Maël

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Cela faisait maintenant trois jours qu'Amandine s'était enfermée dans la pénombre de sa chambre. Elle n'était pas retournée au ministère depuis, et ne faisait plus la différence entre le jour et la nuit.
Elle refusait de laisser entrer Annette pour lui expliquer ce qui s'était passé.
Elle se laissait seule avec ses idées noires.
Elle réévaluait la situation. Son corps ne s'était pas remis du choc qu'elle avait subi, elle ne cessait pas de trembler et de claquer des dents. Ses bras étaient rouges et le sang s'était transformé en croûtes disgracieuses.
De sa vie entière, elle n'avait jamais eu aussi peur. Elle avait peur pour sa vie.

C'était la deuxième fois que cela arrivait. Il lui avait pourtant assuré que cela ne se reproduirait pas. Plus jamais. Mais il avait recommencé
Cela arriverait-il encore à l'avenir ?
Chaque fois qu'il portait la main sur elle, c'était lorsqu'elle faisait quelque chose qui lui déplaisait, mais sa réaction était complètement disproportionnée.
Comment est-ce possible d'être autant possessif et avare ? Pourquoi se comporter ainsi alors que le plus clair du temps, il ne donnait aucune importance à sa présence ? Pourquoi tant de violence ? Elle pena qu'il était complètement détraqué.

Subitement, elle se rappela des paroles du frère de M.Mollet, la première fois qu'elle était venue à Tiraline : "Allez-vous en tant que vous en avez encore la possibilité. Après plus personne ne pourra vous aider. Il sera trop tard."
Il l'avait mise en garde.
Est-ce que cela voulait dire qu'il savait déjà ?
Sa tante lui avait souhaité " Bonne chance" et son oncle lui avait demander pardonner.
Eux aussi étaient au courant du comportement violent de M.Mollet ?

La toute première qu'elle était entrée dans ce château, elle avait été émue jusqu'aux larmes d'avoir la chance de vivre dans ce lieu extraordinaire. Mais à présent, elle se rend compte que tout cet or et toute cette beauté n'était qu'un bel artifice. Rien de ce qui se trouve ici était réellement beau. Francesco lui disait souvent : " Il faut se méfier des belles apparences, elles cachent bien souvent une réalité horrifiante." Il avait entièrement raison.

Amandine éprouva le besoin vital de partir. De s'enfuir loin d'ici. Le plus loin possible de ce monstre. Si elle restait ici, Dieu sait ce qui pourrait se passer.
Sans y réfléchir une seconde de plus, elle sortit dans le froid glacial de l'hiver, en robe de chambre et nus-pieds. Elle ne savait pas vraiment ce qu'elle faisait, sa marche relevait de l'instinct. Son corps et son âme la priait de s'en aller pour aller on ne sais où.
Il faisait nuit noire et la neige tombait à gros flocons. Mais Amandine ne ressentait rien du tout. C'était comme si son être s'était mis en pose et que tout ce qu'il l'entourait n'avait plus aucun impacte sur elle. Elle n'était plus capable de crier et de pleurer car son organisme ne savait plus comment s'y prendre.
Elle marchait sous ciel noir, sans regarder où elle se rendait. Elle suivait juste le pas de ses pieds qui marchaient droit devant et qui s'enfonçait dans la glace.

Aussi, sa surprise fut telle, lorsqu'elle entendit la voix de M.Collet. Sans s'en rendre compte, elle avait traversé la forêt de cyprès et avait atterri sur le domaine du ministre de l'humanité.
Combien de temps avait -elle marché ?
Il l'appelait depuis la fenêtre de ce qui ressemblait à une maison de maître, un visage complètement incrédule. Il avait dû la prendre pour une folle avec ses cheveux lâchés et décoiffés, sa robe de nuit blanche et ses bras rouge sang.
Néanmoins, elle fût également surprise de le voir dans une tenue aussi décontracté que elle, ses cheveux noirs tombaient sur l'avant de son visage, sa chemise blanc cassé était à moitié ouverte, et son pantalon tout froissé.
Amandine ne voyait pas très bien, non seulement à cause de l'obscurité, mais aussi à cause de sa vision qui semblait s'être dégradée depuis qu'elle vivait à la capitale. Cet endroit abîmé toutes les parties de son corps.

M.Collet lui fît signe par la fenêtre de s'approcher. Lorsque Amandine fut juste sous le balcon, il lui cria :
- Mais qu'est-ce que vous faites ici par un temps pareil !
Amandine n'arrivait même pas à lever la tête vers sa direction et ne prit pas la peine de lui répondre.
A quoi bon ? Qui pouvait l'aider, si elle-même n'en était pas capable ?
Elle s'apprêtait à repartir, le regard dans le vide, sans savoir où rendre.

La Première Dame Where stories live. Discover now