Chapitre 19

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Martin.


— Martin Thiago Gomez, que vais-je bien faire de toi sérieusement ?

J'entends ma mère soupirer à l'autre bout du fil. Je la laisse divaguer, éloignant au maximum le portable de mon oreille. Je ferme les yeux un instant. J'ai seulement besoin d'une minute de répit. J'ai déjà eu les remontrances de Henry juste avant, ce n'est pas pour continuer avec celles de ma mère.

— Chéri, cette annonce était importante pour toi, pour Thibaut, commence-t-elle en adoucissant sa voix. Mais tu ne peux pas garder ce comportement. Oui, c'est dur, mais la vie de sportif professionnel est faite de haut et de bas.

Je le sais. J'ai envie de lui répondre, mais mes mots se bloquent dans ma gorge. Je suis incapable de sortir le moindre son de ma bouche.

— Tu ne peux pas te permettre de tout foutre en l'air. Pas après les nombreux efforts que tu as fournis. Je suis ta mère, je serais toujours là pour toi, mais tu n'as pas le droit d'agir à ta convenance et de la sorte.

— Et je suis censé faire quoi ? murmuré-je difficilement.

— Accepte une fois pour toutes que quoi que tu fasses, ton nom soit associé à celui de ton père. Joue ton jeu sans te soucier des autres, fais-toi plaisir. Prouve au monde qui tu es réellement.

— Plus facile à dire qu'à faire.

— Et surtout, ne repousse pas ceux qui te soutiennent ou veulent te venir en aide. Sylvain est là pour toi, Julien aussi. Ils savent ce qui est bon pour toi. Cette fille aussi, sinon elle ne se serait certainement pas occupée de toi. Ces jeunes que tu entraînes, ils ont autant besoin de toi que tu as besoin d'eux. Alors tu vas me faire plaisir et tu vas te bouger un peu !

Elle poursuit ses encouragements sans que je ne puisse en placer une. Mais ce n'est pas comme si je souhaitais en ajouter une couche. J'ai conscience que mon comportement avec l'équipe était infect. Ils n'ont pas mérité que je passe mes nerfs sur eux. Axelle non plus. Pourtant, je n'ai pas pu m'empêcher de les dévaloriser.

— Je veux rentrer à Montpellier... vous me manquez...

— Cela ne tient qu'à toi tinou.

J'esquisse un sourire au surnom que ma mère me donnait quand j'étais plus jeune.

— Et si Henry se rendait compte que le club n'avait pas besoin de moi ? Que je devrais rester ici ? m'inquiété-je.

— Tu as ta place dans l'équipe. Il n'aurait jamais autant insisté pour te garder sinon. Il attend juste de toi que tu deviennes plus responsable pour pouvoir vivre l'expérience à fond. Tu comprends l'enjeu ?

— Je ne sais même pas par quoi commencer, m'man.

— Excuse-toi déjà auprès des jeunes. Donne-leur confiance en eux, ils feront ressortir le meilleur de toi.

Nous poursuivons encore quelques minutes la discussion avant qu'elle ne raccroche. J'observe un instant le fond d'écran de mon téléphone. C'est une vieille photo avec Thibaut à la suite d'une finale remportée. Nous étions tous les deux avec le trophée et nos médailles, accompagnés de ma mère pendant que mon grand-père prenait ce cliché. Je reste accoudé au rebord de mon balcon. Je laisse mon regard se perdre au milieu des montagnes au loin.

Je ne peux m'empêcher de me demander ce que ferait mon père dans cette situation. Aurait-il craqué ? Évidemment que non. Il se serait contenté de fuir comme les journalistes n'ont pas cessé de dire après son départ inexpliqué. Il n'assumerait pas ses potentielles erreurs. Peut-être que je lui ressemble plus que je ne le souhaite. Que je suis plus lâche que Axelle en refoulant et remettant toujours la faute sur les autres.

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