Chapitre 43

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𝘙𝘐𝘝𝘌𝘙
⊹ ࣪ ˖

Quand j'avais sept ans, l'école primaire avait organisé une kermesse où on devait venir en étant déguisés en héros.

Mes copains de l'époque sortaient leurs plus beaux déguisements. Les costumes tournaient autour des héros Marvel, et les enseignants avaient eu droit à une horde de « super héros » d'un mètre vingts. Moi, je ne voulais pas incarner un protagoniste tout droit sorti d'une bande dessinée. Je n'avais qu'un seul et unique héros : l'homme qui m'avait élevé.

Avant de perdre son travail à cause de son addiction, Papa était comptable. Mon amour pour les chiffres vient sûrement de lui. À chaque fois qu'il rentrait du bureau pour continuer son travail à la maison, j'avais l'habitude d'observer curieusement ce qu'il fabriquait sur son ordinateur. Parfois, quand il avait le temps, il me racontait ce qu'il faisait dans son métier et j'écoutais ses récits avec des étoiles dans les yeux. J'étais le seul enfant à me ramener avec une chemise rentrée dans un pantalon à pinces, une malette miniature et des mocassins. Sans oublier les verres de mes lunettes ressemblant à des couvercles de bocaux... Ce jour-là, j'avais l'impression d'être un vrai héros.

— Xander Stewart. Né le huit semptembre mille neuf cent quatre vingts dans l'Utah. Chômeur, marié civilement et père de deux enfants tous deux majeurs. Est-ce exact ?

Il hoche la tête en regardant dans le vide. Ses ongles ternes et mal coupés viennent gratter le tissu de son jean au niveau de ses genoux. Depuis le temps, il a perdu un nombre incalculable de kilos. Ses joues creusées et son corps flottant dans ses anciens vêtements peuvent en témoigner.

Je le regarde fixement, essayant de retrouver mon héros. À part ses traits qui me semblent familier, je dirais qu'une toute autre personne se tient devant moi ce soir.

Et ça fait tellement mal, bordel.

Bien. Messieurs, je suppose que vous savez pourquoi vous êtes convoqués devant moi aujourd'hui.

Maman avait glissé sa main dans la mienne. J'ai l'impression qu'elle va s'écrouler d'une minute à l'autre. Quant à ma sœur, elle est muette comme une tombe, et c'est souvent mauvais signe.

Je comprends bien trop vite que je dois être fort pour nous trois. Comme toujours.

Mes yeux se posent sur l'autre homme, doté d'une apparence largement plus soignée que celle de mon géniteur. Il a l'air de tout posséder, alors qu'est-ce qu'il fait ici ?

L'agent Gomez, un blond baraqué d'une trentaine d'année, lève enfin les yeux vers nous.

— Monsieur Di Laurentis, vous êtes suspecté de détournement de fonds par l'état de New York, une somme valant plus de dix millions de dollars. Quant à vous, monsieur Andreas, vous êtes reconnu comme complice. Selon l'article L. 121-6 du code pénal, sera puni comme l'auteur le complice de l'infraction. Vous serez tous deux mis en examens et vous avez tout à fait le droit de prendre en charge un avocat chacun...

La suite ne résonne plus dans mes tympans. Cette fois-ci, mon cœur éclate en mille morceaux, et c'est comme si ses débris venaient trancher mon être tels des éclats de verre.

La corruption m'écœure plus que tout au monde. Les magouilles, l'argent sale, le mensonge. J'ai pu supporter le monde ignoble des casinos et les diables que sont les jeux d'argent, mais pas le vol. Je refuse de croire que mon père est un voleur. C'est Xander Andreas, il n'est juste pas en possession de lui-même, mais il reste mon père. C'est impossible.

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