Chapitre 10

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- « Méduse ! Nous tenons ta complice ! Viens et nous ne lui ferons aucun mal ! »

Je ne pouvais pas faire grand-chose. La lame de Persée était toujours chaudement nichée au creux de mes artères. J'entendais Minoas cracher à Paris d'un ton dédaigneux.

- « De toute façon je tuerais cette garce si elle survit au combat. Elle nous a trahi, elle ne mérite pas de vivre »

Je serrais la mâchoire en pestant contre ces abrutis. Ils ne méritaient pas ma colère. J'entendais le bruissement caractéristique que faisait ma compagne sur le sol. Elle se rapprochait. Je tentais le tout pour le tout.

- « Ne viens pas Médusa ! Ils ne te trouveront pas dans les tréfonds du sol. Pars, cache-toi. Je n'en vaux pas la peine. »

Le sifflement furieux des serpents me répondit, ils n'étaient pas ravis de ma requête. Les guerriers avaient décidé de se placer dans une pièce vaste et dégagée afin d'avoir le champ de vision le plus dégagé possible. Ils avaient l'avantage du terrain et du nombre. Mais Médusa était immortelle, un point non négligeable dont les autres n'étaient pas au courant.

La voix de Médusa résonna, impériale.

- « Comment osez-vous prendre ma compagne pour otage misérables mortels ? Je vous transformerai en pierre pour ça, vous ornerez les couloirs de mon palais pour l'éternité. »

Je claquais ma langue, inconfortable. Si elle ne venait pas non plus ouverte au dialogue tout ça se dirigeait inexorablement vers l'affrontement. Je me débattais dans la prise de Persée mais la lame s'enfonçant dans mes chairs me calma.

- « Tout va bien Oria. Je vais te sortir de là. »

- « Rien de ne va se passer comme tu le veux Méduse. Je ramènerais ta tête à Edari et nous récupèreront nos terres. »

La tension qui régnait pouvait se couper au couteau. J'étais anxieuse.

Puis Paris et Minoas poussèrent un cri et chargèrent. Persée me jeta au sol et attaqua à son tour. Mes sens étaient complètement submergés par les hurlements, le fer claquant contre le sol et le sifflement des serpents. Je tâchais de me défaire de mes liens. Après avoir tiré quelques secondes, la corde céda mais je ne pouvais pas me résoudre à partir. À la place, j'essayais de me cacher derrière un muret encore debout.

Le bruissement du métal m'emplissait la tête et m'empêchait de penser correctement. Je n'arrivais pas à suivre ce qu'il se passait. Il eut une pause dans les affrontements. Je retins mon souffle avant qu'une voix familière ne parle.

- « Tes deux camarades sont devenus des statues héros. Pars et je te laisserai la vie sauve. »

La voix de Persée tonna, rageuse.

- « Plutôt mourir. »

Médusa fit claquer sa langue avec agacement.

- « À tes risques et périls. »

Et le combat repris de plus belle. Le claquement du fer, les bruits de chair tranchée me donnaient la nausée. Deux personnes que j'aimais plus que tout était en train de s'entretuer.

Le silence se fit à nouveau maître mais il fut cette fois accompagné d'une odeur amère. Celle du sang. Beaucoup de sang, beaucoup trop de sang. J'appelais avec horreur.

- « Médusa ? »

Mon cœur s'écrasa sur lui-même quand ce ne fut pas elle qui me répondit.

- « Elle est morte. Tiens. »

Il me jeta quelque chose de lourd et puant le sang. Mes mains se posèrent dessus et mon palpitant remonta aux bords de mes lèvres.

Une tête.

Sa tête.

Ses serpents de bougeaient plus, ses yeux étaient ouverts dans une expression surprise. Je poussais un cri en la serrant contre moi. Les larmes me piquèrent les yeux. Je ne pouvais pas y croire. Pas elle. Elle était si forte, pourquoi elle ? Comment est-ce que tout cela avait pu arriver ? Hier encore je dormais entre ses bras alors pourquoi est-ce que sa tête était là entre les miens. Des gémissements de douleurs s'échappaient sans discontinuer de mes lèvres. Je hurlais à Persée.

- « POURQUOI !?? VOUS AURIEZ TOUS PU REPARTIR EN PAIX ALORS POURQUOI ? »

Je sentis le regard pesant de mon ami sur moi. Il prononça d'un ton à mi-chemin entre la douleur et le dégoût.

- « Alors tu l'aimais vraiment. »

Les sanglots me secouaient avec violence, je n'arrivais pas à calmer le tremblement de mes mains.

- « Elle m'écoutait, j'étais une personne à part entière pour elle. J'étais plus que mes yeux ! »

- « Pour moi aussi tu étais plus que tes yeux ! Tu étais bien plus que ça ! »

Je secouais la tête avec désarroi et colère.

- « Tu as toujours préféré le village à moi Persée, et je ne t'en veux pas. Tu avais tes responsabilités mais elle m'a mis avant tout. Je suis sa priorité ! Et elle est la mienne ! »

- « Plus maintenant. »

La fureur de ses paroles me fit frissonner. Il était hors de lui.

- « Je vais te tuer pour que tu sois avec cette créature que tu aimes tant. »

La terreur prit le pas sur les autres émotions. J'essayais de m'éloigner de lui mais j'étais toujours au sol avec la tête de mon aimée entre les mains. Fatalement, il se plaça juste devant moi, probablement brandissant son épée et cracha avec une certaine peine.

- « Adieu Oria. Je t'aurais toujours aimé. »

Je n'eus pas le temps de comprendre ces paroles et fit la première chose que mon corps me laissa faire. Je brandissais la tête de Médusa devant moi.

Une seconde passa.

Puis deux.

Puis trois.

Et la douleur ne vint jamais. J'appelais d'une petite voix.

- « Persée ? »

Rien.

Je me redressais maladroitement et allais vers lui.

- « Persée... ? »

Toujours rien.

J'avançais encore et rencontrais quelque chose de dur. Ma main se posa dessus. J'eus un mouvement de recul. C'était le corps du héros. Il était froid comme la pierre. Mes doigts se posèrent sur son visage. Une larme de pierre roulait dessus, figée pour l'éternité. Malgré tout il était en position de combat. Il m'aurait tuée si le pouvoir de Médusa n'avait pas fait son travail.

En parlant d'elle, je sursautais. Entre mes mains, les serpents avaient recommencé à se mouvoir. Une pointe d'espoir me secoua. Je cherchais de manière erratique autour de moi.

- « Médusa, où es-tu ? Aller ça ne peut pas se finir comme ça ! »

J'avais beau chercher je ne la trouvais pas. Des larmes de frustrations me montaient aux yeux. Je maudissais ma vision quand soudain une main se posa sur mon épaule. La voix de Kalomi résonna.

- « Elle est juste là. Viens. »

Encore une fois Kalomi me guida dans le noir. Elle me porta aux côtés de Médusa étendue sur le sol. Nous la plaçâmes sur le dos et repositionnait sa tête sur ses épaules. Je pris sa main entre la mienne et l'implorait mentalement de me revenir.

Le temps passa. Au début rien. Puis une légère pression dans la paume et enfin des bras autour de mon corps. Mes larmes coulaient à flots, cela faisait trop d'émotions fortes pour la journée.

Mes mains trouvèrent son visage et je l'embrassais passionnément. Elle me rendit l'étreinte avec pareille envie. Je lui murmurais.

- « Ne fais plus jamais ça. »

Un petit rire résonna de sa gorge.

- « D'accord. »

Venatio Medusae (FxF)Where stories live. Discover now