12. Et bonne nuit bien sûr

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Ce soir-là, elle n'arriva pas à dormir. Elle se tourna et se retourna sans pouvoir rien n'y faire.

A une heure du matin, elle se rendit compte qu'elle n'y arriverait pas. Elle se leva et s'étira.

Hailey partageait sa chambre avec Candice et Zoé, son lit, situé près de l'entrée lui permettait de sortir sans être remarqué. La pièce était située à l'endroit où d'habitude, il y avait la cabine du capitaine. Elle n'avait pas choisi, mais c'était un bon endroit. 

Les garçons, et la petite Cassie avaient décidé de siéger dans la cale du navire où les deux jeunes hommes avait aménagé cinq chambres avec plusieurs lits chacunes, une salle d'eau, un atelier, une cuisine et une petite bibliothèque.

La chambre des trois filles disposait de trois lits, d'une commode bon marché et d'un miroir accroché au-dessus de cette dernière. La jeune fille enfila un jean ample, et un tee-shirt vert marqué d'un logo que, elle devait l'avouer, ne connaissait pas, noua ses cheveux en un chignon haut d'où s'échappait plusieurs petites mèches et prit une paire de chaussettes blanches montantes. Elle prit son sac à dos noir sur ses épaules et sortit à pas de loup, faisant craquer le plancher sous ses pieds.

Elle rejoignit la proue du bateau et arrivée à sa destination, elle posa le bout de ses doigts sur la rambarde.

Ils naviguaient depuis déjà cinq jours, ici ils étaient plus ou moins à l'abri, entourés d'arbres de part et d'autre de leur esquif. La rivière coulait lentement vers le Sud, leur faisons longer la jungle depuis maintenant quelques heures. Encerclée par les terres d'Ärior et par celle d'Orme, le terrain était vaste.

Elle sentait la légère brise sur son visage, la fraîcheur de la journée ne s'était pas estompée, néanmoins, l'atmosphère était agréable et faisait voleter ses cheveux sur ses joues.

Les oiseaux chantonnaient sur des airs joyeux. 

Elle ouvrit son sac et en sortit un objet que son frère lui avait offert, son dernier souvenir de lui.

Son violon.

Elle fit tourner l'archet entre ses mains et plaça la mentonnière de l'instrument à son endroit de prédilection. La jeune fille se mit alors à jouer, suivant les mélodies qu'empruntaient les oiseaux qui l'entouraient.

Petit à petit, elle fit glisser la musique vers des rythmes plus marqués. 

Ses compagnons à plumes suivirent le changement. Seule la Lune éclairait les environs, elle était pile en face de Hailey, d'une rondeur absolue, et d'une taille gigantesque.

Malgré la nuit, divers papillons voletaient en tous sens à travers la forêt, tel des feus-follets.

Elle n'avait pas besoin de se concentrer, elle jouait du violon depuis sa plus tendre enfance, ce qui lui donnait plus de temps pour réfléchir et regarder autour d'elle.

La mélodie se développa et continua vers un refrain, velouté, doux.

La musique naviguait entre un rythme marqué et des notes mélodieuses. 

Elle repartit sur un autre couplet, laissant la mélodie faire son chemin seule.

Ses mains agissaient indépendamment de son corps. Fermant les yeux, Hailey savoura la beauté du moment, puis les rouvrit.

Elle fit une courte pause, histoire d'écouter le chant des oiseaux qui ne s'arrêtait pas pendant qu'elle admirait les papillons colorés qui s'approchaient lentement d'elle. Des oiseaux de différentes couleurs et races se mirent à tournoyer autour d'elle à l'instant où elle entamait le refrain.

Ses cheveux se soulevèrent et une lueur bleue au reflet vert l'entoura.

Hailey acheva le morceau sur une suite de notes de plus en plus grave, les oiseaux se turent et les papillons repartirent dès l'instant où la dernière note résonna.

Elle crut entendre un bruit de pas derrière elle, se retourna et aperçut une silhouette qu'elle reconnu aisément.

Candice se tenait face à elle, les bras croisés. Par réflexe, elle baissa son instrument et le rangea, lui et l'archet dans son sac-à-dos qu'elle referma rapidement et remit sur son épaule.

-Excuse moi. Je t'ai réveillé ? Demanda-t-elle.

Candice avait toujours été la personne dont elle était la moins proche de leur groupe et elle n'avait aucune idée de comment agir en sa présence, alors autant écourter sa prestation et repartir vite fait se coucher.

-Non ne t'en fait pas, je ne dormais pas. Répondit Candice.

-Moi non plus.

-C'était magnifique, je ne savais pas que tu jouais.

-Je n'ai jamais eu l'occasion de te le dire.

Sa réponse était peut-être un peu sèche. Elle s'efforça de prendre un ton plus calme.

-Alors si ce n'est pas moi, peux-tu me dire ce qui t'as réveillé ? Reprit Hailey, son ton à nouveau empreint de curiosité.

Candice s'approcha de la belle jeune fille, et elle ne la quitta pas des yeux. La première s'accouda à la barrière, à quelques mètres devant sa cadette et celle-ci comprit qu'elle avait dû reculer en jouant. Candice souhaitait sûrement que Hailey la rejoigne et partir aurait été discourtois en cette occasion.

Après quelques secondes de réflexion, elle la rejoignit. Tandis qu'elle se posait à côté d'elle dans la même position, elles gardèrent le silence, attendant mutuellement que l'autre ne rompe le silence d'abord.

-Alors ? La relança Hailey n'y tenant plus après une poignée de longues minutes accompagné d'un immense mutisme.

-Euh... ça te dérange si je ne te réponds pas ?

Son visage était marqué d'une profonde tristesse et d'une étrange hésitation, ce qui n'allait pas avec l'habituel sourire qu'elle leur servait depuis leur départ.

-Qu'y a- t-il ? Tu sembles ridiculement pâle, toi qui a une carnation de peau à l'habitude bronzé. Souligna Hailey.

-Une mauvaise pensée m'a simplement traversée l'esprit et je n'arrivais pas à dormir. Et toi pourquoi es-tu debout si tard, enfin si tôt ?

-Je n'ai pas cessé de ruminer les événements de cet après-midi. Alors j'ai fais ce que je trouvais le plus utile pour me distraire.

-Je t'admire, tu sais...

Hailey fut si surprise par ces mots, qu'elle regarda le vide un instant, attendant qu'elle poursuive.

-Quand Zoé m'a raconté ce que tu as vécu étant plus jeune... Le départ de tes parents, ton frère, ta vie avec mon père, Lucas... Je suis persuadée que les pierres ne pouvaient parvenir à personne d'autre que toi.

Hailey fut bizarrement émue par ces mots et également un peu déroutée qu'elle sache autant d'elle alors qu'elle ignorait tout d'elle.

-J'ai surtout eu beaucoup de chance. Je ne suis toujours pas morte alors que ça aurait dû arriver une bonne dizaine de fois. Toi, tu as réussi à partir de chez toi, tandis que j'ai échoué. C'est toi qui aurait dû le savoir. Tu en aurais été la légitime propriétaire.

-Nous ne sommes pas si différentes que ça, au final, nous avons beaucoup de points communs toutes les deux.

Elles éclatèrent de rire, laissant le stress accumulé au fil des jours se libérer. Les deux jeunes filles restèrent là, à discuter de tout et de rien, l'aube pointant le bout de son nez. 

Elles finirent alors par s'endormir, l'une contre l'autre.

Une héritière perdueWhere stories live. Discover now