Iolass

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Mission accomplie ! Le garde endormi ou mort, peu m'importe, Alia a le champ libre. Je sais déjà que je ne la verrai pas. Elle est trop habile pour laisser ne serait-ce qu'un doute aux vigiles des remparts. Je pense bien que les Hyksos ne sont pas sa principale préoccupation. À mon avis, ne pas être surprise par une vassale d'Hippolyte est bien plus primordial à ses yeux. Je ne m'éloigne pas. Dans la mer, j'ai l'avantage. Aucune vie alentour, aucun mouvement n'échappera à ma vigilance. Pourtant, elle est difficile à saisir. Je me concentre davantage, me rappelant soudain les mots de Baal : « elle n'a pas d'âme ». Pas d'âme, peut-être, mais pourquoi son essence vitale m'est si difficile à percevoir. Enfin, je la toruve. Elle y est. Son cœur accélère, trahit d'une fébrilité nerveuse sa présence. Pourquoi a-elle insisté pour visiter ce navire ? Quel rapport avec les événements de la soirée ? Cela semble essentiel, presque vital. Je me perds en conjecture. Elle ne reste pas sur le pont, elle descend vers la cale. Je perçois ses déplacements. C'est extrêmement imprudent. Les rameurs sont enchaînés à leur banc. Je distingue leur souffle épuisé mais ils ne désobéiront pas pour autant à leurs maîtres. Elle sera découverte. Elle se ravise. Je le préfère.

Soudain un murmure vague d'abord, plus intense rapidement, hostile presque, gagne les remparts. Les gardes se raidissent à leur poste mais leur attention se porte vers la cité ? Que se passe-t-il ? L'eau me le dira. Une telle crispation remplit l'atmosphère. On dirait... Oui. Son esprit double et fourbe ne peut me tromper. Un moment d'hésitation. Oh non, voilà l'imprévu. La suite hyksos. La petite soirée au palais est achevée. Ils vont arriver, rejoindre leurs navires. Comment la prévenir ? Ce n'est pas une atlante ; une simple vibration dans l'eau aurait suffi. Elle l'aurait avertie. Un atlante ? Oui, bien sûr. Un atlante ! J'essaie. Après tout ! Même si cela ne doit marcher qu'à moitié.

Je glisse vers la poupe du navire. Juste sous la surface, j'attends. Il faudra sauter et nager. Elle n'aura pas d'autre possibilité de fuite. Deux cris déchirent le silence. Des aigles ! Deux ! Ils volent en cercles répétés. Naturellement, je tourne mon attention vers la trirème de Méphistès. Il est sur le pont, bras négligemment tendu à l'horizontal. Un aigle vient sur sa main, un autre sur le bastingage, calme, tranquille. Je considère que c'est sa manière de m'aider. Ça a marché : Alia, elle, s'agite. Pas le moment de paniquer. Les gardes là-haut se tendent trop à mon goût. Mais le roi et sa suite montent sur le pont comme si de rien n'était. À l'arrière de la tente royale, elle apparaît, enfin ! Le roi parvient à ses quartiers. Alia a du être efficace, rien ne les intrigue mais pour combien de temps, peu de temps ? Des rires bruyants emplissent les conversations éméchées. Je me montre. Qu'elle saute ! L'eau est la seule voie de fuite. Elle avance, se penche... Et non ! Elle recule. C'est stupide !

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