11 - Domaine de Stratoï

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ABADDON

Caïn était assis sur le sofa face à la cheminée. Il nettoyait son épée de chevalier pleine de sang, avec l'aide d'un chiffon. Je me trouvais devant les plaques de cuisson à attendre que l'eau chauffe. Je m'apprêtais à nous faire un thé bien chaud. Nous en avions bien besoin tous les deux, vu la journée que nous venions de passer. Je ne sentais ni mes jambes, ni mes bras. Aujourd'hui, Arès nous avait fait travailler nos muscles. C'était épuisant, mais nécessaire. Les chevaliers de l'Enfer devaient être en pleine forme et musclé pour pouvoir combattre l'ennemi.

Je regardai la casserole, sans vraiment y prêter attention. Mes pensées étaient ailleurs. Je n'arrêtais pas de me remémorer cette soirée à l'Apoco, il y a deux jours. Ce soir-là, dans le bar en compagnie d'Azazel, mon meilleur ami, nous avions appris par inadvertance, que son frère avait un nouveau succube à sa charge. J'eus une remontée de mon suc-gastrique à la simple pensé d'Asmodée. Ce taré devait souffrir, comme il l'avait fait avec Arias. Une forte douleur se fit ressentir dans mon abdomen, des maux de tête apparaissaient peu à peu. Tout en soupirant, je me retournai vers mon compagnon, qui était aussi mon Mentor. Ce soir, j'allais lui annoncer la nouvelle. Une fois la casserole en ébullition, je transvasai son contenant dans deux tasses ou je plongeai un sachet de thé dans chacune d'entre-elles.

« Tu t'en sors mon Amour ? demandai-je en voyant qu'il frottait comme une brute sur sa lame.

— Oui, ma puce, ne t'en fait pas. » répondit-il en prenant la tasse que je lui offrais.

Je m'assis à côté de lui en prenant mon visage entre mes mains. Mon estomac se tordit et des frissons commencèrent à se faire ressentir dans tout mon corps. Caïn but une gorgée puis m'observa, l'air inquiet.

« Que se passe-t-il Abaddon ? Et ne me dit pas que tout va bien, je sais que c'est faux.

— Zaz et moi avons appris qu'Asmodée a un nouveau Valet à sa charge. » soupirai-je en redressant ma tête.

Mon beau chevalier de l'Enfer m'attrapa les mains pour me montrer son soutien. Il n'avait pas eu besoin de me poser la question qui allait suivre, puisque nous avions effectué la connexion psychique entre le Mentor et son Valet, il y a maintenant deux cents ans. Elle consistait à ressentir toutes les émotions de notre partenaire, où qu'il soit. C'était un avantage comme un inconvénient.

« Qui est-ce ?

— Elle s'appelle Ruby... je crois. hésitais-je, en me massant les tempes.

— Lilith n'a donc rien prit en compte. Je croyais qu'Asmodée devait être suspendu d'avoir un nouveau succube, le temps de clôturer l'enquête de ta sœur.

— C'est ce que je croyais aussi. » rétorquai-je en buvant ma tasse de thé.

Je laissai tomber le reste de mon corps sur le sofa, en prenant garde à ne pas renverser le liquide dans la tasse. Il fallait absolument rouvrir l'enquête sur ma sœur. Ce Prince avait forcément laissé des indices qui prouveraient ses fautes envers Arias. Cela faisait depuis plus d'un an qu'Azazel et moi-même cherchions des potentiels indices qui serviront à l'inculper. Jusqu'ici, nous n'avions rien, mais avec l'arrivée de Ruby, ça allait peut-être faire avancer les choses. Un léger sourire se dessina sur mon visage. Une lueur d'espoir pour rendre justice à Arias.

***

Mon crâne n'allait pas tarder à exploser, sous toutes ses feuilles de papier et coupures de journaux. Cela faisait plus de trois heures que je relisais en long, en large et en travers le dossier que j'avais réalisé avec Azazel, en rapport avec le suicide de ma sœur. J'analysais attentivement les photos de son corps, ainsi que sa lettre. Ses derniers mots écrits sur une feuille.

Sa lettre d'adieu.

Normalement, je ne devrais pas avoir en possession ces images, mais quand vous aviez un ami qui se trouvait être Inspecteur et qu'en plus de cela, il travaillait à l'Ordre des Mouches, ça aidait pas mal. Ma sonnerie "Going Under" du groupe de métal Evanescence, retentit soudainement et me sortit de mes pensées.

Quand on parlait du loup.

« Que se passe-t-il ?

En traînant à la bibliothèque Royal ce matin, j'ai déterré un vieux livre qui parle de sortilèges et tout un tas d'autres choses.

— Oui, c'est super ça. Qu'est-ce que tu veux qu'on fasse avec ton vieux bouquin ?

Il y a certainement un sort ou un enchantement qui pourrait forcer Asmodée à avouer qu'il a poussé Arias au suicide.

— Génial ! Tu veux venir à la maison ?

Je suis déjà en bas. »

Je me précipitai à la porte pour m'empresser d'ouvrir à mon ami. Il entra une pizza à la main, puis le fameux manuscrit de l'autre. Je déposai sans plus attendre cette dernière dans le four, pour lui permettre de garder la chaleur. Le Prince de l'Enfer s'était déjà installé dans le canapé, le livre ouvert à l'endroit même où était apposé un marque-page. Je le rejoignis, impatiente de découvrir ce que contenait cet ouvrage, assez mystérieux. Il était gros et vieux, dont les pages se détachaient à certains endroits.

« Qu'est-ce que tu veux qu'on fasse ? Qu'on s'amuse à lire tout ce grimoire ?

— Bah oui. C'est pour ça que je suis venu, Doon. répondit-il sèchement. À deux, ce sera plus rapide.

— Oui, c'est sûr, mais...

— Quoi ?! Tu avais d'autres projets en tête ? » rétorqua-t-il en jetant un coup dehors.

Le ciel s'était assombri et de grosses gouttes commençaient à chuter au sol. Azazel feuilleta le Grimoire, pendant que je m'enfonçai dans le canapé.

Il était sérieux ! Il voulait vraiment qu'on lise ce truc ?

Je me redressai et lui donnai une tape dans l'épaule.

« Je suis une chevalière de l'Enfer, j'te signale. Tu sais, c'est la race démoniaque qui est chargée de protéger le peuple infernal de toute intrusion.

— Oui, je sais très bien ce qu'est un chevalier de l'Enfer Abaddon. Je vois que tu as bien appris ta leçon. Tu veux une médaille ? » répondit-il en lisant attentivement le paragraphe.

Je me levai, en poussant un soupir d'agacement, afin d'aller chercher la pizza qui se trouvait toujours dans le four.

« Je ne suis pas un rat de bibliothèque ! » m'exclamai-je depuis le comptoir de la cuisine.

Il ne répondit rien à ma remarque et se plongea encore plus dans les pages. Lors de nos recherches, on trouvait des sortilèges écrits en grec, d'autres en langues que je n'avais vu auparavant. Ma tête était en ébullition avant son arrivé, mais maintenant elle était sur le point d'exploser.

Métaxy Kosmone (1 - à la découverte des ténébris)Where stories live. Discover now