Chapitre 12

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Après deux longs mois de recherche épuisantes, nous n'avions rien trouvé.

J'étais désespéré. Neelya me manquait plus que tout, et même le doux parfum salé de la brise marine du soir ne pouvait soulager la fissure irréparable qui s'était logée à jamais dans mon cœur.

Je ne pensais pas que cela m'arriverait un jour de ressentir pareille émotion. J'étais seul. Totalement seul.

Je regrettais tellement de l'avoir prise comme prisonnière. Elle aurait connu bien meilleure vie sans moi.

J'étais seul sur le pont du haut, buvant du rhum seul, assis par terre exactement au même endroit depuis trois jours. A boire du rhum. Talon se montrait très compréhensif. Il allait me chercher une autre bouteille quand je finissais celle que j'avais, il donnait les ordres de recherche en faisant comme si il les transmettait, et prenais la barre, pendant que j'étais assis à côté, ruminant le passé et pleurant la perte de ma compagne.

Donc je lui étais très redevable.

Aujourd'hui, quand il arriva près de la barre comme depuis trois jours avec trois bouteilles à la main, je sortis une bourse de mon manteau marron miteux et la posai devant lui doucement. Il écarquilla les yeux de surprise :

-Mais enfin, capitaine, je ne peux pas...

Je murmurai de ma voix morte :

-Tu le mérites amplement, l'ami. Merci.

Je pris les bouteilles et ouvris la première. Je bus une gorgée. Même le délicieux goût du rhum ne faisait plus aucun effet. Je soupirai longuement pendant que Talon rangeait le précieux argent dans sa veste.

Il releva soudain la tête et s'écria :

-L'ŒIL DU LYNX !!!!!!!!!!!!!!! Il est là !!!!

Je me levais d'un bon à mon tour, sans même tituber, même après avoir bu autant de rhum. Étrange.

Et, en effet, le navire était là. Avec ses voiles marron. Le devant du bateau formait une spirale vers le haut et un drapeau inconnu ressemblant à une boussole flottait sur le plus grand des trois mâts, mais une chose me frappa ; sur les voiles, on pouvait voir tissé le symbole des pierres, comme sur mon tissu.

Je courus voir l'« homme » qui regardait le navire marron près du rebord, ses yeux bleus perçants scrutant celui-ci avec, comme toujours, une mine indéchiffrable. Je lui dit précipitamment :

-Tu vas lui demander ce que veut dire ce symbole ? Tu vas lui proposer notre marché ?

Il me répondit, commençant déjà à descendre du navire pour monter dans une chaloupe :

-Bien sûr. Je rentrerai avec la réponse et tu me donneras la Carte. Et aussi... Tu pourras demander à Darween si je peux rester avec vous ? J'aime bien votre équipage.

Cela me toucha, et j'acceptai, bien entendu.

-D'accord, mais si Jones refuse de nous donner la réponse ?

-J'utiliserai la persuasion.

Je faillis pouffer devant ce plan absurde, mais je me retins. Mon plan fonctionnait à merveille, même si la pitié commençait à prendre le dessus. Mon but était en réalité de conclure un marché avec Jones ; je savais d'avance qu'il se fichait bien des Cartes, il savait déjà tout. Ce qu'il voulait, c'était son fils. Je lui ramenait son fils, et je pouvais obtenir tout ce que je voulais de lui. L'« homme » partait juste pour attirer Jones, car si un de mes marins y allait, il se ferait tuer.

Je lui dis, pour l'encourager quand même, en tant que bon capitaine (j'avais donc pris les rênes du navire à la place de ma compagne) et pour lui faire croire à mon petit jeu :

Les Jumelles et l'Autre côté du Miroir (Hors Série) -TERMINE, EN CORRECTIONS-Where stories live. Discover now