Chapitre 26 : Souffrances passées

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62 av J.C

Et chaque fois la même souffrance intense, le même désespoir. 

Je maudis ce Destin qui m'a fait naître.
Que quelqu'un m'aide, je vous en supplie..

Delphes, Grèce. 13 octobre 42 av. JC.

Le temple d'Apollon à Delphes était une splendeur architecturale, orné de colonnes majestueuses et de sculptures représentant les dieux de l'Olympe. Anthea, était assise sur un trône d'or. Elle portait une robe blanche aux drapés élégants et ses cheveux noirs, entrelacés de feuilles de laurier d'or, encadraient un visage aussi jeune qu'ancien.

Les prêtres et les prêtresses s'étaient rassemblés, formant une procession solennelle. Les fidèles attendaient à l'extérieur, impatients de recevoir la sagesse de la Pythie. Ils croyaient qu'elle était la voix d'Apollon lui-même, celle capable de leur prédire l'avenir.

Anthea le savait trop bien. Cela faisait déjà six ans qu'elle était enfermée ici, depuis ses 14 ans. Veillée, gardée jalousement par des guerriers vêtus de tuniques pourpres, recouvertes de cuirasses d'or, portant avec majesté la chlamyde longue, et serrant dans leur poing la lance de métal doré. 

Elle ne pouvait pas s'échapper et maudissait le jour où elle était née, vingt ans plus tôt, jour pour jour. 

La journée allait commencer. Interminable journée, semblable à toutes les précédentes, à toutes les suivantes. Et pourtant, aujourd'hui, elle serait éprouvée plus encore.

Les portes du temple s'ouvrirent et le soleil jaillit dans la salle, illuminant les dalles blanches, parfaite. L'air méditerranéen porta aux narines de la jeune femme une douce odeur de vent chaud et de nourriture. 

Dire que derrière ces portes résidaient la seule chose à laquelle elle aspirait. La liberté. 

Nombreux sont ceux qui la disaient chanceuse. Après tout, elle vivait dans le même luxe que l'empereur romain, là-bas, dans son palais de Rome. Depuis que la Grèce avait été conquise par l'empire romain, elle composait la région d'Achaïe. Les temps étaient plutôt calmes, même si la guerre civile en Italie se répercutait un peu ici, en Grèce.

Anthea appuya son menton sur sa main et regarda la jeune fille vêtue de blanc, en bas des marches de son trône. Elle dansait. Merveilleusement, certes mais la Pythie se demanda quel âge elle avait.. 13 ans ? 14 peut-être ? À peu de choses près, l'âge auquel sa vie était devenu un enfer de luxe et de confort. 

Ah.. dormir sur le sol dur. Fuir les pieds en sang sur les collines entourant Delphes.. la joie de sentir la pluie s'abattre violemment sur sa peau trop douce qui ne connaissait pas la rude réalité de la vie.  

Un couple royal s'approcha de la Pythie, des couronnes d'or brillant sur leur tête. C'étaient Laïos et Jocaste, le roi et la reine de Thèbes. Leurs visages étaient empreints d'une profonde inquiétude, la même qui hantait tant de visiteurs venus la consulter.

Anthea, ferma les yeux un instant, se laissant envahir par les visions qui l'assaillaient. Elle voyait le destin d'Œdipe, une tragédie qui allait secouer la Grèce.

C'était l'heure du spectacle.

— Ô, noble couple, roi Laïos et reine Jocaste, dit-elle d'une voix grave et lointaine. L'avenir me révèle des horreurs. Votre fils, Œdipe, tuera son père et épousera sa mère. Ce sera un acte de malheur et de désespoir, apportant une calamité sans précédent à votre royaume.

Rome au crépusculeWhere stories live. Discover now