chapitre 10

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"suivre, se perdre, se retrouver, se sauver, se tuer"

Le mensonge, on a vécu dedans, grandit dedans, il ne s'arrête jamais, c'est pour cela que la vérité blesse.

J'avais feuilleté quelques pages du journal et je m'étais rendu compte qu'il n'y avait pas que des partitions. Il y avait des textes, des poèmes, de vieilles photos. Un homme essentiellement, et une petite fille. Elles étaient en noir et blanc et tachées pour certaine mais il n'empêche que ces images m'avaient fait voyager.

J'avais retenu une des feuilles, elle m'avait interpellée car elle était pliée en quatre au fond du journal, comme si le propriétaire avait voulu la cacher. Je l'avais prise et l'avais dépliée, m'introduisant ainsi dans l'intimité de cet inconnue.

Une autre image avait glissée. La petite fille. Elle portait une robe bleu ciel, décolorée à cause de la mauvaise qualité( l'âge des photos montraient que la couleur commençait seulement à apparaître), et tenait un chiffon dans sa main, surement son doudou. Ces cheveux blond étaient tressées sur le côté et elle souriait. Elle paraissait vraiment heureuse.

j'avais posé soigneusement la photo sur mon bureau et m'étais concentrée sur la feuille. Un poème, et une phrase :

foule insensée

et recensée

démolie

ou abolie

monde torturé

ou capturé

silence noyé dans le bruit

la vérité est un silence noyé dans le bruit. Un silence noyé dans l'espérance. « comprendre et le commencement d'approuver »

je ne comprenais pas tout, normal, j'étais humaine. Et là je ne comprenais pas pourquoi je possédais ce carnet. Je ne savais pas à qui il était, qui était cet homme et cette fille, ni qui me l'avait envoyé et je ne savais pas non-plus pourquoi cela m'importait tant.

J'avais continué à feuilleter les pages et j'avais trouvé un morceau, le nom du compositeur était effacé à cause de l'eau. je l'avais retenue elle parmi tant d'autre car elle s'intitulait

« la tempête ».

Sans réfléchir, je m'étais installée devant le piano pour jouer. Le plus dur avait été de déchiffrer la partition. J'avais regardé une vidéo mais les sous-titres n'étaient pas officiels ce qui donnait parfois des choses dans le genre « compter le nombre de poulets. »

je savais que je m'étais précipitée à le jouer à cause de son titre. le genre de titre qui nous parlent tellement que nous ne pouvons les oublier. ils nous obsèdent, chuchotent en criant à notre oreille, ou bien crient en chuchotant je ne suis pas sûr, mais en tout cas ils sont là et ne partent pas de sitôt.

Le vent, le tonner.

Je ressentais de partout. La musique défilait sous mes yeux sans que je ne m'en rende compte.

Je sortais de la piscine, malgré toutes les préventions de ma mère, j'étais partie m'entrainer après les cours. Le vent avait commencé à souffler.

Une vague de froid me submergea alors je décalai ma main pour reprendre la bonne note. les images s'infiltrant naturellement dans mon âme.

Sur le chemin du retour, il commençait à pleuvoir. Mon arrêt de bus se trouvait à un kilomètre de chez moi comme j'habitais un peu en retrait de la ville. Je me mis donc en marche, rentrant un peu plus ma tête dans le col de mon pull.

Le morceau commençait à s'accélérer. Je m'arrêta quelque instant pour ne pas me tromper.

Un coup de tonner résonna au-dessus de ma tête, je me retourna en sursautant pour apercevoir des restes de fumé. L'éclair avait traversé un vieil arbre. Une voiture s'arrêta de surprise face à ce spectacle et, prise moi aussi de curiosité, je m'approcha de ce centenaire carbonisé.

La mélodie continuait, s'infiltrant dans tous les aspects de mon corps, triomphant par d'uniques sensations. La partition se transposa en mode mineur.

Un coup de vent me frappa dans le dos. Mon pied se prit dans une pierre, je trébucha, et, manquant d'équilibre, ce vent me propulsa dos contre l'arbre.

Il passa en crescendo puis decrescendo et fini sur un mi. Se taisant à jamais dans une douleur infâme, comme moi lorsque je retomba au sol, paralysé à vie. 

Le silence du pianoWhere stories live. Discover now