Chapitre 22

58 8 71
                                    




Martin.


Concentré sur l'enchaînement, c'est comme si plus rien n'existait désormais autour de moi. Entre les discussions que j'ai eues la semaine dernière et l'après-midi avec Axelle, j'ai réussi à me reconnecter avec moi-même. Retrouver cette flamme que j'ai pendant longtemps perdue. Je sais que j'ai déconné. Je ne pourrais pas faire marche arrière sur ce point. Mais je compte bien montrer une autre facette de moi. Celle que mes proches connaissent. Pas celle qui me colle à la peau lors des rencontres.

— Dernier tir avant une séance de pénalty pour terminer ! crie Sylvain du banc de touche.

À ce moment-là, le ballon est en possession de l'équipe adverse, dirigée par Elie d'une main de maître. Bien qu'il n'y ait aucun enjeu à l'issue de l'affrontement, je n'ai aucune envie de conclure sur un but encaissé. L'attaque est incapable de trouver une ouverture. Les joueurs se contentent de faire circuler la balle, sans tenter une percée. Dans un match officiel, les arbitres auraient déjà très probablement levé le bras pour jeu passif, mais là, l'entraîneur laisse couler.

J'anticipe. Peut-être que ça nous coûtera le but, mais qui ne tente rien, n'a rien, non ? Je m'avance sur la passe d'Elie à l'arrière devant moi. Sur le bon timing, je parviens à intercepter difficilement le ballon. Il roule sur le côté quand nous nous jetons tous les deux pour le récupérer. Une bataille s'installe pour établir le vainqueur de ce trophée imaginaire. J'arrive à mettre la main dessus et le renvoyer à un de mes coéquipiers disponibles. La contre-attaque est lancée. Toujours à terre, j'observe le sportif dribbler jusqu'aux cages opposées. Un. Deux. Trois pas. Il saute face au gardien. Sans réfléchir, comme si le but scellerait une véritable rencontre, il tire avec détermination pour remporter la victoire.

Les deux coups de sifflet emplissent le gymnase vide validant le but avant de sonner une nouvelle fois pour clôturer l'entraînement.

— Belle interception, me félicite Arthur.

Une main tendue vers moi, j'accepte avec plaisir son aide pour me relever et récupère mon ballon pour la séance de pénalty.

— À élimination, et ceux qui perdent se mettent en gainage en attendant, annonce le coach.

Des soupirs de protestations s'élèvent. C'est injuste pour ceux qui partiront les premiers, mais en même temps, ça pimente un peu le jeu que de faire de simples tirs sans enjeux.

— Forcément, tu t'en fiches, tu finis toujours dans les derniers, si tu gagnes pas, grommelle Arthur.

— Je suis le meilleur aussi, non ? le charrié-je.

À la file indienne, j'attends mon moment de gloire. Les tirs se succèdent. Les buts s'enchaînent bien qu'un ou deux ballons sont détournés par le goal. Mon tour vient enfin. Je réalise un dribble avant de placer mon pied droit sur la ligne des sept mètres. Je m'agrandis au maximum, le bras gauche armé pour marquer. Aucune autre possibilité n'existe. Sans me prendre la tête, j'effectue un tir simple, mais efficace qui termine au fond des filets. Juste après moi, Arthur tente sa chance. Bien parti, le ballon poursuit pourtant sa course sur le poteau. Sans être rentrant.

— Râle pas, la prochaine fois c'est la tienne, le taquiné-je en me replaçant parmi ceux en liste encore.

Les tours s'accélèrent, les gardiens parviennent à éliminer de plus en plus de joueurs pour que nous ne soyons plus que deux. Toute l'équipe est en gainage, à l'exception d'Estéban et moi. Je dois reconnaître qu'il a un bon niveau et ses pénaltys ont de quoi terrasser les meilleurs goals. Pas pour rien que les finales se finissent régulièrement entre nous. Il est le premier à se lancer. Une première feinte à droite avant de laisser le ballon en pleine lucarne gauche. Vraiment pas mal. J'évalue les possibilités qui s'offrent. L'option la plus sécurisée ? L'option risquée ? J'hésite. En même temps, j'ai envie d'assurer un tour suivant, mais le beau jeu, ne serait-il pas mieux ?

Heart MatchWhere stories live. Discover now