Dis-moi.

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J'ai tenté de ne pas penser à toi, aujourd'hui. Je suis sortie avec une amie, tentant, mal comme bien, de t'oublier. En réalité, je n'avais qu'une idée en tête, qu'une idée qui tournait inlassablement dans mon crâne au milieu de la gelé gluante qu'est devenu mon cerveau, qu'une unique idée : « je voudrais qu'il soit avec moi ». Chaque pas de ma route, j'aurai voulu le faire avec toi. Chaque bouché de mon repas, j'aurai voulu les avaler assisse, près de toi. Chaque parole de mes discours, j'aurai voulu les prononcer pour toi. Tu me manques, tout me manque : nos promenades, nos discussions, nos rigolades.  Tu as été le seul au monde avec qui je me suis le mieux entendu. Je me suis souvenu d'un poème. D'un poème que j'avais écrit, longtemps avant. Je l'avais écris pour toi et aujourd'hui, je n'avais de cesse d'en réciter les lignes dans mon esprit. Ma mémoire s'accrochait au souvenir de cette prose morose avec une intensité surprenante. Je n'ai de cesse de penser à toi, je me perd dans ton rappel, me noie dans ton souvenir et m'ennuie de ton manque. Ton souvenir m'obsède tant ! le désir me dévore tant ! de l'intérieur ! de l'extérieur ! dans ma tête ! dans mon ventre ! comme un serpent de feu nageant avec mon sang. Je veux retrouver notre entente, je veux te retrouver !

Seulement, je t'ai perdu. Dis-moi pourquoi, s'il te plaît. Pourquoi la terre avait les traits de ton visage ? Pourquoi le ciel avait la couleur de tes yeux ? Pourquoi les nuages avaient la douceur de tes cheveux ? Dis-moi, s'il te plaît. Dis-moi que le monde ne s'éteint pas, comme plongé dans une obscurité profonde, lorsque tu fermes les yeux. Dis-moi que le monde ne suffoque pas, comme dans des vapeurs bouillantes, lorsque tu as le souffle coupé. Dis-moi que le monde ne reste pas assis, les genoux chevrotants et les jambes brisées, lorsque tu boites. Dis-moi, s'il te plaît. Dis-moi que le monde existe sans toi, que la terre tourne sans toi, que ma vie continue sans toi. Dis-moi que je peux vivre sans toi. Dis-moi, s'il te plaît.  La vérité est que je ne sais comment est le monde quand tu n'es pas là.

Il me semble que je dois réapprendre à marcher sans avoir à te tenir la main. Je dois savoir dompter, de ma seule poigne, ces démons qui me hantent sans la musique de ta voix qui les envoutait, les charmait, comme Orphée savait enchanter Cerbère avec sa lyre. Tu m'as appris à m'aimer avant que je n'en sois tout à fait capable. Je me fais désormais confiance pour allumer ma lumière, me guider, seule, à tâtons, doucement, dans l'ombre que tu as laissé derrière toi, maintenant que tu n'éclaires plus mon chemin. Je me fais désormais confiance pour marcher, seule, désormais que tu as lâché ma main.

Cœur briséOù les histoires vivent. Découvrez maintenant