ATTIRANTE

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Je retire ce que j'ai dit, je parle beaucoup quand elle n'est pas là et que je suis solo dans mes pensées, mais quand elle est sous mes yeux, j'ai juste le loisir de constater qu'elle m'est beaucoup trop attrayante.

Je me connais, je vais me faire autant de films qu'il y en a à l'affiche ce soir si elle continue à me satisfaire autant, tout en ne faisant strictement rien pour. Et je n'aime pas me faire des films. J'ai toujours préféré le concret.

À part ma première meuf au collège, je n'ai jamais autant dû charbonne une go que celle qui se tient devant moi. Et encore, on n'est pas vraiment explicite dans notre semblant de drague. Je ne la charbonne même pas. Enfin, pas suffisamment à mon goût. Ça glisse juste tout seul. Je m'auto-recale pour plein de trucs. Mais, c'est d'autant plus plaisant qu'elle se montre d'une certaine manière hors de portée. Ça a toujours été trop facile avec celles que j'ai fréquenté. J'aime aussi peu la facilité que me faire des films pourtant.

C'est un constat de baisé, la fluidité de nos échanges. Je l'écoute depuis le premier croc dans mon tacos m'expliquer son embrouille avec sa meilleure pote. Elle rajoute zéro artifice et cherche un peu d'humour à la situation. Je ne crois pas qu'elle aime montrer ses faiblesses. Ça m'a réellement suffit de voir qu'elle voulait me les exposer hier. Elle a ressenti le besoin de me faire ce vocal pour se décharger un peu, ça m'a eu comme il faut.

Je n'ai pas envie d'être égoïste pour l'instant, c'est clair. Je préfère la figue que le raisin et je la préfère elle qu'une autre. C'est la pierre précieuse du moment. À côté, les autres semblent n'être toutes que fugazis. Il faut que j'arrête de vouloir me saboter avant même qu'il se passe un truc. Je ne vois pas pourquoi j'envisage de la jouer avant-gardiste.

— tu m'écoutes ? m'interpelle-t-elle

Je me suis égaré de fou dans mes pensées. Je me reconcentre sur ses deux iris sombres qui me fixent.

— nan mais oui, j'me répéterai jamais assez, mais si Mekra voulait se taper ma soeur, je l'égorgerai sur place. Et inversement.

Elle échange toutes les cinq minutes ses jambes de place quand elle a trop froid à celle du dessus. Rachid a fermé le camion mais a laissé les tables et chaises sorties. C'est fou comme le non verbal en dit beaucoup sur une personne. A chaque fois qu'elle attend ma réponse, elle mordille très légèrement sa lèvre inférieure, sur son coin gauche. J'en conclus des choses.

Elle souffle bruyamment et parle beaucoup moins vite. Je le vois qu'elle est vraiment embêtée par la situation. Finalement, son para verbal aussi est objet d'analyse.

Mais ce qui me saute aux yeux surtout, ce sont ses oreilles qui deviennent toutes rouges à cause du froid et la parcelle de son cou qui est découverte de son écharpe. Elle remet quelques fois de courtes mèches de cheveux derrière son oreille droite. Son non verbal prime. Je n'arrive pas à chasser mes yeux de ces zones. Pourtant, j'essaye vraiment de m'impliquer dans la conversation comme je peux. J'ai des lacunes, c'est certain.

— j'fais quoi alors ? Je prends une hache ou j'y vais à mains nues ?

Auto-dérision appréciée. Son sourire en prime aussi.

— tu chopes comme ça, apporte-je vivement ma main à son cou, et tu serres.

— putain tu m'as fait peur là ! s'énerve-t-elle

Elle finit par défroncer les sourcils et tenter de retirer ma main qui s'est posée à plat sur ses clavicules. J'ai envie de la choper par le col et lui réchauffer moi-même les jambes.

— ça va, j'te remets ton écharpe en bonus. Si on peut plus aider ...

Les yeux levés au ciel, elle s'agite sur sa chaise en métal tout en zippant jusqu'en haut sa veste. C'est trop grave de détailler les gens comme ça. Même elle, semble avoir remarqué mon intérêt particulier puisqu'elle me frappe dans l'épaule.

Filer à l'anglaiseWhere stories live. Discover now