Chapitre 3

468 38 34
                                    

Il y a de ces moments dans la vie, où l'on se demande ce que l'on a fait pour se retrouver un jour là où nous sommes aujourd'hui. J'avais fait de ces moments supposément isolés une vie entière. Cette question me taraudait, m'interrogeait sur le sens de mon existence et sur pourquoi parfois je m'y accrochais désespérément. C'était ce que j'avais ressenti en me réveillant une nouvelle fois seul le lendemain du concert de Kim Taehyung, puis le jour suivant, puis tous les jours d'après. Parce que pour donner du sens à ma vie, j'avais besoin d'amour, et qu'on ne m'en donnait pas.

Durant les quatre derniers jours, j'avais fait des allers retours entre mon lit et mon piano, ma musique et mes pensées à me demander si tout cela avait un réel but. J'avais songé à m'en faire des nœuds au cerveau, jouer à m'en faire mal au doigt, puis au cinquième jour, j'avais enfin reçu un message et j'avais alors cessé de penser en boucle pour laisser de la place à la mélodie du coeur; celle qui se joue en silence dans la poitrine.

Après cinq jours d'absence, enfin je recevais un signe de vie de sa part.

"Viens répéter. J'espère que tu t'es bien entraîné."

Il ne m'avait pas fallu un mot de plus pour m'habiller, faire mon sac, me parfumer comme pas permis et descendre les interminables escaliers de mon immeuble pour le rejoindre. J'avais traversé tout Séoul pour arriver dans le quartier pavillonnaire où il résidait, le coeur battant un peu plus fort à chaque pas qui me rapprochait de lui. Mon cerveau tentait de me rassurer en me disant que s'il mettait cette distance entre nous, c'était pour que la lassitude ne s'installe jamais.
Mon coeur, lui, savait.

Lorsqu'il m'ouvrit la porte, il m'offrit un sourire chaleureux et m'embrassa si fort que j'eus un mouvement de recul, mais bien vite je me repris pour attraper ses joues de la paume de mes mains et intensifier nos retrouvailles sur le palier de sa porte. Dans ces moments, l'existence reprenait tout son sens, la vie toutes ses couleurs et le noir qu'abritait mon coeur devenait progressivement gris. Jamais blanc, parce que ces moments ne duraient jamais.

Lorsque la pression contre mes lèvres se relâcha, je laissai mon front reposer quelques instants contre son épaule, me raccrochant à chaque parcelle de sa peau. Il me laissa faire, l'air moins pressé que d'ordinaire et je profitai de cet instant rien qu'à nous. Ses mains caressèrent mon dos, et j'aurais presque pu m'endormir ainsi, debout, pour finir la nuit à laquelle la solitude, l'angoisse et la tristesse m'avaient arraché.

- Allez, entre. me dit-il en reculant délicatement et en me tendant sa main pour que je l'attrape à sa suite.

J'aurais tout donné si je l'avais pu, pour que ce moment dure encore rien qu'un petit peu plus après que l'on ait passé le pas de sa porte.

Je le suivis à travers le couloir sombre, ma main toujours emprisonnée dans la sienne. On arriva rapidement devant le bar où reposait une bouteille qui devait probablement valoir une fortune de par les cristaux qui en recouvraient la coiffe. Sur l'étiquette, je réussis à déchiffrer le mot "champagne". Il se saisit de la bouteille, lâchant mes mains et me la tendit avec douceur.

- Tiens, c'est pour dire pardon et merci.

Je l'attrapai d'entre ses doigts en observant le verre sous toutes ses coutures. La bouteille était noire et parsemée d'arabesques dorées, absolument magnifique et le vin à l'intérieur devait être le plus couteux et goûtu qu'on pouvait trouver sur le marché. Le problème, c'est que je n'aimais pas le champagne, et qu'au vu du nombre de fois où je lui avais refusé une coupe pourtant de haute gamme, il aurait dû le savoir mieux que personne.

Je le remerciai en posant la bouteille de nouveau sur le bar avec un sourire béat, car même s'il s'était trompé dans ce qui aurait pu me faire plaisir, il avait pensé à moi et il avait donné de son temps et de son argent pour ma personne. Peu importait ce qui se trouvait dans ses mains, tant qu'elles se tendaient vers moi, je ne pouvais être plus heureux. Il s'approcha de moi lentement, se décollant du bar avec des yeux espiègles et posa ses mains sur mes hanches, m'envoyant un frisson intraduisible dans tous le bassin.

𝐋𝐄 𝐕𝐈𝐎𝐋𝐎𝐍𝐈𝐒𝐓𝐄 ⁽ᵛᵏᵒᵒᵏ⁾Unde poveștirile trăiesc. Descoperă acum