Chapitre 2

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Lorsque je me réveillai, une seconde fois, j'étais assise contre le mur de bois qui avait imbibé d'eau tous mes vêtements à cause de l'humidité. Mes jambes étaient repliées contre moi dans une position inconfortable, appuyées aux barreaux. J'avais toujours mal au coude, mais celui-ci avait au moins arrêté de saigner, grâce au bandage d'Estee. À la pensée de celui-ci, les souvenirs de ce qui s'était passé me revinrent à l'esprit. Je m'assis. Combien de temps s'était-il écoulé ? Je réalisai soudain que j'avais complètement perdu la notion du temps. Etions nous le matin ? Le soir ? Le midi ? Quand avait eu lieu l'attaque ? Étais-je restée longtemps inconsciente ? La panique montait en moi tandis que ma respiration s'accélérait. Qu'est-ce qu'Henri allait faire de nous ? Nous torturer ? Nous pendre ? Je me massai le cou à cette simple pensée.
Je levai les yeux. Estee me regardait, le regard amusé.
Il me sourit alors. Je n'arrivai pas à deviner ce à quoi il pensait. Je lui dit en feignant de ne pas être intéressée :

-T'es content, maintenant ? Tu sais très bien que les histoires d'amour chez les Pirate finissent toujours mal ou nous attirent énormément de problèmes.

Il parut surpris, mais dit d'un air innocent :

-Personne ne m'a jamais rien dit.

-Tu ne peux pas être sérieux un instant ? M'énervai-je, au bord de la crise de nerf.

Il ne comprenait donc pas ? Cela ne fonctionnerait jamais !

-Oh là ! Du calme ! Maintenant, je sais qu'il ne faut jamais te laisser mal dormir !

-Mais enfin Estee ! Tu sais aussi bien que moi que, entre nous, ça ne marchera jamais !

Il plissa les yeux un instant, l'air de réfléchir juste pour me faire plaisir. Puis, il répondit joyeusement :

-Rien ne coûte d'essayer.

Voulant absolument changer de sujet, il tourna la tête vers une gamelle d'eau glissée en dessous des barreaux. Puis, les yeux sortant de ses orbites, il se précipita vers elle et gémit :

-Pourquoi n'ont-ils pas mis de rhum ????????!!!!!!

Riant dans ma barbe, je mis mon chapeau sur mes yeux et me rendormis. La route vers England-Port risquait d'être longue.

Après une grande semaine épuisante de voyage, à dépérir dans la cellule, nous y arrivâmes enfin. Par les hublots de nos cellules, nous pouvions voir que c'était une journée magnifique et qu'un grand ciel bleu sans nuages brillait.
Nous ne patientâmes pas longtemps avant qu'un soldat en tunique rouge arrive pour nous sortir du bâtiment. Mais nous étions déjà près et l'attendions de pied ferme, bien décidés à ne montrer aucune faiblesse, même si j'avais du mal à me retenir de trembler car je souffrais le martyre à cause de mon bras gauche.
La perruque blanche ouvrit la porte rouillée qui grinça à cause de l'humidité et nous mit les fers sans grand ménagement. Il y avait à l'extrémité de ceux-ci une chaîne, qu'il tira derrière lui, nous promenant tels des chiens. J'avais horreur de cette impression.
Sur le chemin, Estee demanda au soldat, s'approchant de lui et souriant malicieusement :

-Dites, monsieur des perruques blanches...

Il prit un air totalement inoffensif et dit à voix basse, pendant que le soldat l'ignorait totalement :

-On est à la recherche d'un trésor très très précieux.

Puis Estee haussa le ton et déclara :

-On vous jure, par Neptune et sur mon honneur de forban sans foi ni loi, de vous en faire part de cinq pour cent si vous nous libérez !

Je me retins d'éclater de rire ; c'était ridicule. Mais le soldat en tunique rouge, lui, ne sembla pas trouver ça drôle. Il se retourna brusquement, envoyant par la même occasion son poing dans le nez d'Estee. Ce dernier, un peu sonné, fit mine de n'avoir rien senti, prenant un air noble comme pour imiter les perruques blanches :

Les Jumelles et l'Autre côté du Miroir (Hors Série) -TERMINE, EN CORRECTIONS-Où les histoires vivent. Découvrez maintenant