Dimanche 23 novembre - 5h19

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Je n'arrive pas à dormir.

La douleur au niveau de mon abdomen est encore si vive qu'aucune position ne m'est confortable.

J'avais hésité un instant à me lever de mon lit, allongé sur le dos, les yeux grand ouverts, à regarder le plafond où se dessinait la faible lueur qui provenait de la rue. Dehors, le silence qui régnait aurait permis à n'importe qui de se rendormir sans aucun problème.

Je savais que je n'aurais pas cette chance.

Pas cette nuit.

Je me suis redressé, tant bien que mal, puis j'ai rejoint la cuisine, plié en deux. J'ai allumé le néon qui se trouvait au-dessus des plaques électriques. La faible lumière qui apparut me permit de trouver une boîte de cachetons que j'avais laissée sur la table en formica. Je l'ouvrai nerveusement, la douleur se faisant plus présente à nouveau. J'en pris quelques-uns - je n'arrive pas à me souvenir combien - ainsi qu'un verre d'eau.

J'espérais qu'ils fassent effet immédiatement, mais je savais que ce ne serait pas le cas. Les deux bras appuyés sur la table, je regardais la petite horloge murale : 4h11.

Je me sentais ridicule. Minable.

J'étais là, debout au milieu de la nuit, tordu de douleurs, parce que j'avais été tabassé par une femme.Mais bon sang, qu'est-ce qui ne tournait pas rond chez moi ?

Putain, tout ce que je veux, c'est être apprécié, aimé. Merde !

J'ai pas l'impression de demander la lune. Je veux juste être apprécié.

Je veux juste pouvoir rire de temps en temps.

Je veux juste avoir l'esprit tranquille, et non pas torturé par des idées noires incessantes.

Je veux juste être heureux. Juste un peu.

Putain, j'en ai marre !

Je me suis assis à la table.

Il fallait que je parle au plus vite à Julie. Il n'y avait qu'elle qui pouvait m'aider à ne pas faire de conneries. J'hésitais à lui téléphoner. En même temps, on était au beau milieu de la nuit. Sûrement pas le moment le plus propice pour la déranger.

Pourtant j'aurais tellement eu besoin de lui parler.

J'aurais tellement eu besoin de quelqu'un pour me calmer, quelqu'un à qui j'aurais pu confier mon mal-être. Ce besoin devenait de plus en plus oppressant. Je bouillonnais, intérieurement. Je n'avais encore jamais autant ressenti cette colère au fond de moi, cette rage, cette haine.

J'avais besoin de me défouler.

Je sentais ma mâchoire se serrer. Des larmes me montèrent aux yeux, mais je les retenais.

« Pourquoi ? »

J'en savais rien.

C'est vrai, après tout, j'étais seul chez moi. Personne pour me voir pleurer. Personne pour se foutre de ma gueule en me pointant du doigt. Personne pour me traiter de gonzesse.

J'aurai pu me lâcher.

« Alors pourquoi te retenir ? »

Parfois, j'avais l'impression d'agir et de me comporter comme si on m'observait constamment, peu importe où je me trouvais. Comme si ma vie était en permanence filmée et suivie par des millions de personnes - un peu à la manière de The Truman Show.

Alors que j'étais bien évidemment tout le temps seul.

En l'occurrence, je m'imaginais surtout que Julie me voyait, comme si elle était là, dans mon appartement, assise en face de moi, à ma table.

Point of no returnWhere stories live. Discover now