24. Pyrotechnie

1.4K 197 259
                                    

Jeudi 14 juillet 2016

Si j'étais la metteuse en scène de ma propre vie, je couperais au montage tout ce qui est inutile ou stressant. Et puis, j'irais plus loin. J'éviterais aux acteurs de jouer les scènes qu'ils n'ont pas envie de jouer. Voilà, je leur demanderais leur avis. Genre « hey les gars, ça vous dit de tourner un truc comme ça ? » et là, si tout le monde me dirait « Noooon ! c'est nul ». Alors ok, on le ferait pas. Aujourd'hui, par exemple, si le metteur en scène de ma vie m'avait demandé mon avis, je vous garantis que ça se serait pas passé comme ça !

Dans mon film idéal, on serait bien allés à la Bastille avec Gab pour voir le feu d'artifice. Je lui aurais laissé amener sa guitare, même si, au début, j'avais pas compris pourquoi il l'avait apportée et que, entre nous, vu que ça faisait pas plus d'un mois qu'il prenait des cours, j'avais des doutes concernant sa prestation.

C'était pour le feu d'artifice. Vu, qu'on serait très éloignés de la zone de lancer, on aurait pas de musique et Gab, il pouvait pas concevoir un feu d'artifice sans musique. J'ai pas cherché à le contredire. Tant qu'il ne jouait pas de la variété française, ça m'allait.

Bon, pendant la montée, il y a eu un passage un peu stressant. Mais c'était pas grand-chose. Et franchement, si j'avais eu que ça à gérer ce jour-là, je ne me serais même pas plainte. On marchait sur le large chemin de terre qui serpentait jusqu'à la Bastille et, vu qu'on était pas pressé, on se faisait souvent dépasser. Et à un moment, il y a eu un groupe d'ados qui m'a carrément bousculé.

Comme d'habitude, j'ai marmonné de vagues excuses, alors que ce n'était pas ma faute. Personne ne s'est retourné. Est-ce que je suis si invisible que ça ?

- Tu sais Alice, a lancé Gab, même dans la mer, les dauphins se font bousculer par les GROSSES BALEINES.

L'une des filles s'est retournée et nous a lancé un regard noir. Ce n'est pas elle qui m'avait bousculé, mais je m'en foutais. Je ne pouvais pas m'empêcher de sourire.

- Tu veux dire que tu trouves que je ressemble à un dauphin ? j'ai demandé en haussant un sourcil.

- Ouais parce que t'es probablement très intelligente, mais on comprend rien à ce que tu dis.

Bien sûr, j'ai râlé comme un putois et il en a profité pour continuer à me narguer. Il a terminé la fausse dispute par un : « Hum ? Qu'est-ce que tu dis petit dauphin ? Je comprends rien... »

Ouais bon, j'ai pas dit que le film de ma vie devait être passionnant, hein !

Bref, sur ces entrefaites (ouais, c'était mon défi du jour de caler ce mot), on est arrivé au fort de la Bastille. Bien sûr, c'était blindé. À mon avis, si la moitié de Grenoble se trouvait au parc Paul Mistral d'où allaient être tirés les feux d'artifice, l'autre moitié se trouvait amassée ici.

En voyant ça, Gab a fait :

- Vient, on va trouver un endroit plus tranquille. T'imaginais quand même pas que j'avais prévu de jouer de la guitare en public ?

Moi, je lui ai pas dit qu'à la base, j'avais même pas imaginé qu'il allait jouer de la guitare. On s'est installé un peu plus bas aux pieds les remparts recouverts d'herbes. On avait une bonne vue sur la ville et on était au calme. Bref, c'était THE PERFECT SPOT. J'ai sorti ce que ma mère nous avait préparé et on a mangé tout en débattant sur nos personnages préférés dans Games of Throne.

***

Une fois le pique-nique englouti, j'ai regardé les fenêtres et les lampadaires s'illuminer un à un pendant que Gab accordait sa guitare.

Nutella Girl [En Pause]Where stories live. Discover now