Chapitre 6

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Martin.


Le silence règne en maître dans l'appartement. C'est assez troublant. J'ai toujours été habitué au bruit : la télévision, les commentaires de mon grand-père, ma grand-mère à la cuisine, maman qui nous racontait les exploits des clients ou encore mes interminables discussions avec Thibaut. Mais jamais la solitude. Pas depuis l'abandon de mon père et que maman a décidé de retrouver sa famille à Montpellier, plus rien ne la retenait à Nantes, après tout. Je n'ai jamais été autant éloigné de mes proches, plus seul que jamais.

Je regrette presque la compagnie de celle qui m'a ramené ici. Marie, je crois. Ou Marine. Ou Marion. Je ne sais plus vraiment, je n'ai pas trop fait attention lorsqu'elle s'est présentée. Et aussi de l'autre folle avec son bouquin qui coûte un bras. Même si je n'intervenais pas, leurs voix brisaient le silence. Elles me tenaient en éveil avant mon plongeon dans ces futures journées qui s'annoncent fort bien monotones. Rester enfermé dans mon appartement à attendre les entraînements qui n'ont lieu qu'en soirée, voilà ce à quoi je suis cantonné. Un magnifique programme en perspective !

Mon téléphone sonne. Il rompt l'atmosphère pesante qui commençait à m'étouffer. Je plisse les yeux pour m'habituer à la luminosité de l'écran. Aucune surprise sur l'identité de celui qui appelle : Henry Besnard ou le directeur sportif de Montpellier. Je laisse échapper un bâillement avant de décrocher, encore à moitié endormi et toujours bien emmitouflé dans la couette. Au moins, je ne peux qu'admettre que le lit est très confortable !

De l'autre côté du cellulaire, il déblaie des banalités que je ne prends même pas le temps de relever. Des questions de formes pas principe, du style : as-tu fait bon voyage ? es-tu bien installé ? Je me contente d'écouter d'une oreille, ma tête reposant contre le mur. Assis sur le lit, les jambes étirées, mon regard traîne à travers la pièce. Petite, sans décoration, juste une penderie, une table de chevet et le lit. Sinon, le vide. Comme ce que je ressens actuellement.

Je m'efforce du mieux que je peux pour me reconcentrer sur les paroles de l'homme. Si je me montre agréable, peut-être sera-t-il plus clément ? Je rêve certainement, mais l'espoir fait vivre.

— Martin, comme tu le sais, tu vas jouer avec Nousty, me rappelle-t-il.

Oui, jusque-là rien de nouveau sinon je ne me retrouverais pas à moisir dans cette chambre, ici.

— J'ai eu une discussion avec Sylvain pour les derniers détails de ton arrivée et il m'a appris que leur entraîneur des moins de quinze a dû partir, laissant l'équipe sans personne, explique-t-il.

Oui, et ? C'est dommage pour les jeunes, mais je ne vois pas du tout en quoi cela me concerne.

— Et je lui ai dit que tu accepterais avec joie de les coacher. Ce serait une bonne expérience pour toi. Et aucun refus n'est toléré.

Sérieusement, à quel moment ai-je une gueule à entraîner des gosses ? Jamais. Ce n'est tout simplement pas fait pour moi. Alors pourquoi dois-je reprendre ce « job » ? Si l'ancien coach a décidé de se faire la malle, il devait sans doute avoir une excellente raison qui ne justifie pas son remplacement par moi. Je soupçonne presque que c'est une mise en scène, mais je dois me faire des films, ils n'iraient tout de même pas jusque-là ? Je doute. Mais ça n'empêche que ce n'est pas de mon ressort de les entraîner. Je suis joueur et seulement joueur, je n'ai pas la capacité d'enseigner quoi que ce soit à qui que ce soit, encore moins des jeunes.

— Pas la peine de souffler, Martin, me réprimande-t-il. Si tu coches les cases et que tu participes au bon fonctionnement du club, tu pourras rentrer plus vite et retrouver le parquet de René-Bougnol.

Heart MatchWhere stories live. Discover now