Chapitre 8

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Contrairement à mes attentes, la réussite qu'avait été le concert ne nous avait pas rapproché Taehyung et moi. Bien au contraire. Désormais, il me laissait presque plus d'indépendance qu'avant et bien souvent, je pouvais passer des jours entiers à jouer sans le voir la moindre seconde. Ce mode de vie dura plus d'une semaine et vint le moment où je trouvais que ç'en était trop. C'était un lundi soir.

- Pourquoi m'avoir fait habiter ici s'il n'est jamais là ? demandai-je, allongé de tout mon long sur le canapé du salon, les mains dirigées vers le plafond.

Sohee me donna un coup de torchon en souriant.

- Redresse-toi et arrête de te plaindre. Tu n'imagines pas combien de gens aimeraient être à ta place.

Je restai allongé mais baissai les bras, sceptique.

- Ton contrat à toi, il se finit quand ? lui adressai-je.

Du coin de l'oeil, je la vis arrêter de frotter la table basse avec acharnement pour me regarder. Son sourire revint sur ses lèvres comme s'il avait le devoir d'y être.

- Quoi ? Tu veux déjà que je m'en aille ?

- Peut-être bien... dis-je, un sourire en coin.

Elle secoua la tête avec exaspération mais je la savais amusée. Elle continua de nettoyer la table en silence et je crus bien qu'elle n'allait jamais me répondre lorsqu'elle souffla tout bas.

- Dans deux ans.

Je me redressai.

- Tu vas le rompre ?

Cette fois-ci, elle cessa de sourire pour laisser place à une expression confuse, les sourcils froncés.

- Non. Bien sûr que non.

- Ça te convient, cette vie ?

Elle posa le chiffon sur la table pour venir croiser ses bras sur sa poitrine. Ses doigts délicatement vernis reposaient sur ses bras diaphanes. Son uniforme marquait la maigreur de son corps gracile et la pâleur de sa peau. Elle était belle, tellement belle.

- A quoi ça rime toutes ces questions ?

- Tu es quelqu'un d'intelligent. Tu pourrais être bien plus que gouvernante si tu le voulais.

Elle serra les pans de son pantalons, l'air sincèrement bouleversée par mes paroles.

- Arrêtes de dire des bêtises.

- Je suis sérieux. Tu pourrais trouver quelque chose de mieux pour toi.

Loin de moi l'envie de dénigrer son métier, je trouvai qu'il ne lui correspondait pas le moins du monde et qu'il aurait été gâcher ses capacités que de la laisser l'exercer deux ans encore. Elle me fixa avec la même expression contrite et souffla discrètement comme pour capituler.

- Tu sais Jungkook, parfois on se retrouve coincé dans une vie parce qu'on a fait les mauvais choix.

Elle se remit à sourire avec peine.

- Il est trop tard pour moi, j'approche des trente ans.

Je voulais lui rétorquer qu'il n'était jamais trop tard, qu'on pouvait toujours revenir en arrière ou prendre une autre route. Mais qui étais-je pour lui imposer des choix ?

Elle se retourna pour s'approcher de la fenêtre. Je sentais la fébrilité dans ses gestes lorsqu'elle effleura le carreau comme si elle était piégée dans une prison dorée.

- On m'avait promis une autre vie.

Je la laissai continuer, la gorge serrée par procuration. La façade qu'elle se donnait était belle, la réalité l'était bien moins. Je vis son poing se serrer contre la vitre et son corps se tendre.

𝐋𝐄 𝐕𝐈𝐎𝐋𝐎𝐍𝐈𝐒𝐓𝐄 ⁽ᵛᵏᵒᵒᵏ⁾Where stories live. Discover now