avec les délais. Après un court moment de réflexion, je sortis mon téléphone de mon sac et le tendis à contrecœur à Desya qui me remercia un peu surpris que j'accepte aussi facilement.

Nerveuse, je le regardais tapoter sur le clavier. Les secondes paraissaient être des heures. Quand il me le rendit, je m'empressai de le ranger dans mon sac puis posai une main sur la table.

— On dirait une petite fille qui a fait une bêtise, déclara Desya, un sourire cynique aux lèvres.

Une lueur amusée traversa ses yeux. Je passai une main dans les cheveux pour les ramener vers l'arrière et répondis d'un ton sec :

— Je n'aime pas ne pas respecter les règles.

— C'est dommage. C'est ce qu'il y a de plus excitant.

J'ouvris deux fois la bouche pour lui répondre, mais aucun son n'en sortit. Gênée, le visage bouillant, je baissai la tête et pris une nouvelle gorgée de ma boisson. Je ne supportais pas la sensation que je ressentais. C'était mal. Je devais partir d'ici, loin de cette atmosphère lourde et suffocante.

— Je dois y aller !

Desya posa sa main sur la mienne pour m'empêcher de me lever. Je tirai dessus, mais celle-ci était solidement coincée sous la sienne.

— Laissez-moi partir, grognai-je entre les dents.

Son expression impérieuse et son sourire effronté m'obligeaient à puiser dans mes réserves pour l'affronter. Olsen finit par me lâcher la main puis déclara, cassant :

— On se voit tout à l'heure à la réunion. Votre petit ami a convaincu le juge d'arrêter nos entretiens individuels. Gibson a décidé que je devais intégrer les groupes de paroles afin de ne plus me retrouver seul avec vous.

Il ne m'apprenait rien. Paolo s'était donné beaucoup de mal la semaine dernière pour revoir tout mon programme dans son ensemble. Je pris une profonde inspiration.

— Je sais !

Sur ce, je partis d'un pas rapide en me persuadant que c'était mieux ainsi. Rester seule avec Desya avait comme un goût de danger un peu trop délicieux.

Burn, beautiful Crow ( Version Française )Where stories live. Discover now