• Chapitre 23 • PC

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Gabriella

Talonnée par Connor, j'avance dans mon salon et retire mes baskets que je lance dans un coin de pièce. Connor referme la porte dans son dos et ricane lorsque Lilymoon accourt dans la pièce pour escalader le canapé. C'est renversant qu'un Calupoh se balade en ville, un cachorro qui plus est !
Les gens ont tendance à croire qu'ils portent malheur, un peu comme les chats noirs, elle a eu de la chance de tomber sur Connor, je parie qu'il sera un très bon maître pour cette boule de poils.
— Tu veux boire quelque chose avant d'effectuer tes tâches ? Je demande, hardie.
— Mes tâches ?
L'un de ses sourcils se dresse et je lance un regard aux nombreux cartons qui espèrent être ouverts et déballés. Ses lèvres se séparent et il me jette un œil offusqué.
— Tu te sers de moi pour jouer Bob le bricoleur ?
— J'aime bricoler les voitures, pas les meubles...Alors, oui je me sers un peu de toi...
— Dans ce cas, sers-moi un verre de whisky.
Je roule des yeux, amusée par sa bouille narquoise et file dans la cuisine pour mettre la main sur un verre et ma très chère bouteille de Abasolo à peine entamée.
— Que comptes-tu faire pendant ce temps ?
Il apparaît dans mon dos et s'appuie contre le plan de travail, les bras croisés.
— Te mater évidemment. Badine-je.
— Suis-je bête, tu es une véritable nympho.
— Ah ! Ça c'est comique, monsieur Howard ! (Je rigole, puis comprends ma boulette.) Euh...enfin je veux dire Brown...
Je glisse le verre sur le bois laqué et lance une œillade à Connor qui reste de marbre.
— Ce n'est pas grave tu sais, tu peux m'appeler Connor Howard.
Le malaise s'installe et je demande, curieuse ;
— Pourquoi as-tu voulu prendre le nom de ta mère ?
Il prend une inspiration, comme s'il hésitait à m'en parler puis il pince les lèvres et relâche les épaules.
— Parce que j'avais besoin de changement, ma famille est populaire en Amérique alors c'est plus simple d'utiliser le nom de ma mère pour passer incognito
Sa mère, Lily.
J'ai tellement de questions à lui poser à ce sujet mais je crains qu'il me rejette, de peur de rouvrir une blessure. Cependant, j'ai besoin qu'il me parle, j'ai besoin d'en savoir un peu plus sur lui...
— Connor, je peux te demander quelque chose ?
— Oui, bien sûr ?
Il prend son verre de whisky et en avale une goulée, comme s'il savait que j'allais lui poser une question risquée.
— Pourquoi tu ne me parles pas de ta mère ?
Ses lèvres rosées s'entrouvrent et il semble se perdre dans les rayons de son esprit.
— J'en sais rien, elle n'est plus là...j'ai pas grand-chose à dire à son propos.
— J'aimerai bien que tu m'en parles des fois...
Ses yeux bleus se fondent dans les miens et j'ai tout de suite peur qu'il fasse machine arrière.
— Tu aimerais savoir quoi ?
— Ce que tu veux...sifflé-je.
Il inspire amplement et lance son regard dans un coin de la pièce.
— Elle est morte quand j'avais 4 ans, mon frère en avait 6. J'étais jaloux qu'il l'ait connue plus que moi mais au final, je me souviens pas d'elle.
Je l'écoute, les doigts accrochés au meuble, comme si mes genoux risquaient de lâcher à tout instant.
— J'ai toujours cru qu'il s'agissait d'un simple accident de la route, le destin. Mais, mon frère m'a appris qu'elle avait été assassinée par un homme qui était raide dingue d'elle. J'ai cru que ça m'énerverait, que j'allais être fou de rage mais, rien. Je n'ai rien ressenti, après tout je ne me souviens pas d'elle, hein ?
Son regard translucide frappe le mien et je ne peux m'empêcher de murmurer :
— Je suis désolée, Connor...
— Ne le sois pas, c'est du passé maintenant.
Un sourire déchiré naît sur son visage.
— J'en ai pas l'impression. Tu en souffres encore, je me trompe ?
Il déglutit et comme si ça lui arrachait le cœur, il échappe ;
— Il m'arrive de rêver d'elle. En particulier une journée que l'on a passé à la mer, le début est toujours joyeux puis...son visage se met à disparaître et la mer m'emporte. Voilà pourquoi j'ai une peur bleue de l'eau. Finit-il, en un sourire moqueur.
— Je vois...
De nouveau, il avale une gorgée d'alcool et dépose son verre bruyamment sur le bois. Puis, il s'oriente de mon côté et égare :
— À ton tour.
Mon tour ?
No. Dis-je, subitement.
Ses deux perles bleutées s'obscurcissent et c'est comme si elles se mettaient à me supplier.
— Mes parents sont ignobles, Connor.
— J'aimerais que tu m'en parles, que tu me parles d'eux pour que je puisse un peu mieux te comprendre.
Son regard encourageant me fait flancher.
— Eh bien, commencé-je. Jamais je n'aurais cru qu'il serait possible d'haïr des gens à ce point. Depuis que je suis enfant, ils ont toujours voulu nous contrôler Charlie et moi. Jusqu'à choisir nos tenues...Ils ne cessaient de nous rabaisser, de nous faire culpabiliser sur les minimes erreurs que nous faisions. Charlie a quitté la maison à 18 ans et m'a laissé avec eux et...sans elle, ça était encore plus difficile.
Je prends une forte inspiration, comprenant que cette partie est sûrement la période la plus difficile de ma vie.
— Chaque faux pas, chaque paroles de travers devait se régler par des cris, des pleurs jusqu'à parfois en venir aux mains. Pendant longtemps j'ai pensé que c'était une forme d'amour. Tu obéissais, ils t'aimaient encore plus...C'est en venant ici, à Mexico que j'ai découvert ce qu'était le véritable amour. Mes grands-parents m'ont fait découvrir l'amour, le vrai et puis, Nonno est mort et j'ai cru que j'allais mourir de chagrin. Mais, je devais être là pour Nonna, tu comprends ?

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